À quoi ressemble un proton ? À une boule de billard, mais en tout petit. Bien sûr. Ou bien sûr que non ! Parce qu’au fil des décennies, la physique nous a appris que les choses sont un peu plus compliquées que ça. Tellement même qu’il est devenu difficile de se les représenter. Mais des chercheurs se sont associés à des artistes pour relever le défi. Voici le résultat.


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    La chaise sur laquelle vous êtes assis en ce moment. L'ordinateurordinateur sur lequel vous lisez ce sujet. Et même l'oiseauoiseau que vous entendez chanter par la fenêtrefenêtre ouverte. La matière qui nous entoure est constituée d'atomes. D'infimes particules invisibles à nos yeuxyeux. D'infimes particules elles-mêmes formées d'électrons, de neutrons et de protons. Des particules encore plus petites. Encore plus invisibles.

    Invisibles, mais tout de même bien réelles. Alors, vous êtes-vous déjà demandé à quoi ressemblent ces infimes particules ? Des sortes de minuscules systèmes solairessystèmes solaires faits d'électrons gravitant autour d'un noyau formé de neutrons et de protons. C'est l'image qui a longtemps été proposée. Mais les physiciensphysiciens d'aujourd'hui savent qu'elle n'est pas juste. Et comme il faut bien commencer quelque part, des chercheurs du Massachusetts Institute of Technology (MIT, États-Unis) nous proposent de découvrir à quoi ressemble vraiment un proton, une particule pas plus grosse qu'un femtomètre - soit 10-15 mètres. Et attention spoiler, ce n'est pas tout à fait la boule de billard parfaite que l'on nous présente traditionnellement encore à l'école.

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    Pour tout dire, cela fait maintenant presque vingt ans que les chercheurs du MIT y pensent. Qu'ils réfléchissent à la meilleure manière de nous donner une image juste de ce qu'est un proton. L'idée d'en faire un simple portrait-robotrobot a rapidement été écartée. Parce que le monde de la physiquephysique des particules est en quelque sorte... vivant ! Il évolue. Il est en mouvementmouvement. Des particules se créent. D'autres disparaissent. Certaines se transforment. Et seule une animation pouvait rendre cette réalité palpable.

    Mais les physiciens du MIT avaient réellement envie d'aller au-delà de tout ce qui était connu. De tout ce qui avait déjà été présenté jusqu'ici. Ils se sont lancé un véritable défi : collaborer avec des artistes. Pour proposer une animation à la fois scientifiquement précise et visuellement attrayante. Faire des choix audacieux qui aideraient « les gens à repartir avec une meilleure compréhension de leur interprétation et de la physique en général ».

    Cette représentation du proton – trois boules maintenues dans une sorte de boule de billard plus grande par des ressorts – nous aide à comprendre sa structure : deux quarks up et un quark down reliés par des gluons. Mais elle ne montre en aucun cas ce qui se joue réellement dans le monde quantique. © Dmitry Kovalchuk, Adobe Stock 
    Cette représentation du proton – trois boules maintenues dans une sorte de boule de billard plus grande par des ressorts – nous aide à comprendre sa structure : deux quarks up et un quark down reliés par des gluons. Mais elle ne montre en aucun cas ce qui se joue réellement dans le monde quantique. © Dmitry Kovalchuk, Adobe Stock 

    Le proton, une particule finalement pas si insaisissable

    Avant d'aller plus loin, rappelons que les chercheurs ont établi que le proton n'est pas une particule élémentaire. Il est composé de trois quarksquarks - deux quarks appelés up et un quark dit down. Et c'est cette force que les physiciens nomment l'interaction forteinteraction forte qui les relie entre eux. Grâce à des échanges de gluonsgluons. Cette interaction est tellement puissante que jamais encore des quarks et des gluons n'ont pu être observés séparément.

    Les artistes qui ont travaillé avec les équipes du MIT ont ainsi figuré les quarks comme les points lumineux. Des points lumineux en mouvement dont la couleurcouleur évolue sans cesse, passant du rouge au vert et au bleu pour représenter les charges de couleur qui apparaissent entre les quarks et les gluons soumis à l'interaction forte. Car selon la théorie quantique, tous les systèmes de quarks et de gluons portent une quantité égale de ces trois couleurs. Même s'ils ne sont pas réellement colorés de bleu, de rouge ou de vert.

    L’animation « <em>Visualizing the Proton</em> » donne une idée de ce qu’est réellement ce constituant des noyaux atomiques. © <em>« Visualizing the Proton » team</em>, MIT, <em>Jefferson Lab</em>
    L’animation « Visualizing the Proton » donne une idée de ce qu’est réellement ce constituant des noyaux atomiques. © « Visualizing the Proton » team, MIT, Jefferson Lab

    Des expériences menées à l'aide d'accélérateurs de particules de plus en plus performants ont par ailleurs montré aux physiciens qu'au cœur du proton, ce sont généralement les gluons qui font la loi. Mais dans certaines régions, les quarks prennent le dessus. D'ici quelques années, un nouvel instrument, l'Electron IonIon Collider (États-Unis), devrait permettre de préciser ce qui se passe aux limites de ces régions. Mais déjà, l'équipe qui a assisté les chercheurs du MIT pour produire une représentation fidèle du proton a réussi à construire une animation qui rend compte de sa structure changeante. Une structure dominée par des gluons qui se séparent et se recombinent sans cesse lorsque le « temps d'exposition » - qui correspond un peu à la fraction de l'impulsion du proton portée par un quark ou un gluon - est faible. Lorsque le « temps d'exposition » augmente, c'est le processus de création par un gluon d'un quark et de son antiquark qui se montre. Enfin, avec un « temps d'exposition » élevé, les trois quarks qui forment le proton font leur apparition.

    Mieux que cela, les chercheurs sont parvenus à mettre en image ce que l'on observe lorsque l'on s'enfonce au cœur du proton. Lorsque l'on augmente la résolutionrésolution spatiale. Lorsque des détails apparaissent et qu'un effet relativiste fait perdre au proton sa forme de boule pour le transformer en disque. Pour un « temps d'exposition » faible, il apparaît un nombre grandissant de gluons. Pour un « temps d'exposition » élevé, c'est une structure assez grossière, mais tout de même définie et comprenant trois quarks, qui devient plus marquée.

    Les chercheurs comptent désormais travailler au développement d'une version 3D de cette visualisation du proton. Avant de proposer, plus tard, une animation du noyau atomique. Et franchement, qui ne rêve pas de les suivre dans le monde merveilleux de la physique de l'infiniment petit ?