Dans le cadre de son partenariat avec le groupe d'écoles Ionis, Futura a interviewé Alex Caldas, enseignant-chercheur à l’ESME Sudria, concernant le projet qu'il dirige : l'élaboration d'une prothèse de la main commandée par un casque à électroencéphalogramme (EEG).


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    Alex Caldas, enseignant-chercheur responsable de la nouvelle majeure Biomécanique et robotiquerobotique médicale à l'école ESME Sudria, a bien voulu répondre aux questions de Futura à propos du projet qu'il dirige concernant l'élaboration d'une prothèseprothèse de main intelligente, commandée par électroencéphalogrammeélectroencéphalogramme

    Alex Caldas, dites-nous dans quel contexte a émergé l'idée du projet de développement de cette prothèse de main ? 

    Alex Caldas : En fait, de 2013 à 2016, j'étais doctorant au CEA LIST (Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives) et ma thèse portait sur les préhenseurs pluridigitaux robotiques (mains robotiques). Depuis 2016, je suis enseignant-chercheur à l'école d'ingénieur ESME Sudria où je poursuis mes activités de recherche sur le thème des mains robotiques et plus récemment, j'ai pris la responsabilité de la majeure « Biomécanique et robotique médicale ». Le thème des mains robotiques allié au domaine du médical m'a logiquement amené à m'intéresser aux prothèses de main robotique.

    Après avoir fait une recherche des produits disponibles sur le marché, de l'état de l'art (l'état des connaissances) dans le domaine de la recherche et des points empêchant la démocratisation des prothèses de main robotique, j'ai eu l'idée suivante : développer une prothèse de main commandée par un casque EEG suite à un entraînement par réalité virtuelleréalité virtuelle.

    Ce qu'il faut bien comprendre, c'est qu'il existe différentes problématiques actuellement concernant les prothèses de main dont deux principales :

    • La commande de la prothèse, c'est-à-dire comment détecter l'intention du patient. Plusieurs technologies existent et nous nous sommes orientés vers les capteurscapteurs EEG qui mesurent l'activité cérébrale. Cette technologie est assez exigeante à mettre en œuvre et c'est un vrai défi de vouloir commander une main robotique à partir des signaux fournis par des capteurs EEG, mais on pense que ce serait la manière la plus naturelle et agréable pour un patient puisqu'il commanderait directement la prothèse par la pensée
    • L'adhésion/acceptation de la prothèse. Avant d'utiliser une prothèse au quotidien, un patient va devoir apprendre à l'utiliser et il va donc suivre un entraînement, souvent long et rébarbatif. Nous souhaitons tester le cas où le patient s'entraînerait avec un casque de réalité virtuelle. Le patient mettrait le casque, il verrait alors un environnement virtuel où il aurait deux mains virtuelles, on pourrait capter son activité cérébrale par les capteurs EEG et classifier ses intentions. Ainsi, potentiellement, l'entraînement serait plus court et l'algorithme de contrôle de la main serait optimisé pour le patient au lieu d'être générique pour tous les patients.

    C'est vraiment là que se situent les objectifs principaux de notre projet : résoudre ces deux problématiques et espérer faire évoluer le domaine afin de proposer des prothèses plus intelligentes.

    Qui sont les personnes qui vous aident et participent à l'élaboration de ce projet ? 

    Alex Caldas : Au sein de l'ESME Sudria, une partie de mes collègues enseignants-chercheurs travaillant aussi sur la thématique de la santé ont adhéré au projet. Salim Hima, chercheur en robotique, s'intéresse à la partie portant sur le contrôle de la main ; Yasmina Chenoune, chercheuse en traitement du signal, pourrait intervenir sur le traitement des signaux EEG ; et enfin Madjid Maidi, chercheur en informatique, pourrait travailler sur la réalité virtuelle.

    À quel stade du projet en êtes-vous ? 

    Alex Caldas : Ce projet n'en est qu'à ses prémisses. Nous avons exploré l'état de l'art sur les différents sujets du projet et évalué l'intérêt scientifique de notre proposition. Nous avons commencé des premières études sur la constructionconstruction de la prothèse et sur les capteurs EEG. En parallèle, nous avons lancé une demande de financement auprès de l'Agence nationale de la recherche (ANR).

    Le patient mettrait le casque, il verrait alors un environnement virtuel où il aurait deux mains virtuelles, on pourrait capter son activité cérébrale par les capteurs EEG et classifier ses intentions. © sofiko14, Adobe Stock
    Le patient mettrait le casque, il verrait alors un environnement virtuel où il aurait deux mains virtuelles, on pourrait capter son activité cérébrale par les capteurs EEG et classifier ses intentions. © sofiko14, Adobe Stock

    Comment inscrirez-vous votre démarche dans le marché peu régulé qu'est celui des dispositifs médicaux non médicamenteux ? 

    Alex Caldas : Comme le projet n'en est qu'à ses débuts, nous n'en sommes qu'au développement technologique du produit. Si ce développement aboutit à des résultats intéressants, il est vrai qu'il sera nécessaire de mettre en place des essais cliniquesessais cliniques afin d'évaluer la viabilité du produit, son intérêt pour les patients et les possibles effets secondaires. Le moment venu, nous verrons pour nous associer avec un institut de santé pour effectuer ces essais cliniques suivant la réglementation française.

    Que pouvons-nous en attendre concernant les applications pratiques ?

    Alex Caldas : L'objectif est de proposer une prothèse de la main robotique pour les patients amputés. Cette prothèse devra être facile à utiliser et être adaptée au patient. L'objectif est vraiment de donner aux patients le plus de dextérité possible avec cette main robotique. Peut-être que le projet présentera aussi des résultats intéressants sur l'apprentissage par réalité virtuelle avec capteurs EEG. Ces résultats pourraient potentiellement être utilisés pour d'autres applications (autres prothèses, orthèses commandées...).

    Comment être tenu au courant de l'avancement du projet ? 

    Alex Caldas : Comme c'est un projet interne de l'ESME Sudria, le site de l’école donnera des nouvelles de l'évolution du projet.