C’est une nouvelle classe de Noyaux Actifs de Galaxies (en anglais AGN) qui vient d’être détectée grâce aux satellites Swift de la NASA et Suzaku de la JAXA. Non seulement les astrophysiciens vont devoir réviser la théorie de l’accrétion de la matière chutant sur les trous noirs massifs au centre de beaucoup de galaxies, mais c’est aussi le nombre d’AGN dans l’Univers qu’il va falloir réévaluer. Il devrait en exister quelques-uns assez proches de notre Voie Lactée, ayant échappé à toutes détections jusqu’à présent.

au sommaire


    Représentation d'artiste de l'AGN entouré par une coquille de gaz et de poussières presque opaque à son rayonnement (Crédit : Aurore Simonnet, Sonoma State University).

    Représentation d'artiste de l'AGN entouré par une coquille de gaz et de poussières presque opaque à son rayonnement (Crédit : Aurore Simonnet, Sonoma State University).

    On sait que les noyaux actifs de galaxiesnoyaux actifs de galaxies sont en fait des trous noirs de masses comprises entre plusieurs millions et plusieurs milliards de masses solaires, émettant une énorme quantité d'énergie suite à des processus complexes, et pas toujours bien compris, d'accrétion de matière et de magnétohydrodynamique relativiste.

    A l'origine, une grande variété de noyaux avait été détectée. Plusieurs noms destinés à indiquer des objets distincts avaient alors été créés : galaxies de Seyfertgalaxies de Seyfert, quasarsquasars, blazarsblazars etc... Les progrès des observations aidant, ainsi que les avancées en astrophysiqueastrophysique relativiste, on avait fini par penser qu'il s'agissait en fait d'un même type d'objets, mais vus sous différents angles et à différentes périodes de l'histoire de l'UniversUnivers.

    Le modèle unifié des AGN expliquant les différentes observations par des différences de points de vue<br />(Crédit : Aurore Simonnet, Sonoma State University).

    Le modèle unifié des AGN expliquant les différentes observations par des différences de points de vue
    (Crédit : Aurore Simonnet, Sonoma State University).

    Dans une région guère plus grande que le système solairesystème solaire, devait se trouver un tore de poussières et de gazgaz neutres entourant un disque d'accrétiondisque d'accrétion de matière chutant sur un trou noir de Kerrtrou noir de Kerr en rotation. Le plasma chauffé pénétrant dans l'ergosphère du trou noir participait alors à un mécanisme complexe, élucidé en partie par Blandford et Znajeck, où l'énergie gravitationnelle de chute de la matière, et surtout l'énergie de rotation du trou noir, étaient converties en rayonnement intense et en jets de matière le long de l'axe de rotation de l'astreastre compact. Dans certains cas, la luminositéluminosité de l'AGN résultant dépassait celle d'une galaxie contenant 100 milliards d'étoilesétoiles. Seul un trou noir de Kerr est capable d'une telle prouesse.

    Il est bien connu que le nombre de quasars dans l'Univers, après avoir été important dans ses premiers milliards d'années d'existence, n'a cessé de diminuer. Cela est d'ailleurs conforme à la théorie du Big BangBig Bang et cette donnée fut utilisée en son temps pour réfuter le modèle d'Univers stationnaire de Bondi-Hoyle. L'interprétation admise est que la quantité de gaz et la fréquencefréquence des collisions entre galaxies étant importantes au début de l'Univers et de l'histoire des galaxies, les AGN étaient copieusement alimentés en énergie. Récemment, des simulations informatiques ont de plus montré qu'en raison même de l'activité des trous noirs massifs à cette époque, une partie du gaz les alimentant a fini par être soufflée en dehors des galaxies, causant par là même une chute du nombre de quasars.

    Les observations de Swift et Suzaku

    Sans vraiment remettre en cause toutes ces interprétations, la découverte d'AGN dans lesquels le trou noir central est entouré, non plus d'un disque de poussières et de gaz mais bien d'une coquille, implique malgré tout de revoir un peu la copie. Ce n'est en effet pas seulement les mécanismes à l'origine de l'accrétion de matière formant un AGN qu'il faudra mieux comprendre pour expliquer la formation et le dynamisme de ces coquilles, mais aussi l'histoire et la répartition dans le temps et l'espace des AGN qu'il faudra affiner.

    Jusqu'à présent, ces AGN avaient échappé à toutes détections dans le visible et l'ultravioletultraviolet parce que ces rayonnements sont bloqués par les couches de gaz et de poussières les entourant. Mais si l'on en croit les observations en rayons Xrayons X de SwiftSwift et Suzaku, il devrait y avoir des centaines de tels AGN dans l'environnement proche de notre amas de galaxiesamas de galaxies.

    L'équipe japonaise a en particulier étudié deux galaxies, ESOESO 005-G004 et ESO 297-G018, qui sont à 80 millions et 350 millions d'années-lumièreannées-lumière respectivement. Dans les deux cas seuls les rayons X les plus énergétiques ont été détectés. Ce qui explique pourquoi même avec les autres satellites d'observations en rayons X, cette classe d'AGN qui devrait être assez fréquente avait échappé aux astrophysiciensastrophysiciens.

    Image du site Futura Sciences
     ESO 005-G004 en haut et ESO 297-G018 en bas (Crédit : DSS/UK Schmidt Telescope/AAT Board).

     ESO 005-G004 en haut et ESO 297-G018 en bas (Crédit : DSS/UK Schmidt Telescope/AAT Board).

    Un biais dans l'observation des populations de trous noirs géants et dans l'étude de leur évolution dans l'espace et le temps vient donc d'être décelé. C'est une découverte importante car de plus en plus les chercheurs se rendent compte du rôle de ceux-ci dans l'évolution des galaxies et donc dans celui des étoiles à l’origine de la Vie elle-même.