Les métaux, c’est bien connu, ne peuvent pas cicatriser. Quand une fissure apparaît, elle finit immanquablement par s’étendre et provoquer la rupture du matériau. En êtes-vous vraiment sûr ? Parce que des physiciens rapportent avoir observé le contraire !


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    Nous avons tous déjà vu apparaître au bout de notre doigt, une petite coupure causée par une feuille de papier. Puis sans que nous y prêtions réellement attention, elle a cicatrisé. Pour enfin finir par disparaître sans laisser de trace. Une capacité qui pourrait sembler être réservée au vivant. Mais qui ne l'est pas. Par le passé, des scientifiques ont déjà mis au point des plastiques cicatrisants, par exemple. Et aujourd'hui, une équipe des Sandia National Laboratories (États-Unis) rapporte avoir observé un métal capable de se réparer tout seul.

    De là à envisager que nos ponts ou nos avions pourraient se réparer eux-mêmes, il y a encore un pas supplémentaire à franchir, toutefois. Car ce que les chercheurs ont observé, ce ne sont pas plus que des réparations spontanées de dommages à l'échelle nanométrique. Des dommages dus à la fatigue.

    Rappelons que les scientifiques qualifient de « liés à la fatigue », les dommages qui résultent de l'usure d’un métal. À force de contraintes et de mouvements répétés, de minuscules fissures se forment. Selon certaines des équations de base que les physiciensphysiciens utilisent pour décrire la croissance de ces fissures dans les métauxmétaux, elles finissent immanquablement par s'étendre jusqu'au moment où l'objet se brise. « La rupture est souvent imprévisible, explique Brad Boyce, expert des matériaux, dans un communiqué des Sandia National Laboratories Et elle s'accompagne généralement de pertes de temps et de coûts de remplacement. Sans parler du risque de blessures ou de pertes humaines. »

    Les métaux forment des cicatrices qui ne laissent pas de trace

    Il y a 10 ans, tout de même, Michael Demkowicz, un professeur du Massachusettes Institute of Technology (MIT, États-Unis) avait émis l'hypothèse que dans certaines conditions, les métaux pourraient être capables de réparer tous seuls les fissures créées par la fatigue. Mais lorsqu'ils se sont lancés dans leurs expériences, les chercheurs des SandiaSandia National Laboratories n'espéraient en rien démontrer la véracité de cette théorie. Leur seule ambition, c'était de réussir à comprendre comment les fissures se forment à l'échelle nanométrique et se propagent ensuite dans un morceau de platine. Le tout grâce à une technique de microscopie électronique spécialement développée à cet effet.

    Et quelle ne fut pas leur surprise lorsqu'ils ont découvert qu'après 40 minutes, une extrémité de la fissure qu'ils avaient créée avait commencé à fusionner. Ne laissant derrière elle, même pas la trace d'une cicatricecicatrice ! Les physiciens ont alors laissé faire. Jusqu'à ce que la fissure tout entière se soit régénérée.

    Les modèles informatiques montrent que le processus observé par les chercheurs des Sandia National Laboratories correspond bien à la théorie proposée il y a 10 ans par le professeur du MIT. Mais de nombreuses questions restent en suspens. Notamment la plus cruciale : ces résultats peuvent-ils être généralisés ? Pour le savoir, il faudra mettre en œuvre un programme de recherche approfondi. Parce que les travaux des Sandia National Laboratories ont été réalisés sur des métaux nanocristallins placés sous vide. Rien ne dit à ce stade que le même effet pourra être obtenu sur des métaux conventionnels dans l'air ambiant. Cependant, il ne faut pas bouder son plaisir. L'avancée est tout de même de taille. Ne serait-ce que « si elle mène des physiciens à envisager que, dans les bonnes conditions, les matériaux peuvent faire des choses auxquelles nous ne nous attendions pas », conclut Michael Demkowicz.