En seulement deux ans de pratique de « jeu de tête » au football, le cerveau de joueurs amateurs serait altéré au niveau structurel et fonctionnel. C’est la conclusion de deux études présentées cette semaine à Chicago lors de la réunion de la RSNA (Radiological Society of North America). Des résultats pires au niveau professionnel ?


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    Les coups de tête pratiqués massivement au football exposent les joueurs à un risque de lésion cérébrale et de démence. Jusqu'à quel point ce risque est-il avéré et de quelle manière affecte-t-il le cerveau ?

    Précédemment, des recherches avaient examiné les effets néfastes sur le cerveau liés à la pratique du football à un moment donné. Deux nouvelles études présentées cette semaine lors de la réunion annuelle de la RSNA (Radiological Society of North America) se sont intéressées aux changements cérébraux survenus sur une période de deux ans, tant au niveau de la microstructure que de la fonction du cerveau.

    Des changements similaires à ceux observés dans les lésions cérébrales traumatiques légères

    Pour la première étude, les chercheurs ont suivi 148 jeunes footballeurs amateurs (27 ans en moyenne, 26 % de femmes). Comme il n'existait pas de méthode pour évaluer le nombre d'impacts à la tête pour le joueur, l'équipe de recherche en a mis une au point. Les questions portaient sur la fréquence à laquelle un individu joue, s'entraîne et joue de la tête, et dans quel type de situation. Les joueurs ont ensuite été répartis en trois catégories suivant leur pratique de jeu de tête : faible, modérée ou élevée (plus de 1 500 « têtes » en deux ans !). Les participants ont également passé une « imagerie du tenseurtenseur de diffusiondiffusion », une technique d'imagerie par résonance magnétiqueimagerie par résonance magnétique (IRM), au début de l'étude et deux ans plus tard. Ce scanner permet de suivre le mouvementmouvement microscopique des moléculesmolécules d'eau dans le cerveau afin d'évaluer les modifications dans sa microstructure.

    « Notre analyse a révélé pour la première fois que des niveaux élevés d'exposition à la tête sur une période de deux ans étaient associés à des changements dans la microstructure du cerveau, similaires à ceux observés dans les lésions cérébrales traumatiques légères », a déclaré l'auteur principal de l'étude, Michael L. Lipton, professeur de radiologie et d'ingénierie biomédicale.

    Imagerie du tenseur de diffusion, une technique d'IRM du cerveau. © RSNA, Michael L. Lipton
    Imagerie du tenseur de diffusion, une technique d'IRM du cerveau. © RSNA, Michael L. Lipton

    L’intégrité de l'interface matière grise-matière blanche menacée

    Pour la seconde étude, les chercheurs ont utilisé le même type d'imagerie pour vérifier le lien entre les chocs répétés à la tête des footballeurs et les performances d'apprentissage verbal. Ils se sont focalisés sur l'interface entre la matièrematière grise et la matière blanche du cerveau, dont l'altération nuit à la transmission de l'information neuronale et donc aux facultés cognitives. Cette fois-ci, les scientifiques ont demandé les fréquences de coups de tête des 12 mois précédents à 353 joueurs de football amateurs de 18 à 53 ans.

    Les chercheurs ont trouvé que l'interface entre la matière grise et la matière blanche - normalement nette - était devenue plus floue, et ce de manière proportionnelle à l'exposition à des chocs répétés à la tête. En parallèle, les participants ont été soumis à des tests de mémorisation et d'apprentissages verbaux. Pour ceux avec une pratique de jeu de tête élevée, les chercheurs ont observé un déclin des performances cognitives. « L'intégritéintégrité de l'interface matière grise-matière blanche peut jouer un rôle causal dans l'association négative entre les chocs répétitifs à la tête et les performances cognitives, a précisé le Dr Lipton. Il est nécessaire de mener des études longitudinales de plus grande envergure dans diverses cohortes pour déterminer le potentiel de changement microstructurel et fonctionnel néfaste à plus long terme, afin de mieux orienter les interventions et les politiques. »