C’était l’un des grands maîtres de la structure du noyau atomique et probablement aussi l’une des dernières mémoires vivantes de l’épopée de la physique atomique de la première moitié du vingtième siècle. Le prix Nobel de physique danois Aage Niels Bohr vient de décéder à 87 ans le 8 septembre 2009.

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    Aage Niels Bohr (1922–2009). Crédit : Niels Bohr Institute

    Aage Niels Bohr (1922–2009). Crédit : Niels Bohr Institute

    Curieux destin que celui de Aage Niels BohrNiels Bohr. Né à Copenhague le 19 juin 1922, il pouvait se targuer d'avoir eu, enfant, plusieurs « oncles » prix Nobel de physique qui passaient souvent dans la maison de son père. Comme beaucoup d'enfants, il appelait ainsi les amis de la famille et il a ainsi vu passer oncle Heisenberg et oncle Pauli, pour ne citer que ceux-là.

    Il faut dire que Aage Bohr n'était pas le fils de n'importe qui mais de Niels Bohr, le mentor de toute une génération de créateurs de la physique quantique et lui-même prix Nobel de physique.

    Aage Bohr et son père Niels Bohr, tous deux prix Nobel de physique. Crédit : <em>AIP Emilio Segre Visual Archives</em>

    Aage Bohr et son père Niels Bohr, tous deux prix Nobel de physique. Crédit : AIP Emilio Segre Visual Archives

    Sa grand-mère paternelle étant issue d'une riche famille juive danoise, Aage et son père finirent pas quitter le Danemark en 1943 avec toute la famille, en partie pour éviter d'être inquiétés par les persécutions des Nazis. Aage Bohr interrompit donc momentanément les études qu'il avait entreprises à l'université de Copenhague en 1941 et il suivit son père à Los Alamos en 1944.

    Il faut dire que Niels Bohr avait proposé l'un des premiers modèles du noyau, celui de la goutte liquide et il fut le premier à donner avec John Wheeler une théorie de la fission nucléairefission nucléaire. Richard Feynman raconte dans Vous voulez rire, Monsieur Feynman ! comment, alors tout jeune docteur en physique à Los Alamos, il avait été médusé de voir Aage Bohr l'aborder à la demande de son père qui voulait lui parler personnellement.

    Aage Bohr et son père au tableau noir en train de résoudre l'équation de Schrödinger appliquée à un problème de supraconductivité. Crédit : <em>AIP Emilio Segre Visual Archives</em>
     
    Aage Bohr et son père au tableau noir en train de résoudre l'équation de Schrödinger appliquée à un problème de supraconductivité. Crédit : AIP Emilio Segre Visual Archives

    Il faut dire que lorsqu'il parlait de physique, Feynman oubliait comme par enchantement à qui il avait affaire et n'hésitait pas à contredire son interlocuteur sans prendre de gants. Niels Bohr était en effet agacé de la déférence à son égard ce qui l'empêchait de savoir si ce que lui et son fils proposaient pour améliorer l'efficacité de la bombe atomique étaient des absurdités ou non.

    Aage Bohr en pleine discussion avec Ben Mottelson. Crédit : <em>AIP Emilio Segre Visual Archives</em>

    Aage Bohr en pleine discussion avec Ben Mottelson. Crédit : AIP Emilio Segre Visual Archives

    Il est clair que dans un tel contexte, Aage Bohr ne pouvait que devenir un physicienphysicien nucléaire de tout premier plan... En 1946, il décrocha son master en physique avant de se tourner vers des travaux sur la structure des noyaux qui lui vaudront le Prix Nobel de physique en 1975 avec son collègue et ami Ben Roy Mottelson.

    Entre-temps, après son doctorat, il effectua un séjour à l'Institute for Advance Study de Princeton en 1948 et il travailla avec Isidor Isaac Rabi à l'université de ColumbiaColumbia de 1949 à 1950. Revenu à l'université de Copenhague en 1956, il succéda à son père à la tête de l'Institut de Physique Théorique portant son nom.