Il y a environ 700 millions d’années, la Terre était totalement recouverte de glace. Deux épisodes dits de « Terre boule de neige » se sont ainsi succédé, mettant à mal une vie encore balbutiante. Et pourtant, c’est bien durant la période interglaciaire que la biologie terrestre aurait effectué un tournant majeur dans son histoire. Voici ce qu'il se serait passé.


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    Il y a 720 à 635 millions d'années, la Terre connaissait une période de glaciations extrêmes, connues sous le nom de « Terre boule de neige ». La planète est en effet alors presque entièrement recouverte d'une épaisse couche de glace. Deux glaciations majeures se sont ainsi succédé, la glaciationglaciation sturtienne (717 à 661 millions d'années) et la glaciation marinoenne (639 à 635 millions d'années). Elles ont été entrecoupées d'une période interglaciaire durant laquelle apparaissent les premiers organismes multicellulaires complexes, les eucaryoteseucaryotes.

    Des sédiments qui permettent de reconstruire l’évolution environnementale au Cryogénien

    Mais les mécanismes à l'origine de cette évolution biologique restent encore mal compris. Pour éclairer les processus à l'œuvre durant cette étrange mais critique période de l'histoire de notre Planète, des chercheurs se sont penchés sur l'analyse de sédiments d'âge cryogénien présents dans le sud de la Chine.

    Ces sédiments très riches en manganèsemanganèse et connus sous le nom de Datangpo Formation ont été déposés durant la période interglaciaire séparant les deux événements de Terre boule de neige. Leur analyse a permis de révéler l'origine des changements climatiqueschangements climatiques et environnementaux subis durant cette période.

    Au Cryogénien, la Terre a été par deux fois presque totalement recouverte de glace. Deux glaciations entrecoupées d'une période interglaciaire durant laquelle la vie terrestre a pourtant connu une évolution majeure. © Stephen Hudson, Wikimedia Commons, CC by-sa 3.0
    Au Cryogénien, la Terre a été par deux fois presque totalement recouverte de glace. Deux glaciations entrecoupées d'une période interglaciaire durant laquelle la vie terrestre a pourtant connu une évolution majeure. © Stephen Hudson, Wikimedia Commons, CC by-sa 3.0

    Une hausse de l’activité volcanique en lien avec la déglaciation

    Les résultats, publiés dans la revue Science Advances, montrent que la fontefonte de la couverture glaciaire de l'épisode sturtien a été accompagnée par une intensification, à l'échelle globale, de l'activité volcanique. En témoigne l'évolution de la composition chimique des océans. De nombreux évents hydrothermaux vont en effet devenir actifs durant cette période, crachant dans la massemasse d'eau de nombreux éléments métalliques, notamment du mercuremercure. De même, le volcanisme aérien va augmenter. Alors que durant la glaciation, les échanges atmosphère-océans étaient extrêmement réduits en raison de la présence de la couche de glace, la déglaciation va permettre la réactivationréactivation de ces interactions. C'est ainsi que le mercure rejeté dans l'atmosphère par les volcansvolcans terrestres va pouvoir rejoindre l'océan.

    La déglaciation a entraîné une chute de pression lithostatique et une phase d'intense activité volcanique, notamment dans les océans. © USGS, domaine public
    La déglaciation a entraîné une chute de pression lithostatique et une phase d'intense activité volcanique, notamment dans les océans. © USGS, domaine public

    Cette corrélation entre déglaciation et hausse de l'activité magmatique s'expliquerait tout simplement par la diminution rapide de la pressionpression sur la croûte terrestrecroûte terrestre, en lien avec la perte de masse des glaciersglaciers qui recouvraient alors la Terre. Or, la production de magmamagma est fortement dépendante de la pression ambiante. À profondeur et température constante, une baisse de pression va en effet faciliter la fusionfusion des roches. Ce processus est d'ailleurs évoqué pour expliquer la hausse d'activité volcanique durant la période bien plus récente du QuaternaireQuaternaire, marquée par de nombreuses glaciations quoique de bien moindre amplitude que celles du Cryogénien.

    Des sulfates qui ont boosté la production d’algues vertes

    Les résultats de l'étude montrent cependant qu'au Cryogénien, cette intense activité volcanique n'aurait duré que 10 000 ans. L'important flux de CO2 associé, participant au réchauffement du climatclimat, se serait stoppé assez rapidement. La température aurait donc très vite recommencé à descendre. Pourtant, les conditions semblent être restées favorables suffisamment longtemps pour permettre à la vie de prendre un nouveau tournant. Les responsables ? Les sulfates.

    Il est en effet attesté que l'océan a connu une phase d'oxygénation après la glaciation sturtienne. Or, l'oxydationoxydation du soufresoufre présent dans l'eau produit des sulfates. La concentration de sulfates, qui, il faut le rappeler, sont des nutriments essentielsnutriments essentiels à la vie, aurait donc augmenté significativement durant la période interglaciaire. Cette hausse de la quantité disponible des nutriments ainsi que la présence de grandes quantités de ferfer dissous auraient ainsi participé à l'établissement de la dominance des alguesalgues vertes et de là, au développement des eucaryotes.