Le 21 décembre 2022, la fusée européenne a échoué à mettre en orbite ses satellites passagers. Depuis, Vega-C ne vole plus, et son retour en vol doit suivre une longue feuille de route. Voici enfin plus d’informations sur les étapes critiques restantes, ainsi que sur les travaux d’évolution du lanceur.


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    C'est à l'occasion du Salon de l'Air et de l'Espace que l'Agence spatiale européenneAgence spatiale européenne (ESA) a organisé une conférence de presse pour faire un état des lieux sur VegaVega-C. À la suite du succès de son vol inaugural en juillet 2022, l'échec le 21 décembre a été un coup très dur pour le spatial européen : les satellites perdus étaient des satellites d'imagerie de dernière génération Pleiades Neo développés par Airbus Defence & Space. 

    Ariane 5Ariane 5 prend sa retraite d'ici peu avec son dernier vol dans quelques semaines, Ariane 6Ariane 6 tarde à venir (on parle d'un premier tir au début de l'année 2024), Vega-C reste au sol. La dernière fuséefusée européenne en activité est la fusée Vega normale, qui doit réaliser encore deux vols, dont un en septembre, puis un dernier fin 2024. Ainsi, le temps que Vega-C revienne et qu'Ariane 6 arrive, l'Europe est démunie, ce qui accroît la crise des lanceurs européens en cours actuellement.

    Les étapes du retour en vol

    Après l'échec, une enquête indépendante a été rendue fin février. Les causes du crash incombent à une politique budgétaire questionnable et un sous-traitant ukrainien. Ces problèmes de vérification des composants et des procédures sont malheureusement récurents chez la famille Vega. Avant l'échec du vol VV22, en décembre, la Vega en a connu deux autres en 2019 et en 2020, le dernier causant la perte du satellite français Taranis, notamment dû à une grossière erreur humaine. Celui du vol VV22 remet en cause la motorisation du second étage de la Vega-C.

    13 juillet 2022, premier vol de Vega C dont l'étage principal, le P120C sera utilisé comme étage d'accélération (EAP) pour les deux versions d'Ariane 6 : Ariane 62 avec 2 EAP et Ariane 64 avec 4 EAP. © ESA-CNES-Arianespace/Optique video du CSG - S. Martin 
    13 juillet 2022, premier vol de Vega C dont l'étage principal, le P120C sera utilisé comme étage d'accélération (EAP) pour les deux versions d'Ariane 6 : Ariane 62 avec 2 EAP et Ariane 64 avec 4 EAP. © ESA-CNES-Arianespace/Optique video du CSG - S. Martin 

    La commission d'enquête indépendante a listé 22 recommandations pour requalifier au vol le second étage Z40. Ce dernier remplace le second étage Z23 de la Vega originelle, comme l'étage principal P120C remplace le P80. Avio, le maître d'œuvremaître d'œuvre de Vega-C, doit revoir sa copie en plusieurs étapes :

    • essai à feu complet du Z40 (prévu fin juin), dont les données serviront à la requalification ;
    • revue de qualification : étude des données ;
    • revue critique des processus ;
    • retour en vol avec des divers capteurscapteurs indépendants afin de recueillir des données du nouveau vol test.

    Suivant ce plan, le retour en vol est prévu au plus tard à la fin de l'année. Est-ce possible ? Au vu des étapes critiques restantes, il est encore trop tôt pour le dire.

    De nombreux travaux pour de saines évolutions souveraines

    La propulsion des trois premiers étages de la Vega (P80-Z23-Z9) et de la Vega-C (P120C-Z40-Z9A) est à base d'ergolsergols solidessolides. Le P120C est d'ailleurs également utilisé comme boosterbooster latéral d'Ariane 6. L'étage supérieur Avum (Avum+ pour Vega-C) dispose d'une motorisation développée par l'industriel ukrainien Yuzhmash (le moteur principal RD-843).

    Depuis plus d'un an, cet étage sous maîtrise d'œuvre ukrainienne soulève des inquiétudes avec la guerre. Pendant des mois, on se demandait pendant combien de temps Vega et Vega-C tiendraient avant qu'Avio ne soit en rupture de moteurs ukrainiens. Toutefois, un cadre de Yuzhmash interrogé par Futura a confirmé que le site de production n'est pas en zone de front, et très peu bombardé. Six moteurs RD-843 ont été livrés dernièrement.

    Pour disposer d'une Vega-C sans sous-traitant non européen, Avio travaille à la version Vega-E, avec le moteur M10 pour remplacer le RD-843. Quelque 24 essais à feu, dont un de 200 secondes, ont déjà eu lieu avec un moteur de test, un second essai à feu est prévu dans une semaine, avant de tester le modèle de vol en 2024. Un premier vol test est prévu dès 2025. Pour changer de la propulsion solide, une version de Vega avec des moteurs à ergols liquidesliquides (méthane / oxygèneoxygène liquide) est à l'étude.

    Essai à feu de la chambre de combustion du moteur M10 au Marshall Space Flight Center de la Nasa. © ESA, Nasa 

    Un manifeste bouché

    Vega-C était plus qu'attendue par ses clients. Le manifeste des prochains vol Vega et Vega-C est plein à craquer, avec plus de 40 clients provenant de plus d'une vingtaine de pays :

    • 6 vols pour déployer des satellites Sentinel du programme Copernicusprogramme Copernicus de la Commission européenne ;
    • 6 vols pour l'ESA (dont un vol Vega normal) ;
    • près de 6 autres vols pour le gouvernement italien et les clients commerciaux, dont au moins un vol avec plus de 40 petits satellites à bord.

    « Si on suit une cadence de 6 vols par an, on est complet pendant 3 ans », ont déclaré les officiels lors de la conférence de presse. Mais c'est sous réserve que Vega-C parvienne à tenir une cadence plus importante que précédemment, cadence qui n'a pas dépassé 4 vols par an.

    Le dispenser SSMS de Vega qui peut emporter plusieurs dizaines de satellites de 1 à 400 kilogrammes. © ESA - M. Pedoussaut
    Le dispenser SSMS de Vega qui peut emporter plusieurs dizaines de satellites de 1 à 400 kilogrammes. © ESA - M. Pedoussaut