Pour retourner sur la Lune, la Nasa et Boeing développent le lanceur le plus puissant jamais construit par les États-Unis. Un important essai prévu le 16 janvier se prépare. Il consistera à simuler un décollage et les premières minutes du vol. Son succès est impératif, sans quoi le retour sur la Lune en 2024 sera compromis. Explications.
La Nasa, qui a pour objectif d'envoyer deux Américains, un homme et une femme, sur la Lune d'ici 2024, se prépare à un essai majeur de l'étage principal du lanceur SLS (Space Launch System) qui amènera les astronautes sur la Lune. Ce lanceur, dont le vol inaugural est prévu dans le courant de l'année 2021 (Artemis-1), est construit par Boeing pour la Nasa.
À regarder en direct sur Nasa TV, samedi 16 décembre à partir de 22 h 20, heure de Paris. © Nasa
L'étage se trouve au Centre spatial Stennis dans le Mississippi depuis le mois de janvier où la Nasa et Boeing le préparent au fameux « Green Run ». Ce Green Run est un essai très important qui consiste au test complet de l'étage et tous ses systèmes intégrés avec l'allumage des quatre moteurs principaux durant presque neuf minutes, de façon à simuler un décollage après un compte à rebours et un remplissage des réservoirs. Les moteurs en question sont des RS 25 qui ont déjà volé en tant que moteurs principaux de la navette spatiale.
Échec interdit sous peine de reporter le retour de l’Homme sur la Lune
Haut de 60 mètres, cet étage contient les réservoirs d'hydrogène et d'oxygène liquides ainsi que l'avionique et les ordinateurs de vol du lanceur. L'importance de cet essai s'explique par le fait que tester les propulseurs seuls ne suffit pas. Il faut être certain que tous les éléments (moteur, réservoir, système fluidique, structure...) fonctionnent correctement ensemble et que le tout résiste à la poussée et aux vibrations. Il faut également vérifier les performances (poussée, Isp) avec l'ensemble du système. Donc, après avoir testé tous les éléments un à un, Boeing et la Nasa réaliseront ce test grandeur nature, avec tous les systèmes et sous-systèmes, de façon à valider la conception de l'étage.
SLS en vol. Illustration. cL'étage testé n'est pas une maquette mais celui qui doit voler en 2021 lors d'Artemis-1 ! Il est donc impératif que ce test se déroule au mieux et qu'il n'engendre aucun problème technique. Une situation autre qu'un succès plongerait le programme Artemis dans l'embarras contraignant la Nasa à reporter Artemis-1 de plusieurs mois, rendant impossible un retour sur la Lune en 2024 (Artemis-3).
Une situation qui ne ferait pas que des malheureux. Elon Musk pourrait relancer son offre de service et proposer à la Nasa d'utiliser son Starship plutôt que le SLS, véritable gouffre financier soit dit en passant, pour lancer le véhicule Orion des missions lunaires.
Nasa : l’étage principal du SLS, le plus grand lanceur du monde est terminé
Article de Rémy Decourt publié le 11/12/19
La Nasa vient de présenter le premier étage principal de son futur système de lancement habité, formé du Space Launch System (SLS) et de la capsule Orion. Ce lanceur, au cœur de la stratégie américaine du retour sur la Lune, doit réaliser deux missions de démonstration avant d'envoyer un homme et une femme sur la Lune en 2024. La première mission n'est pas envisagée avant juin 2021.
La Nasa, reine de la communication, ne manque jamais l'occasion de mettre en avant ses programmes auprès de la presse et du grand public. Et ce, quelle que soit l'occasion de la vie d'un programme. Lundi, Jim Bridenstine, le patron de la Nasa, a profité de l'assemblage terminé du premier étage du Space Launch System (SLS) - qui doit envoyer des astronautes américains sur la Lune dès 2024 à bord de la capsule Orion - pour saluer le travail accompli, malgré d'importants retards de développement sur le calendrier.
Pour la Nasa, c'était aussi l'occasion de rappeler que le SLS est au cœur de la stratégie américaine pour permettre le retour sur la Lune, dans le cadre du programme Artemis, et d'afficher son soutien à ce système de lancement, alors qu'Elon Musk fait des pieds et des mains pour que l'agence américaine utilise Starship, son futur système de transport spatial à tout faire, en complément ou en remplacement du SLS.
Construit par Boeing, l'étage principal du SLS est équipé de quatre moteurs RS 25 qui ont déjà volé en tant que moteurs principaux de la navette spatiale. Il mesure 60 mètres de hauteur et contiendra 2,7 millions de litres d'hydrogène et d'oxygène liquides. Au total, ce lanceur sera plus grand que la statue de la Liberté et plus puissant que la célèbre Saturn V du programme Apollo qui emmena les astronautes américains vers la Lune de 1969 à 1972.

L'étage principal du lanceur SLS sur le site d’assemblage Michoud de la Nasa à La Nouvelle-Orléans. Sur cette image, prise en octobre 2019, seul un des quatre moteurs R25 a été installé. © Nasa, Éric Bordelon
Incertitudes quant aux dates de lancement
Étonnamment, Jim Bridenstine et Douglas Loverro, directeur de l'exploration humaine de la Nasa, n'ont pas souhaité communiquer les dates envisagées des trois premières missions Artemis.
Initialement prévue en 2020, la mission Artemis 1 devrait vraisemblablement décoller en juin 2021. Ce premier vol d'essai se fera sans astronaute. L'objectif de cette mission consiste à valider à la fois les performances de la capsule avant son utilisation pour le vol habité et celles du SLS. Elle servira également à tester la tenue en vol de la capsule et vérifier que les choix technologiques faits par Lockheed Martin sont les bons. Ce vol servira aussi à vérifier le bon fonctionnement du module de service européen qui assurera la propulsion, l'alimentation électrique, le contrôle thermique et les composants vitaux à la capsule américaine. Dit autrement, les astronautes américains respireront et boiront made in Europe ! Au cours de cette mission, le vaisseau Orion sera mis en orbite autour de la Lune.
Suivront un second vol de démonstration avec équipage et une mission autour de la Lune. Prévue en 2022, cette mission pourrait glisser en 2023. L'année, suivante, la Nasa lancera un homme et une femme qui iront se poser sur la Lune, 52 ans après la dernière mission habitée sur la Lune (Apollo 17, 1972).