Alors que certains espèrent fertiliser les océans avec du fer pour piéger le CO2, une équipe franco-australienne vient de découvrir une nouvelle source de fer dissous dans les océans. Négligées et pourtant non négligeables, les sources hydrothermales se révèlent des contributeurs importants de l'absorption du carbone. Cette découverte devrait permettre d’affiner les modèles climatiques à plus d’un titre.

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    Les sources hydrothermales, telles ce fumeur noir, seraient une source de fer dissous non négligeable mais négligée jusqu’à présent. © OAR-NURP-NOAA

    Les sources hydrothermales, telles ce fumeur noir, seraient une source de fer dissous non négligeable mais négligée jusqu’à présent. © OAR-NURP-NOAA

    Le fer est un nutriment essentiel à la croissance du phytoplancton. Loin des continents et en particulier dans l'océan austral, ce ferfer devient un élément limitant de cette croissance. Par conséquent, il limite aussi la pompe biologique qui absorbe le carbonecarbone atmosphérique par photosynthèse et l'entraîne dans les profondeurs océaniques. Cette carencecarence en fer a donc suscité des idées un peu folles de géoingénierie.

    Jusqu'à présent, les chercheurs pensaient que le fer dissous provenait principalement de la dissolution des sédiments, des poussières atmosphériques et de la fonte des icebergs, par ordre d'importance décroissante. Les sources hydrothermales n'étaient pas prises en compte car les scientifiques estimaient que l'essentiel du fer relâché par ces évents s'oxydait et précipitait immédiatement sous forme de sédiments inutilisables par la vie marine.

    Une équipe franco-australienne vient pourtant de démontrer dans la revue Nature Geosciences que ces sources constituent une source non négligeable de fer dissous. Leur quantificationquantification de ce flux de fer montre en outre que cette source s'élèverait à 20,8 mégatonnes par an, soit plus que les apports par la fontefonte des icebergs. Localement, et en particulier dans l'océan austral, ce flux serait plus important que celui des poussières atmosphériques.

    Cliquer pour agrandir. Les différentes sources de fer océanique et leur variabilité dans le temps. © CNRS

    Cliquer pour agrandir. Les différentes sources de fer océanique et leur variabilité dans le temps. © CNRS

    Le don d’Héphaïstos aux océans

    Deux indices ont mis la puce à l'oreille des chercheurs. Tout d'abord, il avait été observé que le fer issu des sources hydrothermales pouvait s'associer à des protéinesprotéines et ainsi adopter une forme dissoute stable. D'autre part, une corrélation avait été découverte entre le taux d'héliumhélium 3 (3He), un isotopeisotope de l'hélium qui ne peut qu'avoir une origine hydrothermale, et le fer dissous en profondeur, loin de l'activité thermale.

    C'est en se basant sur cette corrélation, une relation linéaire entre 3He et fer dissous, que les scientifiques ont pu quantifier le flux de fer dissous originaire des sources hydrothermales et se rendre compte de son importance. Ils ont ensuite vérifié leurs résultats en comparant les simulations des modèles de croissance du phytoplancton avec des mesures in situ. Seules les simulations incluant le fer d'origine hydrothermale correspondaient à ces mesures.

    L'inventaire des sources de fer océanique est importante pour la modélisationmodélisation du climat, vu le rôle qu'il joue dans le puits de carbone océanique. Outre la révélation d'une production phytoplanctonique accrue jusqu'à 30% dans l'océan austral par rapport aux estimations, cette source de fer présente un autre intérêt pour les modèles climatiquesmodèles climatiques.

    En effet, cette source est relativement constante sur une longue échelle de temps. Elle permettra donc de lisser les fluctuations des modèles actuels dues à des événements ponctuels comme les apports soudains des poussières atmosphériques emportées par les tempêtestempêtes.