La Russie a posé son véto à l’encontre d’un projet de résolution de l’ONU réaffirmant l'interdiction de l’envoi d’armement nucléaire dans l’espace. La Chine s’est abstenue. Est-ce que cette décision pourrait engendrer une course à l’armement au dessus de nos têtes ? Et quelles seraient les conséquences ?


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    Mi février Futura évoquait les inquiétudes des autorités américaines sur le développement d'armements nucléaires par la Russie conçus pour détruire des satellites dans l'espace (voir article plus bas). Un tel acte réfuté par le Kremlin, viendrait à l'encontre des engagements internationaux pris dans le cadre du Traité sur l'espace extra-atmosphérique signé en 1967. Depuis cette date, ce traité interdit tout objet transportant des armes de destruction massives, dont nucléaires, en orbiteorbite. Cette nouvelle crainte vient justement de faire l'objet d'un projet de résolution réaffirmant les dispositions du traité de 1967 devant le Conseil de sécurité des Nations Unies. Ce projet a été rédigé conjointement par les États-Unis et le Japon et soutenu par 63 autres nations.

    Le seul pays à avoir voté contre le projet et donc apposé son véto est la Russie. La Chine s'est de son côté abstenue. L'Empire du milieu est également dans le collimateur des États-Unis pour son programme spatial jugé trop secret pour n'être que de nature civile. L'ambassadeur de Russie auprès de l'ONU, Vasily Nebenzya, a considéré ce projet de résolution comme une manipulation de la part de leurs porteurs. Dans son propos, il a ajouté que laisser sous-entendre que la Russie ne respecte pas les obligations du traité initial est « complétement absurde ». En réaction, l'ambassadrice américaine s'est étonnée de ce véto en trouvant déroutant, voire louche, qu'un pays qui soutiendrait la résolution ne souhaite pas le réaffirmer. Mais de leur côté, la Russie et la Chine ont proposé un amendement dont la résolution vise également à empêcher le placement d'armes de toutes sortes dans l'espace. Une demande qui a été rejetée, car cette approche n'inclut pas les missilesmissiles anti-satellites lancés depuis le sol.

    En 1962, les États-Unis ont fait exploser une bombe d’1,4 mégatonne dans l’espace. Les conséquences ont été inattendues. Du sol, on pouvait voir l’équivalent d’une aurore boréale. © US Air Force
    En 1962, les États-Unis ont fait exploser une bombe d’1,4 mégatonne dans l’espace. Les conséquences ont été inattendues. Du sol, on pouvait voir l’équivalent d’une aurore boréale. © US Air Force

    L’expérience américaine du nucléaire dans l’espace

    À quoi serviraient des armements nucléaires dans l'espace ? Essentiellement à détruire des satellites en pratique. Une explosion thermonucléaire dans l'espace n'a pas du tout les mêmes caractéristiques que dans l'atmosphèreatmosphère terrestre. Elle aurait pour faculté de griller les satellites de communication et d'observation. Les conséquence terrestres seraient désastreuses étant donnée l'omniprésence des accessoires et engins ayant besoin de données satellites.

    Jusqu'à maintenant, les Américains sont les seuls a avoir testé une bombe nucléaire dans l'espace. L'expérience fut menée en 1962 dans le cadre du projet Starfish Prime. La bombe de 1,4 mégatonne était 500 fois plus puissante que celle utilisée pour anéantir Hiroshima en 1945.

    L'explosion à 400 kilomètres d'altitude a eu des conséquences inattendue avec la perte de deux satellites et de nombreuses défaillances électriques sur Terre en raison de l'impulsion électromagnétique générée. Cette expérience a permis de comprendre qu'un tel emploi n'était pas souhaitable alors qu'à l'époque, contrairement à aujourd'hui, les satellites étaient très peu nombreux et leur utilisation restreinte. Si la Russie ou la Chine développaient de tels armements, ils pourraient de fait détruire leurs propres satellites en plus des constellationsconstellations de satellites considérés comme ennemis. Les conséquences pourraient également mettre en danger les occupants de l'ISSISS. Si la militarisation de l’espace inquiète la communauté internationale, pour le moment, ces tensions, semblent relever plus de la défiance que de véritables intentions de déployer ce type d'armes.


    Arme nucléaire russe dans l’espace : la nouvelle menace qui plane au-dessus de nos têtes ?

    Selon les renseignements américains, la Russie serait en train de mettre au point un satellite doté d'un armement nucléaire. Cette menace est-elle crédible ?

    Article de Sylvain BigetSylvain Biget, publié le 15 février 2024

    Goldeneye, un redoutable satellite de l'époque soviétique est détourné pour exploiter son arme à impulsion électromagnétique pour engendrer une crise financière internationale. C'était de la fiction et l'agent James Bond incarné par Pierce Brosnan était alors parvenu à neutraliser cette menace. La réalité pourrait-elle encore une fois dépasser la fiction, étant donné le niveau de tension internationale entre la Russie et l'Occident depuis l'invasion de l'Ukraine le 24 février 2022 ? C'est en tout cas ce que suggère le Républicain Mike Turner, président de la Commission permanente sur le renseignement de la Chambre des représentants. D'après ses sources issues des services de renseignement américains, la Russie serait en train de développer une arme nucléaire pour détruire des satellites dans l'espace. Il s'agirait d'une grave menace, mais pour laquelle, il n'y aurait pas d'urgence selon les informations de Reuters émanant d'une source. Selon cette dernière, les États-Unis auraient même fait part de cette inquiétude auprès de leurs partenaires européens.

    Une arme nucléaire en orbite, vraiment ?

    Reste que la préparation d'une telle arme « nucléaire » serait surprenante. De l'armement conventionnel tirés depuis le sol pourrait largement suffire pour neutraliser des satellites ennemis. C'est d'ailleurs ce que la Russie avait fait en novembre 2021 pour détruire l'un de ses vieux satellites. Une opération qui avait d'ailleurs mis en danger la Station spatiale internationale (ISS) en raison d'un nuagenuage de débris. Autant dire que les dommages collatéraux pour ses propres satellites et ceux de ses alliés pourraient être contreproductifs pour la Russie.

    Il est plus probable qu'un armement électromagnétique, à l'instar du fameux Goldeneye, soit largement plus efficace. À moins que la Russie compte déployer de l'armement nucléaire à destination de cibles terrestres pour renforcer sa dissuasion. Ce cas de figure reste discutable, puisqu'il viendrait violer un traité sur l'espace datant de 1967 qui interdit tout objet transportant des armes de destruction massives, dont nucléaires, en orbite. Mais comme on l'a appris avec l'invasion de l'Ukraine, la Russie peut passer outre le respect du droit international pour tenter d'atteindre ses objectifs. En attendant d'en savoir plus, de son côté, le Kremlin affirme que les allégations ne sont que des ruses et mensonges de la part des États-Unis.