À force de s’arracher les cheveux et de les avaler, une jeune femme de 17 ans a développé un trichobézoard, une énorme boule de cheveux qui a fini par lui perforer l’estomac. Une pathologie surnommée syndrome de Raiponce, dont on compte à peine une soixantaine de cas.


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    Le syndrome de Raiponce, du nom de la princesse de Disney aux très longs cheveux dorés, n'a rien d'un conte de fées. C'est plutôt un cas cauchemardesque de cette étrange maladie que relate la revue médicale BMJ du 8 février.

    Une jeune fille de 17 ans se présente aux urgences du Queen's Medical Centre de Nottingham après deux épisodes de syncope qui ont entraîné une chute avec des ecchymoses faciales et un hématome au cuir chevelu. Les médecins, qui visent d'abord à exclure une lésion intracrânienne, remarquent alors une curieuse massemasse au niveau de son abdomen. Lors d'un interrogatoire, la jeune fille confirme avoir souffert de douleurs abdominales intermittentes lors des cinq derniers mois, qui se sont aggravées durant les deux dernières semaines. Elle explique avoir perdu du poids, tout en niant un quelconque changement de régime ou une perte d'appétit.

    Une boule de cheveux de 50 centimètres

    Un scannerscanner abdominal révèle alors une énorme boule de cheveux de 48 x 5 x 7 cm dans son estomacestomac, qui a perforé la paroi intestinale sur deux centimètres. De multiples poches de pus et de fibrinefibrine (une protéineprotéine filamenteuse qui se forme lors de la coagulationcoagulation sanguine de plaies) se sont formées entre l'estomac, très distendu, la raterate, le diaphragmediaphragme et le foiefoie gauche. La masse de cheveux est tellement énorme qu'elle forme une sorte de « moulage » de l'estomac et du duodénumduodénum. Les médecins sont alors contraints de pratiquer une gastrotomie, puis de purger l'abdomen avec un abondant lavage à l'eau saline. La patiente est ensuite nourrie par jéjunostomie, qui consiste à poser une sonde d'alimentation directement à travers la peau et la paroi de l'estomac. Elle sortira finalement de l'hôpital sept jours après, avec un suivi médical durant 30 jours.

    Le trichobézoard retiré chez la patiente mesurait près de 50 centimètres de long, formant une sorte de « moulage » de l’estomac. © Jamaall Jackman et al., BMJ Case Reports, 2021
    Le trichobézoard retiré chez la patiente mesurait près de 50 centimètres de long, formant une sorte de « moulage » de l’estomac. © Jamaall Jackman et al., BMJ Case Reports, 2021

    Trichobézoard : entre 0,4 % et 1 % de personnes concernées

    Cette masse de cheveux, appelée trichobézoard (ou trichobézoaire), n'a pas atterri dans l'estomac de la jeune fille par hasard. Celle-ci souffre en effet d'un syndrome de Raiponce, qui associe la trichotillomanietrichotillomanie (le fait de s'arracher de façon compulsive les cheveux) à la trichophagie (qui consiste à avaler les cheveux). Les cheveux n'étant pas digestibles par les enzymesenzymes gastriques ni éliminés par le péristaltismepéristaltisme naturel du fait de leur nature « glissante », ils finissent par s’accumuler dans l’estomac pour former une boule qui peut prendre des proportions impressionnantes : on a parfois retiré des masses de cheveux allant jusqu'à trois kilogrammeskilogrammes, avec des ramifications s'étendant jusque dans l'intestin grêleintestin grêle.

    Le saviez-vous ?

    Entre 0,5 % et 3 % de personnes souffrent de trichotillomanie, mais seulement 10 % à 30 % d’entre eux développent également une trichophagie. Le syndrome de Raiponce touche principalement des femmes jeunes, 79 % des cas ayant moins de 20 ans. Selon une étude de 2018, une soixantaine de cas ont été rapportés dans la littérature médicale depuis la découverte de ce syndrome en 1968.

    Syndrome de Raiponce : symptômes et complications

    Les symptômessymptômes typiques de trichobézoard comprennent l'halitose (mauvaise haleine), les douleurs abdominales, les nausées, les vomissements, la perte d'appétit et de poids. Le trichobézoard peut donner lieu à des complications comme l'ulcère gastrique, l'occlusion voire la perforation intestinale, la diarrhéediarrhée et une carencecarence en vitamine B12 (due à la colonisation bactérienne des cheveux). En 2017, une jeune britannique de 16 ans est même décédée d’un syndrome de Raiponce après une péritonitepéritonite qui a entraîné une défaillance de ses organes vitaux. Une fin bien moins heureuse que dans le film de Disney, où Raiponce et son prince charmant se marièrent et vécurent heureux.