Le dernier moteur HM7 a été produit et vient de passer son test de réception sur le site ArianeGroup de Vernon. Ce moteur cryogénique ne vous dit peut-être rien, mais depuis plus de 43 ans, il garantit à l'Europe un accès autonome à l'espace pour ses satellites. Il a équipé toutes les Ariane, d'Ariane 1 à Ariane 5. Avec Ariane 6, il laissera sa place au moteur réallumable Vinci. Olivier Condaminet, responsable Propulsion Liquide étages supérieurs Ariane, chez ArianeGroup, nous en rappelle les paticularités.  

 


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    HM7. C'est le nom d'un moteur cryogénique qui peut-être ne vous dit rien. Bien que moins connu que les VikingViking d'Ariane 4 et les Vulcain d'Ariane 5Ariane 5 et d'Ariane 6Ariane 6, HM7 n'en demeure pas moins un moteur historique et essentiel de l'aventure spatiale européenne. Il permet depuis plus de 40 ans à l'Europe d'avoir un accès autonome à l'espace pour ses satellites.

    Ce moteur à propulsion hydrogène et oxygène liquides, dont les technologies utilisées datent des années 60, a équipé tous les étages supérieurs des lanceurs de la famille Ariane. Il a volé sur la première Ariane 1 le 24 décembre 1979 et volera sur la dernière Ariane 5, dont le lancement est prévu en 2023. Il aura alors contribué 260 fois à propulser Ariane, avec ses centaines de passagers mis en orbite autour de la Terre... et parfois bien au-delà. Au point de Lagrange 2 (Herschel, Planck, James-Webb) et encore bien plus loin avec les missions Giotto et Rosetta par exemple.

    D'une massemasse de 165 kilogrammeskilogrammes, HM7 offre une poussée dans le vide de quelque 7 tonnes ainsi qu'une impulsion spécifiqueimpulsion spécifique de 446s.

    Demain, il sera remplacé par le moteur ré-allumable Vinci sur Ariane 6 offrant alors une plus grande polyvalence de missions requise par les nouveaux besoins des clients d'ArianespaceArianespace. Il y a quelques jours, le dernier moteur HM7 d'Ariane 5 a passé son test de réceptionréception sur le site ArianeGroup de Vernon. Le banc d'essai PF41, sur lequel il a été testé pendant plus de 40 ans, va maintenant contribuer à écrire une nouvelle page de l'aventure aérospatiale : la révolution verte de l'hydrogène.

    C'est pour nous l'occasion de vous faire découvrir ce moteur méconnu. La parole à OlivierOlivier Condaminet, responsable Propulsion Liquide étages supérieurs Ariane, chez ArianeGroup.

    Le dernier moteur HM-7 vu ici monté sur le banc PF41. © A. Recule, ArianeGroup
    Le dernier moteur HM-7 vu ici monté sur le banc PF41. © A. Recule, ArianeGroup

    Futura : Quelles sont les innovations ou les avancées technologiques marquantes sur ce moteur lorsqu'il entre en service en 1979 ?

    Olivier Condaminet : Lorsque le moteur HM7 entre en service, il est le premier moteur cryogénique utilisé en Europe. Il représente de réelles avancées technologiques concernant la maîtrise des températures extrêmes très froides comme très chaudes pour les composants.

    De quel moteur le HM7 est-il l’héritier ?

    Olivier Condaminet : HM7 s'appuie sur l'expérience acquise lors du développement du moteur HM4, un moteur prototype de 4 tonnes de poussée équipé d'une turbo pompe alimentant 4 chambres de combustionchambres de combustion en hydrogène et oxygène liquide, et qui n'a jamais volé.

    S’il y en a, quels héritages laissera le moteur HM7 ?

    Olivier Condaminet : Tous les moteurs cryogéniques développés à Vernon font partie de l'héritage HM7 en matièrematière de design, de développement et de mise en œuvre. On compte donc la série des moteurs Vulcain (Vulcain, Vulcain 2 et Vulcain 2.1), le Vinci qui équipera l'étage supérieur d'Ariane 6 et Prometheus, qui fonctionnera avec un mélange oxygène-méthane, est un démonstrateurdémonstrateur de moteur réutilisablemoteur réutilisable à très bas coût, dont l'objectif est d'être dix fois moins cher que le moteur actuel Vulcain 2 d'Ariane 5.

    D'Ariane 1 à Ariane 5 et d'Ariane 3 à Ariane 4, le moteur HM7 aura équipé tous les étages supérieurs des lanceurs de la famille Ariane. Demain, ce moteur historique sera remplacé par le moteur Vinci. © CSG, Arianespace, ESA
    D'Ariane 1 à Ariane 5 et d'Ariane 3 à Ariane 4, le moteur HM7 aura équipé tous les étages supérieurs des lanceurs de la famille Ariane. Demain, ce moteur historique sera remplacé par le moteur Vinci. © CSG, Arianespace, ESA

    HM7 a-t-il une particularité qui le rendait par exemple unique, parfaitement adapté à Ariane 5 ?

    Olivier Condaminet : De l'étage H8 d'Ariane 1 à l'étage Esca d'Ariane 5, le moteur HM7 aura propulsé pendant plus de 40 ans les étages supérieurs d'Ariane. C'est le moteur d'étage supérieur par excellence, particulièrement adapté pour toutes les missions visant l'orbite géostationnaireorbite géostationnaire.

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    Ariane 5 : la grande histoire du lanceur

    D’année en année, la performance d’Ariane 5 n’a jamais cessé de s’améliorer. De près de 6 tonnes pour les premières Ariane 5 (Ar 5G), la performance est montée jusqu’à plus de 10 tonnes pour les Ariane 5 ECA, dont un vol record avec plus de 11 tonnes de charge utile (VA 255, 11.210 kilos). Dans quelle mesure HM7 a-t-il contribué à cette amélioration continue de la performance d’Ariane 5 ?

    Olivier Condaminet : Ce sont essentiellement les boostersboosters et le moteur Vulcain qui apportent la poussée principale et qui concourent à la performance en terme de masse de la charge utile. Les évolutions de ces moteurs ont contribué à l'augmentation de la capacité d'Ariane, notamment le passage de la version Vulcain au Vulcain 2.

    HM7 sera remplacé par le moteur réa-allumable Vinci pour l’étage supérieur d’Ariane 6. Est-il remplacé « seulement » parce que Vinci pourra être rallumé plusieurs fois en vol ou bien parce que sa technologie qui remonte aux années 60 a fait son temps ?

    Olivier Condaminet : Au-delà du rallumage, qui est l'argument majeur, on peut mentionner l'augmentation de la poussée (on passe de 7 tonnes à 18 tonnes) et l'optimisation industrielle de sa production.

    Si HM7 et Vinci sont et seront garants de l’autonomie européenne de l’accès à l’espace, Vinci doit aussi le faire à un coût raisonnable, ce qui n’était pas forcément une priorité lorsqu’il était question d’acquérir cette autonomie au début des années 80. Le coût de fabrication et d’utilisation d’HM7 a-t-il été aussi un facteur poussant vers son retrait ?

    Olivier Condaminet : Le Vinci est effectivement optimisé en ce sens.