Des chercheurs ont examiné des milliers de lignées de mouches et trouvé qu’un mutant dormait beaucoup moins que les mouches normales… Et pour cause, l'animal, portant une version modifiée du gène « taranis », était dépourvu de la protéine du même nom. Celle-ci favoriserait en fait le sommeil en interagissant avec une protéine régulatrice, la cycline A.

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    Certains ont besoin de plus de sommeil que d’autres. La raison pourrait être génétique. © martinak15, Flickr, CC by 2.0

    Certains ont besoin de plus de sommeil que d’autres. La raison pourrait être génétique. © martinak15, Flickr, CC by 2.0

    En général, les adultes ont besoin de 7 à 8 heures de sommeil par nuit pour être en forme, mais certains semblent se contenter de bien moins. La différence est-elle génétique ? Il existe encore beaucoup de choses que nous ignorons sur le sommeil, en particulier du point de vue moléculaire et cellulaire. Comme le sommeil est un comportement essentiel qui concerne beaucoup d'animaux, il peut être étudié chez des modèles génétiques comme la drosophiledrosophile.

    Dans une recherche parue dans Current Biology, des chercheurs de l'institut Farber pour les neurosciences à l'université Thomas Jefferson, aux États-Unis, décrivent deux gènes nécessaires au sommeil de la mouche, celui de la protéine Taranis et celui de la kinase cyclinecycline dépendante 1 (Cdk1). Nouveau gène régulateur du sommeil, taranis a été isolé grâce à un screening génétique et code pour une protéine qui serait nécessaire à un profil de sommeil normal.

    Par une série d'expériences génétiques et biochimiques, les chercheurs ont suivi l'interaction de Taranis avec d'autres protéines et observé qu'elle s'associait à la cycline A, une protéine régulatrice du sommeil : Taranis contrôle les niveaux de CycA et interagit avec elle pour favoriser le sommeil. La protéine Taranis et la cycline A créeraient une machine moléculaire qui inactive Cdk1, dont la fonction est de supprimer le sommeil et de favoriser l'état d'éveil.

    Les chercheurs ont étudié des mutants de drosophiles. Sans la protéine Taranis, ils dormaient moins que les autres. © André Karwath aka Aka, Flickr, CC by sa 2.0

    Les chercheurs ont étudié des mutants de drosophiles. Sans la protéine Taranis, ils dormaient moins que les autres. © André Karwath aka Aka, Flickr, CC by sa 2.0

    Taranis contrôle le sommeil de la drosophile

    Une recherche précédente avait montré que la cycline A est exprimée dans un petit nombre de neuronesneurones, dont sept situés de chaque côté du cerveau. Ces neurones sont localisés dans une aire du cerveaucerveau de la mouche qui correspondrait à l'hypothalamus humain, l'un des centres du sommeil chez l'Homme. Quand le gène taranis était supprimé dans ces quatorze neurones, le sommeil était réduit.

    Ces neurones pourraient donc représenter un centre d'éveil dans le cerveau de la mouche ; la protéine Taranis aurait comme effet d'inhiber ce centre d'éveil pendant le sommeil. Les chercheurs proposent qu'elle contrôle la quantité de sommeil en agissant sur les niveaux de protéine CycA et en inhibant l'activité Cdk1 dans ce nouveau centre de l'éveil.

    Taranis est un homologue de la famille des régulateurs de transcriptiontranscription humains Trip-Br (SERTAD) mais la recherche ne dit pas pour l'instant si un mécanisme similaire existe chez l'Homme. Ces résultats représentent quand même une avancée dans la compréhension des mécanismes du sommeil, car, comme l'explique Kyunghee Koh, auteur de cette étude : « Notre recherche élucide une nouvelle voie moléculaire et une nouvelle aire cérébrale qui joue un rôle dans le contrôle de la duréedurée du sommeil ».