On sait refroidir des atomes à des températures de l’ordre du milliardième de kelvin. C'est un beau score mais insuffisant. Pour réaliser certaines des idées du grand physicien Richard Feynman, il manquait aussi, entre autres, un thermomètre... Il vient d’être inventé.

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    On mesure la température des atomes ultra-froids en déterminant la longueur nécessaire pour observer un basculement des aimants atomiques. On parle d'un gradient de spin, représenté ici en rouge avec une flèche pour indiquer le sens de l'aimant. Le champ magnétique B est représenté en vert. Crédit : Alan Stonebraker

    On mesure la température des atomes ultra-froids en déterminant la longueur nécessaire pour observer un basculement des aimants atomiques. On parle d'un gradient de spin, représenté ici en rouge avec une flèche pour indiquer le sens de l'aimant. Le champ magnétique B est représenté en vert. Crédit : Alan Stonebraker

    Le comportement des électrons dans les solides, en particulier les supraconducteurs à hautes températures critiques, est décrit par les lois de la mécanique quantique. Il en est de même à l'intérieur des noyaux et dans les nucléons, eux-mêmes composés de quarks. Interviennent alors les fameuses amplitudes de probabilités gouvernées par le principe de superposition des états et dont l'évolution dans l'espace et le temps est donnée par l'équation de Schrödingeréquation de Schrödinger.

    Au sein d'un ensemble de particules interagissant assez fortement entre elles, comme c'est le cas dans les noyaux et les nucléons, les calculs analytiques deviennent compliqués voire impossibles à résoudre et on doit avoir recours aux ordinateursordinateurs. Même avec eux, des limites peuvent être rapidement atteintes lorsqu'on est confronté à des systèmes quantiques. C'est pourquoi Richard FeynmanRichard Feynman avait proposé il y a près de 30 ans de se passer de ces outils de calculs pour simuler le comportement quantique des particules et plutôt d'utiliser ce comportement lui-même pour réaliser des calculs plus efficaces décrivant les systèmes quantiques. Il fut ainsi amené à introduire le concept d'ordinateur quantiqueordinateur quantique et à réfléchir sur les notions de calcul et d'information quantiques.

    L'astuce : profiter du gradient de spin

    On pourrait imaginer simuler le comportement quantique des électrons dans un réseau cristallinréseau cristallin en piégeant des atomesatomes ultra-froids dans un réseau optique créé par des faisceaux laserlaser. On sait déjà créer en laboratoire de tels réseaux mais pour mettre en pratique les idées de Feynman, il faudrait descendre non pas de quelques milliardièmes de kelvinkelvin comme on sait le faire aujourd'hui mais à des températures cent fois plus basses !

    Les chercheurs travaillent sur ce problème mais il restait une autre pierre d'achoppement. Comment mesurer des températures de cet ordre ? Avec quel thermomètrethermomètre ?

    Ce problème-là au moins vient d'être résolu par des chercheurs du MIT-Harvard Center for Ultra-Cold Atoms (CUA). Il suffisait de faire intervenir un champ magnétiquechamp magnétique et de relier l'agitation des atomes ultra-froids piégés dans le réseau optique à leur aimantationaimantation. On sait depuis longtemps qu'un aimantaimant chauffé perd son aimantation parce que les petits aimants constitués par chaque atome sont orientés de façon de plus en plus aléatoire et chaotique au fur et à mesure que s'élève la température, donc l'agitation atomique. Inversement, à des températures froides, les aimants atomiques peuvent s'orienter de plus en plus dans une même direction, surtout en présence d'un champ magnétique extérieur. Les champs magnétiques individuels s'additionnant, le matériaumatériau devient aimanté.

    La méthode des chercheurs fonctionne avec des atomes ultra-froids refroidis à quelques milliardième de kelvin et ils ont montré dans une publication de la célèbre revue Physical Review Letters que rien ne s'opposait à ce qu'elle soit tout aussi efficace à des températures plus basses.