Le philosophe français Gaston Bachelard a autrefois dit qu'une science « a l'âge de ses instruments de mesure », ce qui revient à dire que les sciences progressent avec l'invention et l'amélioration des instruments de mesure. La France, par l'intermédiaire du CNRS, veut catalyser des bonds technologiques à travers ceux des instruments permettant d'explorer les mystères de l'origine de la vie via un projet de type « programme et équipement prioritaire de recherche » (PEPR) pour l'exobiologie.


au sommaire


    D'ici la fin des années 2020, le Télescope géantTélescope géant européen, en anglais Extremely Large Telescope (ELT - anciennement European Extremely Large Telescope, E-ELT), verra sa première lumière, comme disent les astronomesastronomes. L'ELT sera aussi parti à la chasse aux exoplanètes et avec une résolutionrésolution quatre fois supérieure au Grand télescope des îles Canaries (GTCGTC), dont le miroir possède un diamètre de 10,40 mètres, il sera en mesure d'obtenir des images directes d'exoplanètes. Surtout, il sera en mesure d'étudier et de caractériser des atmosphèresatmosphères d'exoplanètes par spectroscopie et de détecter la présence de planètes de la taille de la Terre dans la zone habitable.

    Le télescope spatial James-Webb de la Nasa et de l'ESA a déjà commencé la caractérisation de certaines atmosphères et on espère qu'il nous fournira d'ici quelques années des indices concernant des biosignatures de la vie ailleurs, bien que leurs définitions soient encore élusives.

    Des matériaux en provenance d'astéroïdes et de la planète Mars, sous forme de météoritesmétéorites ou d'échantillons prélevés in situ et parfois ramenés sur Terre, comme ce fut le cas récemment avec le retour sur notre Planète bleue de la mission Osiris-Rex, sont eux des objets d'étude pour comprendre l'origine de la vie sur Terre et peut-être découvrir la vie dans le Système solaireSystème solaire.

    Toujours à l'horizon des années 2030, on pourrait avoir à ce sujet des surprises avec les missions Juice et Europa Clipper.

    Bref, ce ne sont que quelques exemples parmi d'autres qui montrent que l'Europe devrait disposer de nouveaux outils et sources de données permettant d'avancer sur la question des origines de la vie et de sa place dans l'UniversUnivers.


    Reportage à l'Observatoire de la Côte d'Azur, reconnaissable à sa grande coupole conçue par Gustave Eiffel. C'est dans ce lieu incontournable de l'astronomie que nous avons rencontré Alessandro Morbidelli, spécialiste de la dynamique du Système solaire, médaille d'argent du CNRS et co-coordinateur du programme de recherche « Origins ». Origins est l'un des PEPR (programmes et équipements prioritaires de recherche) financés dans le cadre de « France 2030 ». © Ministère Enseignement supérieur et Recherche

    Un PEPR de 45,5 millions d’euros sur 7 ans

    Mais pour pleinement participer à cette quête, la France a besoin d'un programme pour aider à développer de nouveaux instruments. Instruments qui eux-mêmes stimuleront des percées technologiques innovantes ayant des applicationsapplications et des retombées concrètes dans l'industrie bien terre à terre.

    C'est pourquoi, le 18 septembre 2023, le CNRS a finalement lancé le programme et équipement prioritaire de recherche (PEPR) exploratoire « Origins » doté d'un budget de 45,5 millions d'euros sur sept ans. Il mobilisera huit des dix domaines scientifiques du CNRS, parmi lesquels les sciences humaines et sociales. Sur le site du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, il est indiqué que les buts essentiels de ce PEPR peuvent être résumés en quatre et même cinq points :

    • étudier l'origine des planètes du Système solaire ;
    • caractériser la nature des exoplanètes ;
    • étudier la dynamique interne de la Terre et son lien avec l'habitabilité de notre Planète ;
    • interroger la transition entre la chimiechimie organique et le vivant ;
    • inspirer l'innovation française dans les domaines industriels, de la santé et de l'environnement.

    À la tête de ce projet, on trouve deux chercheurs de renom. Il y a ainsi Maud Langlois, Grand Prix scientifique de la Fondation Charles Defforey (un des Grands Prix des Fondations de l'Institut de France 2020), directrice de recherche du CNRS au Centre de recherche astrophysique de Lyon (CRAL) et qui a eu la responsabilité scientifique de l'instrument Irdis/Sphere du VLTVLT de l'ESOESO.

    Il y a aussi Alessandro Morbidelli, co-coordinateur du programme, et qui s'est fait un nom avec ses travaux sur l'origine des planètes du Système solaire et les migrations planétaires (le fameux modèle de Nicemodèle de Nice en particulier) qui auraient sculpté sa forme actuelle.


    Le Système solaire est un laboratoire pour étudier la formation des planètes géantes et l'origine de la Vie que l'on peut utiliser conjointement avec le reste de l'Univers, observable dans le même but. Mojo (Modeling the Origin of JOvian planets, c'est-à-dire modélisation de l'origine des planètes joviennes) est un projet de recherche qui a donné lieu à une série de vidéos présentant la théorie de l'origine du Système solaire et en particulier des géantes gazeuses par deux spécialistes réputés, Alessandro Morbidelli et Sean Raymond. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © Laurence Honnorat

    Les multiples énigmes de l'exobiologie

    En novembre 2022, Alessandro Morbidelli avait donné une longue interview au CNRS dans laquelle il donnait des explications sur le PEPR exploratoire Origins : « La grande question scientifique est d'identifier l'origine de la vie et des planètes. La découverte de toujours davantage de planètes extrasolairesplanètes extrasolaires pose des questions légitimes qui intéressent beaucoup la société : sommes-nous seuls dans l'Univers ? Existe-t-il d'autres formes de vie et pourrions-nous interagir avec elles ? Si ces questionnements sont fondamentaux, il est pour autant nécessaire de développer de nouveaux instruments en support à ces recherches. Ces développements devraient bénéficier tant technologiquement qu'économiquement à la société. C'est pourquoi nous avons proposé ce PEPR dans le contexte du plan France 2030 ».

    Il expliquait également qu'en ce qui concerne les futurs échantillons ramenés de Mars, leur analyse « aura lieu dans un contexte de forte compétition internationale et nous ciblons la création d'une nouvelle génération d'instruments capables de réaliser des analyses multi-techniques et multi-échelles, incluant de la tomographietomographie 3D à l'échelle atomique ».

    L’ensemble de l’interview est disponible avec ce lien.


    Comment la vie a-t-elle émergé ? La vie est-elle possible, ou l’a-t-elle été ailleurs que sur Terre ? Qu’est-ce qu’une planète habitable ? Et comment rechercher la vie ailleurs que sur Terre ? Si l’existence d'une autre forme de vie dans l'Univers est un sujet qui fait travailler notre imagination depuis des décennies et confine à l’interrogation métaphysique, c’est aussi un sujet de recherche pour de nombreux scientifiques, notamment au sein du CNRS. Dans le cadre du lancement du programme de recherche Origins - France 2030, trois d’entre eux vous livrent les clés de leur domaine d’études, au travers d'interventions courtes et grand public suivies d’un d’échange avec le public. © CNRS