En combinant un télescope à Lidar bricolé et un algorithme de reconstruction d’image, des chercheurs chinois ont mis au point un appareil capable de saisir des objets à très longue distance en s’affranchissant des perturbations de l’atmosphère et de la pollution.


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    Le télescopetélescope à Lidar (Light Detection And RangingLight Detection And Rangingmonophotonique utilise les ondes infrarouges pour mesurer la distance à un objet en fonction du temps mis par les photonsphotons reflétés pour revenir. Il constitue l'outil idéal pour saisir des vues d'objets très lointains. Ces dernières années, des progrès considérables ont été accomplis sur la sensibilité des capteurscapteurs, avec des appareils en mesure de capter les photons à plus de 10 kilomètres de distance. Au-delà, malheureusement, ces appareils, par ailleurs très coûteux, ne recueillent plus assez de lumièrelumière pour prendre des clichés suffisamment nets, et sont parasités par des « échos » de photons se réfléchissant sur l'atmosphèreatmosphère, notamment dans des environnements très pollués comme les villes.

    L'équipe de Zheng-Ping Li, de l'université des Sciences et Technologies de Shanghai (Chine) vient de dévoiler un appareil qui tient dans une boîte à chaussures et capable prendre des photos 3D à 45 km de distance, y compris avec une visibilité très limitée. Leur méthode, publiée sur le site de prépublication arXiv, repose sur la combinaison d'un Lidar amélioré et d'un algorithme spécial qui va reconstruire chaque pixel de l'image.

    Une longueur d’onde qui filtre les photons solaires

    Les chercheurs se sont donc d'abord attelés à améliorer le Lidar. Ils sont pourtant partis d'un matériel très bon marché : un télescope astronomique ordinaire de 280 mm de focalefocale et un détecteur laserlaser monophonique du commerce. La longueur d'ondelongueur d'onde choisie, 1.550 nanomètresnanomètres (proche infrarougeinfrarouge), présente l'avantage de ne pas être dangereuse pour l'œilœil humain et de filtrer les photons solaires qui, autrement, submergeraient le détecteur. Plusieurs autres améliorations ont été apportées, comme un petit miroirmiroir mobilemobile pouvant balayer un objet avec une grande précision en évitant une distorsion en « coussin ».

    En a : vue en condition réelle. De b à d : vue reconstruite avec différents algorithmes. En e : vue obtenue par le nouvelle méthode, qui offre une résolution de 60 cm à plus de 45 km de distance. © <i>Zheng-Ping Li et al, arxiv, 1904.10341v1, </i>avril 2019
    En a : vue en condition réelle. De b à d : vue reconstruite avec différents algorithmes. En e : vue obtenue par le nouvelle méthode, qui offre une résolution de 60 cm à plus de 45 km de distance. © Zheng-Ping Li et al, arxiv, 1904.10341v1, avril 2019

    Un algorithme qui filtre les pixels parasitaires

    La deuxième partie de l'invention se situe au niveau logiciel, avec un algorithme pouvant reconstruire une image avec très peu de pixels valides. Ce genre de technique a connu d'impressionnants progrès ces dernière années jusqu'à, par exemple, pouvoir photographier un objet simplement à partir de son ombre en utilisant un appareil photo classique.

    Ici, le défi était de limiter le bruit dû aux multiples réflecteurs ainsi que la faible résolution du matériel optique dans les longues focales. Les chercheurs ont construit un algorithme capable de repérer uniquement les pixels de l'objet souhaité en sélectionnant le laps de temps correspondant à la distance à laquelle il se trouve. Les photons « inutiles » sont éliminés de l'environnement, ce qui enlève le bruit de la photo. Une vue en 2D est ainsi obtenue, mais il est possible de reconstruire l’image 3D en changeant les temps de déclenchement pour capter les photons à différentes distances.

    Des applications dans la surveillance aérienne et la reconnaissance de cibles

    L'appareil a été testé à Shanghai, installé au 20e étage d'un immeuble de l'île de Chongming, d'où il a pu photographier les détails d'un bâtiment de l'aviation civile de Pudong, à 45 km au sud de l'autre côté du fleuve. Là où la diffractiondiffraction limite habituellement la résolution à 1 mètre à cette distance, la technique de Zheng-Ping Li et ses collègues produit une image avec une résolution de 60 cm. De plus, elle s'affranchit du « bruit » de la pollution, ce qui permet de voir à travers le brouillardbrouillard et cela, de jour comme de nuit -- même si les clichés de jour sont un peu plus flous en raison des interférencesinterférences plus nombreuses.

    « Cette technique ouvre une nouvelle voie pour l'imagerie optique 3D haute résolution, rapide et basse consommation sur de très longues distances », se félicite Zheng-Ping. Les chercheurs estiment d'ailleurs que l'on pourrait atteindre des distances de plusieurs centaines de kilomètres en affinant la configuration du Lidar et de l'algorithme. De nombreuses applicationsapplications sont envisageables, comme la télédétection, la surveillance aérienne et la reconnaissance de cibles lointaines.