Les éruptions solaires influent sur de nombreux systèmes électroniques terrestres, notamment sur la détectabilité des avions. Pour mieux prévenir la puissance des cycles solaires qui causent ces éruptions, une équipe de chercheurs a développé une nouvelle méthode.


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    Elles libèrent en quelques minutes 100.000 fois plus d'énergie que toutes les centrales électriques sur Terre n'en produisent en une année. Mais surtout, les éruptions solaires font quelquefois des ravages sur les technologies terrestres modernes. Les compagnies aériennes doivent parfois annuler des vols au-dessus des pôles, où les communications radio sont perdues. En novembre 2015, par exemple, des avions ont disparu des radars en Suède. En février 2022, la compagnie SpaceXSpaceX a lancé 49 satellites, dans le cadre du projet Starlink d'Elon Musk. Quarante d'entre eux ont été pris dans une tempêtetempête géomagnétique causée par une éruption solaire, et sont retombés sur Terre. Un cuisant échec qui a coûté des dizaines de millions de dollars à la société. Si l'atmosphèreatmosphère absorbe une grande partie des rayonnements qui proviennent du Soleil, lors d'éruptions puissantes, de nombreuses particules passées tracent leur chemin jusqu'à nous. Mais ces éruptions suivent des cycles réguliers, de 11 ans, qui dépendent du champ magnétique solaire. Aujourd'hui, une étude publiée dans la revue Astronomy & Astrophysics, article en accès libre sur Arxiv, propose une nouvelle méthode pour prédire leur puissance, et donc, mieux se protéger.

    Le champ magnétique solaire s'inverse tous les 11 ans

    Tout comme la Terre, le Soleil possède un champ magnétique. Il est créé par ce qu'on appelle la dynamo solaire : des différences de vitesse de rotationvitesse de rotation de plusieurs parties du Soleil, combinées avec un mouvement de convectionconvection d'un fluide conductible. Le tout génère ensuite une gigantesque magnétosphèremagnétosphère, c'est-à-dire une zone dans laquelle l'influence du champ magnétique domine la physiquephysique. Ce sont les mouvements de convection du plasma solaire qui créent des cycles de 11 ans : le gazgaz ionisé forme des cellules de convection, des zones où il circule en circuit fermé, et ces cellules se déplacent petit à petit de l'équateuréquateur vers les pôles. Ce trajet met 11 ans, et il en résulte une inversion du champ magnétique solaire.

    Ici, la tache mesure 80.000 kilomètres de diamètre, et date de 2014. © Nasa
    Ici, la tache mesure 80.000 kilomètres de diamètre, et date de 2014. © Nasa

    Quant aux taches solaires, celles-ci correspondent à des zones plus froides que le reste de la photosphèrephotosphère, et sont causées par l'arrêt des mouvements de convection de surface, suite à une augmentation locale du champ magnétique. Mais attention, elles sont accompagnées d'un halo lumineux qui les entoure et correspond, à l'inverse, à une zone plus chaude. Leur diamètre atteint régulièrement plusieurs kilomètres. Vient ensuite l'éruption : une libération soudaine de l'énergie magnétique stockée, suite à une restructuration magnétique. Mais ces phénomènes magnétiques ne se produisent pas de manière symétrique : de précédentes études ont montré qu'au contraire, les hémisphères nordhémisphères nord et sud ne génèrent pas autant de taches durant un cycle.

    Actuellement, diverses méthodes existent déjà pour prédire l'intensité d'un cycle solaire. Elles relient par exemple le « temps de montée du cycle à son amplitude ou les champs polaires au minimum précédent », d'après l'étude. Mais la méthode la plus connue date de 2020, et se base sur le nombre de taches solaires : un indice précieux pour évaluer sa pertinence, car des relevés témoignent de la quantité de taches solairestaches solaires depuis plus de 300 ans. Ce nombre permet principalement de déduire la puissance du cycle suivant, ainsi des chercheurs supposent que le cycle actuel démarré en 2020 pourrait être particulièrement intense.

    Un délai de prévision moyen de 21 mois pour la nouvelle méthode

    La nouvelle méthode établie par les scientifiques introduit cette fois « le taux de croissance maximal de l'activité des taches solaires dans la phase ascendante d'un cycle en tant que précurseur nouveau et fiable de l'amplitude d'un cycle solaire ultérieur », comme le détaille l'étude. Pour établir cette nouvelle relation, les chercheurs se sont basés sur quatre ensembles de données indicateurs de l'activité solaire : « le nombre total de taches solaires, le nombre de taches solaires hémisphériques, et les zones des taches solaires totales et hémisphériques », indique l'étude. À partir de ces données, l'équipe a établi un modèle de prédiction de l'amplitude des cycles et l'a comparé aux données réelles. Résultat, « la validation des prédictions pour les cycles 1 à 24 montre des corrélations élevées entre les amplitudes de cycle vraies et prédites atteignant r = 0,93 pour le nombre total de taches solaires », détaille l'étude.

    Des scientifiques présentent une nouvelle méthode pour prédire la force du cycle solaire sur 11 ans. © YouTube

    Un résultat positif donc, qui montre de plus l'importance de la séparationséparation des deux hémisphères solaires, et de la considération en priorité de la phase ascendante. Mais aussi, elle permet une étude en temps réel, ou presque : les chercheurs concluent ainsi sur l'utilité de surveiller l'activité solaire en continu, en tenant compte des asymétries. « Notre travail confirme la grande importance d'une étude indépendante des hémisphères du Soleil et de la collecte régulière de données pour chacun. Il convient également de noter que notre méthode peut être utilisée en temps réel, nous pouvons prédire l'amplitude du cycle en continu sur le développement de la phase ascendante d'un cycle solaire et mettre à jour la prédiction lorsque la dernière valeur du taux de croissance est supérieure à la précédente. Avec les données actuellement disponibles, nous prévoyons que l'estimation inférieure de l'amplitude du cycle solaire actuel (n° 25) sera de 110 ± 26, ce qui est comparable au cycle solaire précédent de 11 ans (n° 24) », conclut Olga Sutyrinan, coauteure de l'étude et chercheuse scientifique chez Schlumberger.