Les pirates des XVIIe et XVIIIe siècles sont passés à la postérité comme étant des criminels redoutables qui ont semé la terreur sur les mers pendant des décennies. Leurs histoires de trésors cachés, de batailles épiques et de bravoure ont captivé l'imagination populaire. Pourtant, derrière la légende, se cache une histoire plus complexe, qui a souvent impliqué politique, commerce et rivalités entre grandes puissances européennes.


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    Les pirates sont souvent dépeints dans la culture populaire comme des personnages sans foi ni loi, parcourant les mers à la recherche de richesses et semant la terreur partout où ils passent. Ils sont une source intarissable pour l'imaginaire et ont fait l'objet de nombreuses adaptations littéraires et cinématographiques. Mais qui étaient vraiment les pirates, et d'où viennent-ils ? 

    Les origines des pirates

    L'histoire des pirates remonte à l'Antiquité : des groupes de marins commencent à piller des navires marchands en Méditerranée. Dans cette région du monde, « la piraterie est aussi vieille que l'histoire », comme disait l'historienhistorien français Fernand Braudel. Cependant, c'est au Moyen Âge que les pirates commencent à émerger en tant que groupe distinct.

    À cette époque, la distinction entre corsaires et pirates est encore très floue. Flou qui perdure d'ailleurs jusqu'à l'époque moderne. Dans les deux cas, la prise d'un butin constitue l'objectif principal des attaques : le butin peut être la prise d'un navire, d'un équipage ou de marchandises. Toutefois, il existe une différence majeure entre corsaires et pirates : 

    • les corsaires sont armés et utilisés par les États d'Europe occidentale contre leurs ennemis. Ils agissent donc dans un cadre légal et sont mandatés par un souverain ou un représentant de l'autorité royale ou impériale. C'est une activité ponctuelle menée à la demande du roi, les corsaires naviguent sous pavillon officiel et respectent les navires neutres ou compatriotes ;
    • à l'inverse, les pirates opèrent pour leur propre compte, ils écument les mers, attaquent et pillent aussi bien en temps de guerre qu'en temps de paix et quel que soit le pavillon du navire en face. 
    Un tableau de Bonaventura Peeters de la marine néerlandaise et des pirates. © Wikimedia Commons, domaine public
    Un tableau de Bonaventura Peeters de la marine néerlandaise et des pirates. © Wikimedia Commons, domaine public

    Les pirates qui ont certainement le plus marqué l'imaginaire collectif sont ceux qui sillonnent la mer des Caraïbes. On entend d'ailleurs parfois le terme de flibustier. Ces marins des Caraïbes ont une histoire bien particulière. En effet, ce sont des marchands et des aventuriers qui arpentent la mer des Caraïbes afin de s'immiscer dans le commerce américain, chasse gardée de la couronne espagnole. Pour cela, ils ont recours à la contrebande avec l'accord tacite des puissances françaises, hollandaises et anglaises qui espèrent ainsi récupérer une partie du commerce local. C'est ainsi que dès le milieu du XVIe siècle, les « Sea Dogs » anglais et les « Gueux de la mer » hollandais parcourent l'espace maritime carribéen. Les autorités espagnoles les considèrent de fait comme des pirates. À l'origine, la flibuste n'est pas considérée comme de la piraterie puisqu'elle n'attaque pas les bateaux de ses compatriotes. Toutefois, l'essor fulgurant de l'économie de plantation au milieu du XVIIe siècle et le développement des échanges commerciaux officiels entre l'Angleterre et l'Espagne rendent quelque peu encombrantes les activités des flibustiers. La flibuste est alors désignée comme piraterie par l'Angleterre, puis par la France. 

    Mais les flibustiers ne sont pas les seuls à écumer les Caraïbes. Les boucaniers viennent progressivement gonfler les rangs de la piraterie locale. Ces anciens chasseurs de gibiers des îles alentour produisent également en quantité le fusil du boucanier et fournissent en armes les navires de guerre. Déserteurs, esclaves en fuite ou encore nobles en déshérence, les boucaniers s'allient aux flibustiers au cours du XVIIe et deviennent de redoutables écumeurs des mers, détroussant navires et équipages. 

    Capture du pirate Barbe noire. © Wikimedia Commons, domaine public
    Capture du pirate Barbe noire. © Wikimedia Commons, domaine public

    Au début du XVIIIe siècle, la piraterie connaît un nouveau regain d'activité avec la fin de la guerre de Sécession d'Espagne. Alors même que le commerce triangulaire est à son apogée, les marins et autres corsaires impliqués dans le conflit se retrouvent sans activité et sans revenu. Ils se tournent alors vers la piraterie en attaquant les navires transatlantiques et leurs cargaisons. C'est à cette époque que se construisent les légendes de la piraterie : Barbe noire, Black Sam aussi surnommé le prince des pirates, Jack Rackham ou encore Mary Read sont quelques-uns des noms les plus connus. 

    La vie des pirates

    Pour autant, la vie des pirates n'est pas facile. Les pirates passent souvent des mois voire des années en mer, et ils doivent affronter des tempêtestempêtes, l'humidité permanente des navires, les maladies et les attaques de navires ennemis. Cependant, la vie de pirate offre également des avantages, comme une plus grande liberté et une meilleure rémunération que celle des marins ordinaires. En outre, malgré les croyances actuelles, la vie à bord d'un navire pirate est régie par un ensemble de règles rigoureuses. Les pirates sont organisés en équipages, dirigés par un capitaine élu par les membres de l'équipage. Le capitaine doit respecter l'ensemble de ses coéquipiers et ne bénéficie pas d'avantages particuliers. Tous doivent se soumettre au code de conduite des pirates qui énonce les règles à suivre, notamment concernant le partage équitable du butin.

    Lors des attaques, les pirates utilisent les drapeaux qu'ils hissent sur le mât pour avertir leur cible. Les pavillons hissés sur le grand-mât répondent à un code couleur bien précis :

    • les pirates hissent le pavillon noir avant d'attaquer, donnant la possibilité à l'équipage adverse de se rendre ;
    • si l'équipage refuse, alors les pirates hissent le pavillon rouge. Cela signifie qu'il n'y aura pas de quartier. 

    Certains pirates, dont Henry Jennings, installent un repaire qui leur sert de base arrière, désigné sous le nom de la République des Pirates. Elle se situe sur le lieu de l'actuelle capitale des Bahamas, Nassau. C'est le point de départ de nombreuses expéditions contre les navires marchands des Antilles mais l'autorité coloniale y est restaurée par les Anglais en 1718.