Face à une génération Z jugée difficile à encadrer, certains chefs d'entreprise préfèrent miser sur l'intelligence artificielle plutôt que sur de jeunes talents, perçus comme volatils et mal préparés au monde du travail. Des stéréotypes qu'ils contestent haut et fort : les jeunes actifs accordent autant d'importance à leur carrière que leurs aînés, mais refusent de sacrifier leur bien-être. Plutôt qu'une opposition frontale humain-IA, l'enjeu ne résiderait-il pas dans un meilleur accompagnement où tutorat et formation en entreprise favoriseraient leur intégration ?


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    De nombreux managers admettent rencontrer des difficultés à encadrer les jeunes salariés. Ils leur reprochent souvent une sensibilité exacerbée, un manque de professionnalisme ou encore des attentes jugées irréalistes. À tel point que certains préféreraient travailler avec des robotsrobots plutôt qu'avec des jeunes diplômés, selon un récent sondage.

    C'est un chiffre qui illustre bien les tensions qui peuvent exister entre managers et jeunes collaborateurs. 37 % des employeurs déclarent préférer collaborer avec une intelligence artificielle plutôt que d'embaucher un membre de la génération Z, d'après une enquête menée par la Hult International Business School et relayée par Forbes.

    Cette préférence pour l'IA s'explique en partie par l'image que renvoient les jeunes actifs. S'ils sont appréciés pour leur aisance avec les outils numériquesnumériques et leur capacité d'adaptation, ils sont aussi perçus comme volatils, individualistes, peu enclins à l'autorité et soucieux de préserver un équilibre strict entre vie professionnelle et personnelle.

    C'est quoi le problème avec la génération Z ?

    Pourtant, ces stéréotypes ne reposent sur aucun fondement. Une enquête de l'Association pour l'emploi des cadres et du think tank TerraTerra Nova, publiée en janvier 2024 affirme qu'au travail, « les jeunes actifs se révèlent [...] des adultes comme les autres ». Les 18-29 ans accordent autant d'importance à leur travail dans leur vie que leurs aînés, voire davantage. Mais, à la différence des générations précédentes, ils refusent de sacrifier leur bien-être pour une entreprise, sauf si cela sert leurs propres ambitions.

    Les jeunes au travail : que de préjugés ! Ont-ils véritablement un rapport au travail différent de celui de leurs aînés ? Ou bien est-ce l'entreprise qui ne prend pas le temps d'élaborer un processus d'intégration ? © AnVr, Getty Images
    Les jeunes au travail : que de préjugés ! Ont-ils véritablement un rapport au travail différent de celui de leurs aînés ? Ou bien est-ce l'entreprise qui ne prend pas le temps d'élaborer un processus d'intégration ? © AnVr, Getty Images

    Face à cette nouvelle approche du travail, les managers ont tendance à trouver les membres de la génération Z plus difficiles à gérer que leurs aînés. Parmi les difficultés évoquées, 60 % pointent un manque d'expérience concrète. Plus de la moitié estiment que ces jeunes ont du mal à travailler en équipe, tandis que 57 % jugent qu'ils ne possèdent pas encore une vision globale du monde professionnel. Leur savoir-être en entreprise est aussi remis en question. Par ailleurs, former ces jeunes talents représente un coût non négligeable : 53 % des dirigeants jugent l'investissement trop important au regard de leur contribution initiale.

    Dans ce contexte, l’intelligence artificielle apparaît comme une alternative plus fiable et rentable

    Dans ce contexte, l'intelligence artificielleintelligence artificielle apparaît comme une alternative plus fiable et rentable. Contrairement aux jeunes employés, elle ne requiert ni formation, ni salaire, ni congés, et peut exécuter des tâches avec précision et à moindre coût. Une logique d'optimisation qui interroge sur l'avenir de l'humain dans un marché de l'emploi de plus en plus automatisé.

    Les jeunes se sentent-ils vraiment préparés au monde du travail ?

    Mais qu'en pensent les principaux concernés ? Les jeunes ne sont pas insensibles aux critiques de leurs supérieurs. Près de 85 % d'entre eux estiment que leur formation universitaire ne les a pas suffisamment préparés au monde du travail. Ce chiffre grimpe à 87 % lorsqu'on compare leur apprentissage en entreprise à celui reçu pendant leurs études. Plus frappant encore, 55 % des répondants considèrent que leur diplôme ne leur a apporté aucune compétence directement applicable à leur emploi. Cela pose la question de l'adéquation entre les parcours académiques et les attentes des employeurs, dans un environnement où la technologie redéfinit les exigences du marché.

    La méfiance des managers envers les jeunes actifs illustre une profonde évolution du monde du travail et souligne la nécessité d'une adaptation mutuelle. D'un côté, les jeunes doivent mieux intégrer les codes du monde professionnel pour s'y insérer plus efficacement. De l'autre, les employeurs doivent repenser leurs stratégies de formation et d'intégration afin d'exploiter pleinement leur potentiel. L'avenir du travail ne se jouera peut-être pas dans un affrontement entre humains et robots, mais dans leur capacité à coexister intelligemment.