La sexualité dans le couple ne devrait-elle pas être considérée à l'aune de l'égalité ? Pourtant, à en considérer le récent sondage Ipsos.Digital, se forcer à réaliser une activité sexuelle sans en avoir envie soi-même est plus fréquent qu'on ne le pense, et cela afin de faire plaisir à son ou sa partenaire. Est-ce à dire qu'il y a du compromis sous la couette, comme une sorte de réminiscence du devoir conjugal ? Cela porte un nom : la dette sexuelle.

 

 


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    À en croire les résultats d'un sondage récent d'Ipsos pour le fabricant de préservatifs Durex, quatre Français sur dix déclarent avoir déjà ressenti une « dette sexuelle ». Ce serait même le cas d'une femme sur deux. De quoi s'agit-il ? Elle peut survenir au terme d'une soirée romantique réussie ou d'une longue période d'abstinence au sein du couple... Après un premier rendez-vous comme après des années de relation ! « La dette sexuelle est le fait de se sentir redevable d'une quelconque activité sexuelle », synthétise la sexologue Margaux Terrou sur son site internetinternet.

    En d'autres termes, cela signifie qu'une personne du couple participe à une activité sexuelle sans en avoir ressenti le désir. Ceci sous le poids d'une injonction sociale tacite et-ou dans l'idée d'accomplir ce qui était auparavant appelé le devoir conjugal. D'après l'enquête Ipsos.Digital*, une Française sur deux aurait ainsi « déjà ressenti une dette sexuelle ». Et ce, dans « 43 % des cas, afin de faire plaisir à leur partenaire ». Ce qui fait dire aux auteurs de l'enquête que « la sexualité du couple n'est pas toujours synonyme de plaisir et d'épanouissement ». 

     Une Française sur deux a déjà ressenti une dette sexuelle, ce qui pose la question du consentement. © Prostock-studio, Adobe Stock
     Une Française sur deux a déjà ressenti une dette sexuelle, ce qui pose la question du consentement. © Prostock-studio, Adobe Stock

    Le sexe, pas toujours synonyme de plaisir 

    Le sujet intéresse les universitaires. Il a même fait l'objet d'un article dans un numéro du Journal des anthropologues paru en mai 2019. Son titre : Consentir à des expériences sexuelles sans en avoir envie. Les auteurs évoquent un « système de représentations » à travers lequel « la sexualité féminine est pensée comme une dette de sexe, en réponse aux besoins impérieux des hommes ». Et ce, dans une « logique de redevabilité, révélatrice de l'asymétrie des rapports sociaux de genre ».

    Ce qui amènent les anthropologues à la question du consentement. « Si les jeunes femmes se retrouvent plus souvent que les jeunes hommes à accepter des transactions sexuelles non-souhaitées, ce n'est pas tant parce qu'elles savent moins dire "non", que parce que dans "l'ordre du genre", la sexualité féminine est posée comme une "dette de sexe" ». Laquelle amène donc « les jeunes femmes à se sentir redevables face aux attentes sexuelles des hommes ».

    Se poser les bonnes questions sur cette « logique de redevabilité »

    Comme l'explique Léa Séguin, doctorante en sexologie à l'Université du Québec à Montréal (UQAM), citée par Margaux Terrou, « il y a derrière ça l'idée que (...) que la sexualité est une chose, une ressource qu'on donne, qu'on perd, qu'on se fait prendre, plutôt qu'une activité faite pour le plaisir de toutes les parties prenantes. Comme si c'était un échange économique ». Ce qui a ses yeuxyeux est évidemment très « problématique ».

    Sur son site internet, Margaux Terrou donne plusieurs conseils pour identifier et sortir de cette logique. Si vous êtes concerné(e), commencez par vous poser la question : « De quoi j'ai envie ? ». Ce qui sous-entend de suivre votre désir. Demandez-vous aussi ceci : « Si mon conjoint ou ma conjointe n'avait pas fait ceci, est-ce que j'agirais différemment ? ». Et de conclure : « Il s'agit d'être en véritable connexion avec son corps pour identifier ce qui vous plait réellement ».

    Étude Ipsos.DigitalDigital pour Durex, réalisée du 16 au 18 Janvier 2024 auprès d'un échantillon de 3 000 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans à 75 ans constitué selon la méthode des quotas, au regard des critères de sexe, d'âge, de catégorie socioprofessionnelle et de région de résidence.

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