Les poissons-scie possèdent un long rostre denté. Contrairement aux apparences, il ne sert pas uniquement à découper les proies. Les ampoules électroréceptrices qu'il comporte permettent à ces poissons chondrichtyens de repérer leurs proies.

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    Comme les requins, les poissons-scie sont des chondrichtyens et possèdent donc un squelette cartilagineux. Les membres de ces deux groupes sont sensibles aux champs électriques. © istolethetv, Flickr, cc by 2.0

    Comme les requins, les poissons-scie sont des chondrichtyens et possèdent donc un squelette cartilagineux. Les membres de ces deux groupes sont sensibles aux champs électriques. © istolethetv, Flickr, cc by 2.0

    Le rostre des poissons-scie n'est pas qu'une scie. Celui des autres poissons qui en possèdent, comme le marlin ou le poisson-spatule, ne remplit cependant qu'une seule fonction : il sert soit à manipuler les proies, soit à les repérer. Celui des poissons-scie peut faire les deux.

    Des observations suggéraient que le rostre de ces pristidés servait à fouiller le sol, à la recherche de nourriture, tandis que d'autres indiquaient qu'il permettait de découper les proies. Mais les nouveaux travaux de chercheurs australiens, présentés dans Current Biology, ont mis les choses au clair.

    Des ampoules électroréceptrices sur le rostre du poisson-scie

    En 2011, ces mêmes chercheurs avaient décrit l'anatomieanatomie de ces animaux, plus particulièrement de l'espèce Pristis microdon. L'étude avait mis en évidence la présence d'ampoules électroréceptrices (également appelées ampoules de Lorenzini, du nom du découvreur de la structure, mais pas de la fonction) sur le corps du poisson. Elles permettent à certains poissons de ressentir des champs électriqueschamps électriques faibles, créés par d'autres poissons.


    Un poisson-scie réagit au stimulus provoqué par un champ électrique qui simule la présence de proies. © Current Biology, Dr. Barbara Wueringer

    Certaines des ampoules électroréceptrices de P. microdon sont localisées le long du rostre, ce qui permet de supposer que l'animal s'en sert bien afin de repérer ses proies. La présence de dents indique quant à elle que la scie est utilisée pour la découpe des proies.

    Le poisson-scie sensible aux champs électriques

    Les chercheurs australiens ont pu vérifier cela grâce à des expériences. Ils ont simulé la présence d'un poisson dans l'eau ou très proche du plancherplancher océanique en générant un faible champ électrique. Dans les deux cas, le poisson-scie a réagi aux stimuli : il s'est retourné en direction de la proie fictive et a donné des coups horizontaux, pour la découper, ou verticaux afin de l'assommer, si elle se situait proche du plancher océanique.

    Enfin, quand les pristidés creusent le fond marin avec leur scie, ils le font davantage dans le but d'en aiguiser les dents que pour trouver de la nourriture, suggèrent les auteurs.

    C'est la première fois que des scientifiques constatent qu'un rostre remplit tant de fonctions. Malheureusement, cet appendice est également à l'origine de bien des mésaventures pour ces poissons. Il n'est en effet pas rare qu'ils se prennent le rostre dans les filets de pêcheurs dont ils ne sont évidemment pas la cible. C'est une des raisons du fort déclin des sept espèces de pristidés, qui sont toutes en danger critique d'extinction.