Les théories prévoient que de puissants vents peuvent souffler de la matière en dehors des galaxies. Aujourd’hui, des observations viennent le confirmer. Mettant pour la première fois en lumière une partie de la matière manquante baryonique de l’Univers.


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    L'étude détaillée du fond diffus cosmologiquefond diffus cosmologique, cette sorte de rayonnement fossilefossile datant de quelques centaines de milliers d'années après le Big Bang, a permis aux astronomesastronomes de se faire une idée de la quantité totale de matière contenue dans notre Univers. Mais lorsqu'ils la comparent à ce qu'ils savent de la matière qui compose les étoiles des galaxies, ça ne correspond pas. Une partie -- quelque 80 % tout de même -- de ce que les physiciensphysiciens appellent la matière baryonique -- celle qui est très classiquement composée de protons, de neutronsneutrons et d'électronsélectrons tels que nous les connaissons --, manque à l'appel.

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    Les modèles et les théories situent cette matière manquante dans l'espace intergalactique. Déposée là par des ventsvents galactiques résultant de l'explosion de millions d'étoiles en fin de vie, théorisent les astronomes. Mais jamais encore ils n'avaient été en mesure de l'observer directement. Jamais jusqu'à aujourd'hui et les observations publiées par une équipe internationale menée côté français par des chercheurs du CNRS et de l'université Claude BernardClaude Bernard Lyon 1. « Maintenant que nous avons vu une partie de cette matière manquante, nous pouvons être sûrs de son existence », remarque Nicolas Bouché, chercheur au CNRS, un sourire dans la voix. Nous rappelant ainsi la tendance de l'humanité à se comporter comme Saint Thomas.

    Ce que les chercheurs ont réalisé, c'est même une cartographie unique de la nébuleusenébuleuse entourant la galaxie Gal1. Mais comment ont-ils pu réussir là où tant d'autres avaient échoué avant eux ? « Avec un peu de chance », reconnaît Nicolas Bouché tout en saluant le travail de Johannes Zabi, son ancien post-doctorant, premier auteur de l'étude. Car il est vrai que la galaxie en question s'est avérée parfaitement positionnée pour une observation profonde à l'aide de l'instrument Muse - pour Multi Unit Spectroccopic Explorer, un spectrographespectrographe 3D grand champ en opération sur le Very Large Telescope (VLTVLT) de l'Observatoire européen austral (ESOESO).

    À gauche, le quasar et la galaxie Gal1. Au centre, la nébuleuse de magnésium observée par les chercheurs. À droite, la superposition de cette nébuleuse avec Gal1. © Johannes Zabl, CNRS
    À gauche, le quasar et la galaxie Gal1. Au centre, la nébuleuse de magnésium observée par les chercheurs. À droite, la superposition de cette nébuleuse avec Gal1. © Johannes Zabl, CNRS

    La preuve que la matière manquante est là

    Si les astronomes avaient choisi de viser justement cette galaxie, c'est parce que, déjà, il y a quelques années, d'autres observations avaient éveillé leur curiosité. À l'arrière-plan de cette galaxie se trouve en effet un quasarquasar. Une sorte de « phare » qui permet de mettre en lumièrelumière les gazgaz présents dans le milieu intergalactique sur la ligne de visée. En décomposant la lumière issue de ce quasar, les chercheurs avaient identifié une raie caractéristique du magnésiummagnésium. Une raie présentant un décalage vers le rougedécalage vers le rouge -- qui marque la distance qui nous en sépare -- identique à celui de Gal1. « Ce résultat laissait penser que nous pourrions trouver un halo de gaz autour de cette galaxie », nous explique Nicolas Bouché.

    Et c'est donc une observation profonde d'une douzaine d'heures réparties sur plusieurs mois qui a finalement permis aux astronomes de faire apparaître cette étendue de gaz dont les modèles prévoyaient l'existence. Des deux côtés de la galaxie. « Ce halo est la preuve qu'il existe de la matière en dehors des galaxies que nous n'avions encore jamais observée », nous précise encore le chercheur.

    Un peu comme un iceberg

    « C'est un peu comme lorsque vous voyez un iceberg, vous savez qu'il cache une quantité de glace sous l'eau. Maintenant, nous savons que les galaxies cachent bien une grande quantité de matière manquante. » Mais, comme Saint Thomas, les astronomes tiennent tout de même à le vérifier de visu. Autour d'autres galaxies. Car si les modèles prévoient que des vents galactiques doivent souffler de la matière hors de toutes les galaxies, le phénomène reste extrêmement difficile à observer. Cette matière intergalactique manque en effet cruellement de luminositéluminosité. Et son observabilité pourrait dépendre de la position des galaxies par rapport à la nôtre -- du fait que nous les voyons ou non par la tranche, par exemple -- ou encore du rythme auquel les galaxies forment des étoiles.

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