Le tournoi mondial de voiliers robotisés en est déjà à sa troisième édition, qui s'ouvrira fin mai en Autriche. Mais ses compétiteurs voient plus loin : au mois d'octobre, leurs champions s'élanceront pour le Microtransat Challenge à l'assaut de l'Atlantique. Cette joute entre ingénieurs intéresse aussi les océanographes...

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    Le Microtransat de l'IUT de Nantes à Aberystwyth, en 2007.  © Yves Brière et François Bastianelli

    Le Microtransat de l'IUT de Nantes à Aberystwyth, en 2007. © Yves Brière et François Bastianelli

    Ils pilotent déjà des voitures, des avions, des fuséesfusées, alors pourquoi pas des voiliers ? Les robots peuvent parfaitement commander les voiles d'un navire pour suivre une route en tenant compte du ventvent, de la position donnée par le GPS et de la dérive constatée. La preuve en est brillamment donnée depuis plusieurs années par une série de compétitions. En France, débutait en 2003 le Défi SGM, organisé par les IUT SGM (Science et Génie des Matériaux) pour des bateaux de 2,40 mètres. Prise au jeu, la communauté des roboticiens est montée d'un cran avec une compétition plus ambitieuse, le Challenge Microtransat, qui a pour but ultime la traversée de l'Atlantique.

    Les navires devront mesurer moins de quatre mètres et n'utiliser comme sources d'énergieénergie que le soleilsoleil et le vent. La troisième condition est un faible coût, l'idée n'étant pas d'organiser une compétition technologique avec des moyens lourds mais de privilégier les équipes issues d'universités.

    La première édition, en 2006, s'était tenue près de Toulouse en juin 2006. L'année suivante, les compétiteurs se sont confrontés à Aberystwyth, au Royaume-Uni. Et ce petit monde se retrouvera pour le World Robotic Sailing Championship 2008, du 20 au 25 mai en Autriche, à Breitenbrunn, dans les environs de Vienne et lanceront leurs embarcations sur le lac Neusiedl.

    La compétition s'accélère car c'est au mois d'octobre 2008 que ces voiliers sans équipage quitteront les côtes du Portugal (le lieu de départ n'est pas encore déterminé) pour partir vers l'ouest, avec l'Atlantique à traverser. Le point d'arrivée sera situé entre 10 et 25 degrés de latitudelatitude nord, soit aux Antilles ou aux Bahamas.

    Trois mois en solitaire

    Une équipe de l'IUT de Nantes s'est lancée dans cette aventure, avec l'assistance de l'Ensica (Ecole nationale supérieure d'ingénieurs de constructionsconstructions aéronautiques, aujourd'hui regroupée avec Supaéro au sein de l'ISAE, Institut Supérieur de l'Aéronautique et de l'Espace). Leur second prototype, Iboat, est en cours de construction, reprenant les principes du premier, baptisé Microtransat. La description de Iboat est détaillée sur le site de l'Ensica. Ses 160 cellules solaires alimentent l'électronique de bord et chargent une batterie au plombplomb. L'ensemble assure une puissance moyenne de 35 wattswatts sur 24 heures (donc compte tenu de la période nocturnenocturne). L'équipe précise que cette valeur a été déterminée à Toulouse, donc à 44 degrés de latitude.

    Image du site Futura Sciences

    Le BeagleB, navire de l'université de Aberystwyth, un beau bâtiment de 3,65 mètres pour 280 kilogrammes, poussé par un mât-aile. Il cèdera sa place à la Pinta, qui porte (immodestement ?) le nom de l'une des trois caravelles de Christophe Colomb. Cliquez sur l'image pour obtenir les caractéristiques techniques. © Department of Computer Science, Aberystwyth University

    Plusieurs capteurscapteurs équipent le bateau. Son attitude, c'est-à-dire son inclinaison en roulis (sa gîte) et en tangage sont ainsi continuellement surveillés ainsi que la direction vers laquelle pointe la proue (son cap). Un anémomètreanémomètre mesure la force et la direction du vent. Le logiciel est triple, assurant trois fonctions dévolues à des marins différents sur un navire en course à équipage. Le navigateur choisit la route, en fonction de la position et de la dérive (due au courant) pour atteindre le prochain point de changement de cap. Il n'y a pas de stratège météométéo à bord mais un logiciel de ce type est en développement...

    Ce navigateur donne un cap au logiciel suivant, le barreur, qui actionne le safransafran (le gouvernail) en tenant compte du sens du vent. Prudent, il évite de s'approcher à moins de 45° du vent. Au besoin, il décidera de virer de bord. Enfin, le troisième logiciel, le régleur, surveille la voile et en modifie l'orientation par rapport au vent pour maximiser la vitessevitesse. L'engin assure un respectable 3 nœudsnœuds (5,5 km/h) avec 15 nœuds de vent.

    Toutes les équipes ont leurs petits et leurs grands secrets mais les vitesses sont du même ordre. Avec une navigation qui ne sera pas intelligemment inspirée par les situations météorologiques à grandes échelles, le voyage prendra de nombreuses semaines, peut-être deux ou trois mois. On sera encore loin des records humains. En 2007, Franck Cammas et son équipage sont allés « en face » comme disent les marins en 4 jours 3 heures 57 minutes et 54 secondes, soit une vitesse moyenne de 28,65 nœuds, c'est-à-dire 53 km/h ! Les barreurs humains resteront encore quelque temps seuls capables de maintenir un multicoque instable des heures durant à une telle allure...

    Mais l'idée n'est pas (encore ?) de rivaliser en vitesse avec les skippers humains dans les courses transocéaniques. Outre qu'ils constituent d'excellents travaux pratiques de robotique, ces navires autonomes pourront un jour servir aux océanographes pour effectuer des mesures en continu de la salinitésalinité, de la température et de d'autres paramètres, comme le taux d'oxygène, l'activité planctonique ou la vitesse des vents. Les robots peuvent aussi se mettre au service de la science...