Utiliser la langouste pour mieux comprendre comment notre cerveau réagit en fonction de l’environnement ? C’est ce qu’on fait des chercheurs de l’Université du Maryland.

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    Le cerveau humain est très complexe : les chercheurs utilisent d'abord des modèles d'étude, comme par exemple la langouste. © WriterHound / Licence Creative Commons

    Le cerveau humain est très complexe : les chercheurs utilisent d'abord des modèles d'étude, comme par exemple la langouste. © WriterHound / Licence Creative Commons

    La prise de décision est un phénomène que l'on croit personnel, un choix qui serait différent pour quelqu'un d'autre. Pourtant, le système nerveux des animaux (et de l'homme) s'est adapté afin de faire les meilleurs choix possibles et de préserver la survie de l'espèceespèce, notamment dans des situations périlleuses. Certains choix, comme partir en courant devant un danger ou plutôt faire le mort, sont donc en réalité dictés par des impulsions électriques nerveuses.

    Les études sur le cerveau humain sont pour le moins difficiles à réaliser... L'utilisation d'invertébrésinvertébrés comme modèle d'étude du système nerveux ne date pas d'hier et les différentes recherches ont montré par le passé que ce modèle simplifié peut souvent être transposé à l'homme. C'est sur ce constat qu'une équipe de recherche menée par le psychologue Jens Herberholz s'est penchée sur la langouste pour décortiquer le mécanisme neuronal de la prise de décision.

    Les chercheurs ont mis au point un système d'étude où la langouste en est la star. De la nourriture est mise à portée de l'animal mais une ombre mimant l'arrivée d'un prédateur est également présente. Le rôle de la langouste est de décider du comportement à adopter face à différentes situations : une nourriture plus ou moins attrayante et une ombre menaçante plus ou moins rapide. Les réponses de l'animal peuvent être soit la fuite, synonyme de perte d'énergieénergie et d'éloignement de la source de nourriture, soit se figer, action moins coûteuse en énergie et présentant l'avantage de rester proche du repas potentiel.

    La langouste – une juvénile – utilisée dans l'expérience choisit de fuir ou de faire le mort en fonction des stimuli. © David D. Yager/Jens Herberholz, Université du Maryland

    La langouste – une juvénile – utilisée dans l'expérience choisit de fuir ou de faire le mort en fonction des stimuli. © David D. Yager/Jens Herberholz, Université du Maryland

    Fuir ou faire le mort ?

    Les résultats publiés dans le journal Proceedings of the Royal Society B sont les suivants : plus l'ombre du prédateur est lente, plus la langouste a tendance à fuir, certainement en raison de la persistance de la menace. En revanche, si l'odeur de la nourriture est plus alléchante, le crustacécrustacé a tendance à se figer pour ne pas s'en éloigner. De plus, le temps de latencelatence entre le moment où l'ombre est visible et le moment où la langouste réagit diminue lorsque la vitessevitesse de l'ombre augmente, mais toujours dans une échelle de 50 à 100 millisecondes.

    Lors de ces expériences, les chercheurs ont également pu mesurer les impulsions électriques provoquées par les neurones de la langouste grâce à des électrodesélectrodes disposées stratégiquement dans l'eau du bassin. L'activation des interneurones géants est accompagnée d'un signal électrique spécifique et reconnaissable : les résultats montrent que l'activation de ces interneurones conduit toujours à la fuite de la langouste.

    Cette étude indique que, tout comme l'homme, la langouste est capable d'intégrer différents stimuli en fonction de leur intensité et de réagir de manière adaptée. L'activation des interneurones géants semble être la clé du mécanisme de la prise de décision de la langouste, un mécanisme à l'interface entre le système d’intégration sensoriel et la réalisation de l'action. Les chercheurs veulent maintenant s'intéresser aux mécanismes cellulaires et neurochimiques impliqués dans la prise de décision chez la langouste pour peut-être un jour comprendre parfaitement ce qui se passe dans notre boîte crânienne !