Des astrophysiciens australiens ont utilisé la lumière des quasars pour faire le jour sur l'état de l'Univers il y a 13 milliards d'années en mesurant la quantité de carbone dans les gaz entourant les galaxies de cette époque. Ils ont constaté qu'elle augmentait rapidement.


 


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    Emma Ryan-Weber est une astrophysicienne de l'université de technologie de Swinburne à Melbourne, en Australie. Dans un communiqué de l'ARC Centre of Excellence for All Sky Astrophysics in 3 Dimensions (ASTRO 3D et ARC étant l'acronyme de Australian Research Council)), elle commente une publication d'une équipe menée par sa compatriote Rebecca Davies et publiée dans Monthly Notices of the Royal Astronomical Society en ces termes : « Il répond à cet objectif clé : comment les éléments constitutifs de la vie - dans ce cas le carbone - ont-ils proliféré dans l'Univers ? En tant qu'êtres humains, nous nous efforçons de comprendre d'où nous venons. Ces photons ont voyagé à travers l'Univers, dans le VLT, puis ont été utilisés pour développer une image de l'évolution de l'univers. ». 

    La chercheuse fait allusion à la lumière de quasars lointains qui a été utilisée pour mesurer sur une période d'environ 300 millions d'années du cosmoscosmos observable et il y a environ 13 milliards d'années le contenu en noyau de carbone des galaxiesgalaxies de cette époque. Il a fallu pour cela disposer d'un temps d'observation exceptionnel de 250 heures sur le Very Large TelescopeVery Large Telescope (VLT) de l'Observatoire européen austral au Chili, l'ESOESO donc.

    On sait que les quasars sont de formidables phares cosmiques qui tirent l'énergieénergie de leur prodigieux rayonnement de la matièrematière tombant sur un trou noir supermassiftrou noir supermassif en rotation, d'au moins un million de massesmasses solaires.

    En traversant des nuagesnuages de matière, cette lumière est partiellement absorbée par les atomesatomes, ou les moléculesmolécules présentes, de manière qu'en faisant l'analyse spectrale de cette lumière on remarque des sortes de codes-barrescodes-barres sombres sur un fond lumineux continu. On peut bel et bien faire l'analogieanalogie avec un code-barres car depuis le XIXe siècle on sait en tirer des informations sur la composition et l'abondance en éléments d'un nuage de matière ou dans l'atmosphèreatmosphère d'une étoileétoile, voire d'une exoplanèteexoplanète.

    Avec ces quasars, les astrophysiciensastrophysiciens peuvent donc tester et enrichir leurs théories sur l'évolution cosmochimique de l'Univers observable jeune.


    Depuis 13,7 milliards d’années, l’Univers n’a cessé d’évoluer. Contrairement à ce que nous disent nos yeux lorsque l’on contemple le ciel, ce qui le compose est loin d’être statique. Les physiciens disposent d'observations à différents âges de l’Univers et réalisent des simulations dans lesquelles ils rejouent sa formation et son évolution. Il semblerait que la matière noire ait joué un grand rôle depuis le début de l’Univers jusqu’à la formation des grandes structures observées aujourd’hui. © CEA Recherche

    Une nucléosynthèse stellaire productrice de carbone

    Les théories en question commencent avec le Big BangBig Bang et ce que l'on appelle la nucléosynthèsenucléosynthèse primordiale qui ne produit que des isotopesisotopes de l'hydrogènehydrogène, de l'héliumhélium et du lithiumlithium il y a environ 13,7 milliards d'années. Au bout de quelques centaines de millions d’années tout au plus, des étoiles très massives – bien plus que celles que l’on peut observer aujourd’hui car l’Univers était chimiquement et physiquement différent - produisent très rapidement avant d'exploser des noyaux plus lourds, c'est la nucléosynthèse stellaire. Ces noyaux sont éjectés au loin après explosion de cette génération d'étoile et vont ensuite se retrouver dans la formation des étoiles plus conventionnelle et finalement pour certains d'entre eux dans notre propre corps.

    La période qui s'étend entre quelques centaines de millions d'années après le Big Bang et il y a environ 13 milliards d'années est appelée la réionisation. Pourquoi ? Parce qu'après l'émissionémission du rayonnement fossilerayonnement fossile environ 380 000 ans après le Big Bang, les atomes sont neutres et c'est le rayonnement des premières étoiles et sans doute aussi des premiers quasars qui vont contribuer à ioniser les atomes d'hydrogène et d'hélium du Big Bang.

    On attend du James-Webb qu'il nous fasse des révélations sur les premières étoiles et le début de la réionisationréionisation. Mais, comme on le voit, les télescopestélescopes au sol comme le VLT n'ont pas dit leurs derniers mots et ils peuvent encore nous en apprendre beaucoup, au moins sur la fin de la réionisation.

    Une vue d'artiste de la découverte faite par Rebecca Davies et ses collègues. Le carbone chaud (<em>warm,</em> en anglais) augmente avec le temps. © Rebeca Davies, ASTRO 3D
    Une vue d'artiste de la découverte faite par Rebecca Davies et ses collègues. Le carbone chaud (warm, en anglais) augmente avec le temps. © Rebeca Davies, ASTRO 3D

    La découverte faite par Rebecca Davies et ses collègues est bien résumée par une déclaration de la chercheuse dans le communiqué de son université. « Nous avons découvert que la fraction de carbone dans le gazgaz chaud augmentait rapidement il y a environ 13 milliards d'années, ce qui pourrait être lié au réchauffement à grande échelle du gaz associé au phénomène connu sous le nom d'époque de réionisation. »

    On apprend également et plus précisément que la quantité de carbone chaud a soudainement augmenté d'un facteur cinq sur une période de seulement 300 millions d'années. Alors que des études précédentes le suggéraient, non seulement cette augmentation est désormais établie mais son taux est aussi mesuré.

    L'interprétation la plus simple est une augmentation rapide de la quantité de carbone synthétisée par une activité de nucléosynthèse stellaire fiévreuse pendant la réionisation. Réionisation conduisant en plus au chauffage du gaz enrichi rapidement en carbone par des explosions de supernovaesupernovae titanesques.