À qui appartient ce crâne fossile qui semble tout droit sorti d’un film d’horreur ? Avec ses longues dents saillantes, il semble plus proche d'un éléphant cauchemardesque que d’un dauphin. Quelle était donc l’utilisation de ces drôles de défenses ?


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    Les dents des cétacés actuels ne sont d'ordinaire pas très variées. Chez ceux qui en possèdent, les odontocètes, la denture est généralement homogène et toutes les dents sont semblables, c'est ce que l'on appelle l'homodontie. Mais il semblerait bien qu'à la fin de l'Oligocène, il y a 25 millions d'années, c'était une tout autre histoire ! Des chercheurs de l'Université d'Otago, Nouvelle-Zélande, ont publié une étude parue dans la revue Proceedings of the Royal Society B qui décrit un prédateur marin bien étrange.

    Le crâne extrêmement bien conservé aux dents impressionnantes a été découvert en 1998, contenu dans un bloc tombé au pied d'une falaise située sur l'île du Sud de Nouvelle-Zélande. © Amber Coste
    Le crâne extrêmement bien conservé aux dents impressionnantes a été découvert en 1998, contenu dans un bloc tombé au pied d'une falaise située sur l'île du Sud de Nouvelle-Zélande. © Amber Coste

    Des dents hors norme ressemblant à des défenses

    Ce qui est frappant chez ce cétacé fossile, c'est sa denture. Nihohae matakoi, c'est son nom, n'avait pas exactement les dents bien alignées. Ce cétacé plus proche des dauphins que des baleines parcourait les eaux marines qui recouvraient l'île du Sud de la Nouvelle-Zélande actuelle, et arborait au bout de son long rostre aplati un sourire hérissé de multiples dents semblables à des défenses. Celles-ci, contrairement aux véritables défenses des éléphants ou des narvalsnarvals, ne s'allongeaient pas durant toute la vie de l'animal, mais la plus longue mesurait tout de même plus de 11 centimètres. 

    Les différents éléments du crâne de <em>N. matakoi</em> en vue dorsale (a) et (d), ventrale (b) et (e), et latérale (c) et (f). Les photos (g) présentent les dents de la mâchoire inférieure (mandible) en vue externe et interne. © A. Coste <em>et al</em>. (2023)
    Les différents éléments du crâne de N. matakoi en vue dorsale (a) et (d), ventrale (b) et (e), et latérale (c) et (f). Les photos (g) présentent les dents de la mâchoire inférieure (mandible) en vue externe et interne. © A. Coste et al. (2023)

    L’utilisation mystérieuse de ces dents

    Les auteurs de l'étude ont cherché à savoir comment le cétacé pouvait avoir utilisé ces dents effilées. L'absence d'usure des dents proéminentes a révélé qu'elles ne servaient probablement pas à remuer et tamiser le substratsubstrat afin d'y dénicher des proies. Leur forme allongée et leur relative fragilité excluent aussi les combats avec d'autres individus de l'espèceespèce ou contre des prédateurs.

    En observant la morphologiemorphologie verticalement aplatie du rostre, les scientifiques pensent que Nihohae matakoi l'utilisait probablement pour chasser comme les poissonspoissons-scies actuels, qui donnent de rapides coups de droite à gauche afin d'infliger des blessures qui assomment leurs proies, avant de les avaler sans les mâcher. Les dents plus en arrière sur la mâchoire ne sont d'ailleurs pas très usées non plus.

    Le poisson-scie fait de rapides mouvements latéraux pour assommer ou déchiqueter ses proies avant de les avaler tout rond. © B. E. Wueringer, YouTube

    Mais les auteurs n'excluent pas la possibilité que ces dents étranges soient un caractère utilisé pour plaire aux partenaires sexuels, des recherches plus poussées sont nécessaires pour déterminer précisément la fonction de ces structures inhabituelles.