Retrouvé dans une grotte de Galilée, un crâne d’Homo sapiens vieux de 55.000 ans démontre la présence aux portes de l’Europe de l’Homme moderne dès cette époque. Cela prouve aussi sa coexistence avec l’Homme de Néandertal, voire, peut-être, l’hybridation des deux.

au sommaire


    Le crâne de l'Homme de Manot, retrouvé dans une grotte située en Galilée, au nord-ouest d'Israël date de 55.000 ans. © Clara Amit, Israel Antiquities Authority

    Le crâne de l'Homme de Manot, retrouvé dans une grotte située en Galilée, au nord-ouest d'Israël date de 55.000 ans. © Clara Amit, Israel Antiquities Authority

    Initiée il y a environ 70.000 ans, une vaste migration, partie d'Afrique, a peuplé d'Homo sapiens (l'Homme actuel) l'Asie et l'Europe entre -60.000 et -40.000 ans, supplantant par la suite les autres humains, comme l'Homme de NéandertalNéandertal. La génétiquegénétique indique que les Hommes actuels descendent tous de ce groupe. Pourtant, la présence d'H. sapiens est attestée au Moyen Orient bien avant, il y a 100.000 ans. L'histoire humaine et de la colonisation au-delà de l'Afrique est donc encore fort mal connue...

    C'est pourquoi la découverte dans la grotte Manot, en Israël, d'un morceau de crânecrâne daté de 55.000 ans (54,7 ± 5,5 milliers d'années) et qui montre des caractéristiques d'H. sapiens est considérée comme importante. D'après ses découvreurs, menés par Israel Hershkovitz, de l'université de Tel-Aviv, ce crâne comporte une bosse typique des Africains récents et des Européens du Paléolithique supérieur.

    Détail du crâne de Manot. Les auteurs remarquent une bosse à l'arrière (en b) et des parois temporales bien droites, en c. De quoi rapprocher cet humain des Africains et des Européens mais aussi des Néandertaliens. © Israel Hershkovitz <em>et al.</em>, <em>Nature</em>

    Détail du crâne de Manot. Les auteurs remarquent une bosse à l'arrière (en b) et des parois temporales bien droites, en c. De quoi rapprocher cet humain des Africains et des Européens mais aussi des Néandertaliens. © Israel Hershkovitz et al., Nature

    La migration humaine vers le nord aurait fait une pause

    L'Homme moderne était donc bien présent à cette époque dans cette région et, d'après les auteurs de cette étude (parue dans la revue Nature), c'est là que vivaient les ancêtres des premiers H. sapiens à avoir colonisé l'Europe.

    Les humains auraient donc arrêté leur migration depuis l’Afrique au Moyen Orient alors que l'Europe vivait sous le climatclimat de l'ère glaciaire. Ils y seraient restés un long moment, plusieurs milliers d'années, avant de reprendre leur expansion vers le nord aux alentours de - 45.000 ans, expliquent les auteurs.

    Pour les premières fouilles, l'entrée de la grotte imposait aux paléoanthropologues une descente en rappel. © Assaf Peretz, <em>Israel Antiquities Authority</em>

    Pour les premières fouilles, l'entrée de la grotte imposait aux paléoanthropologues une descente en rappel. © Assaf Peretz, Israel Antiquities Authority

    L'hybridation entre l'Homme moderne et l'Homme de Néandertal n'aurait pas commencé en Europe

    Au Moyen Orient, cet H. sapiens y côtoyait immanquablement l'Homme de Néandertal. La bosse occipitaleoccipitale du crâne de Manot est aussi présente, rappellent les auteurs de l'étude, chez les Néandertaliens européens. Ce serait donc là, et non en Europe, que des H. sapiens et des H. neanderthalensis se seraient hybridés. Un morceau de crâne ne suffit pas, cependant, pour réécrire l'histoire des migrations humaines entre Afrique, Asie et Europe.

    Les paléoanthropologues poursuivent leurs fouilles dans cette grotte de Manot, découverte par hasard en 2008 lorsqu'un bulldozer en a défoncé le toittoit. L'accès est difficile mais la conservation des fossilesfossiles y est excellente.