Cousin lourd de l'électron, le muon se comporte comme un petit aimant en rotation et, depuis longtemps, défie les prédictions du modèle standard de la physique des particules. Laboratoire pour tester des théories peut-être invérifiables avec le LHC, comme celles concernant la matière noire, il a fait l'objet d'une longue prise de mesures avec une expérience menée par les physiciens du Fermilab, aux États-Unis, au point d'avoir peut-être atteint en 2023 le statut de découverte d'une nouvelle physique.


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    Comme le prouvent les articles précédents ci-dessous auxquels nous renvoyons pour plus de précision et éviter de faire de trop longues répétitions, cela fait des années que Futura suit la saga de l'énigmatique anomalieanomalie du moment magnétique des muons. Sous ces mots ésotériques se cachent des mesures d'une propriétés caractéristiques des muons, des particules chargées électriquement comme des électrons mais environ 200 fois plus lourdes qu'eux et qui se désintègrent très rapidement une fois qu'elles sont créées. Au début on ne pouvait que les détecter dans les rayons cosmiques mais après la seconde guerre mondiale, on a commencé à le produire en laboratoire, par exemple lors de collisions d'électrons et de positrons à des énergiesénergies suffisamment élevées pour que, selon la fameuse relation d'Einstein, de l'énergie soit convertie en la massemasse nécessaire pour obtenir un muon et son antiparticuleantiparticule.

    S'il n'existait que des électrons, des muons et des photonsphotons dans l'UniversUnivers, les propriétés des muons, comme leur masse, leur charge et ce que l'on appelle leur moment magnétique ( une quantité similaire à celle que l'on peut définir pour une barre aimantée et qui est reliée à la façon dont la barre peut tourner dans un champ magnétiquechamp magnétique), et que l'on exprime au moyen d'une quantité nommée « g » ( qui indique en fait une relation entre le moment magnétique et le moment cinétiquemoment cinétique, le spinspin d'une particule comme si elle tournait sur elle-même), seraient précisément définis.

    Mais en raison des effets quantiques et de la présence d'autres particules fondamentales, les gluonsgluons, les quarksquarks, les neutrinos notamment, ces valeurs sont aussi dépendantes des fluctuations quantiques qui font apparaître et disparaître tous les types de particules existant autour des muons, des électrons et des photons, ou qui font que ces particules en émettent avant de les recapturer.


    Une excellent présentation en 2021 déjà de l'énigme de l'anomalie du moment magnétique du muon que confirment, pour le moment, les données de l'expérience menée au Fermilab. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © Fermilab

    La théorie quantique des champs à la base du modèle standard de la physiquephysique des particules nous dit précisément comment les muons doivent se comporter comme des petites barres aimantées plongées dans un champ magnétique. Ils doivent se mettre à avoir un mouvementmouvement de précessionprécession comme une toupie dans un champ de gravitationgravitation.

    On peut mesurer ces mouvements pour des muons accélérés presque à la vitesse de la lumièrevitesse de la lumière dans un anneau de stockage magnétique supraconducteursupraconducteur qui se trouve au mythique Fermilab qui chassait le bosonboson de Brout-Englert-Higgs avant que le LHC ne prenne le relais pour finalement découvrir ce boson.

    Des traces de particules encore inconnues ?

    Or, depuis des années, il y a un écart entre les prédictions théoriques et les mesures. Une façon de l'expliquer, en supposant que les mesures sont correctement faites et que les calculs dans le modèle standardmodèle standard sont effectués eux aussi correctement, c'est de supposer que d'autres particules existent, relevant d'une nouvelle physique, et qu'elles contribuent par des fluctuations quantiques, faisant apparaître temporairement leur présence, à définir les valeurs des masses, charges et surtout du moment magnétique des muons.

    Depuis des années, les membres de la collaboration Muon g-2 font donc des expériences de plus en plus précises pendant que les théoriciens affinent aussi leurs calculs.

    En 2021, l'écart entre mesure et prédiction était d'environ 4,2 sigmas, comme le disent les scientifiques dans leur jargon. Aujourd'hui, selon un article qui va bientôt être publié dans Physical Review Letters suite à une amélioration d'un facteur deux de la précision des mesures, on arrive à un écart d'environ 5,1 sigmas.

    On a donc franchi le seuil fatidique des 5 sigmas qui permet de parler d'une découverte, seuil qui signifie qu'il n'y a environ qu'une chance sur un million pour qu'une fluctuation, un bruit dans les mesures, imite le signal clair d'une nouvelle physique.

    Alors ça y est ? Nous avons enfin dépassé la physique du XXe siècle, même si on ne sait pas encore quelle physique du XXIe siècle va la remplacer avec cette expérience ?

    On ne sait encore, car les théoriciens devraient bientôt publier leurs derniers calculs sur cette anomalie du moment magnétique et il se pourrait bien qu'au final, l'écart soit réduit, voire supprimé significativement.

    Affaire à suivre donc...


    Une présentation des résultats en 2023 de l’expérience Muon-g2. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © Fermilab

     

     


    De possibles signes d'une nouvelle physique avec le moment magnétique du muon

    Article de Laurent SaccoLaurent Sacco publié le 10 avril 2021

    Cousin lourd de l'électron, le muon se comporte comme un petit aimantaimant en rotation et, depuis longtemps, défie les prédictions du modèle standard. Laboratoire pour tester des théories peut-être invérifiables avec le LHCLHC, comme celles concernant la matière noirematière noire, il a fait l'objet de nouveaux calculs théoriques poussés dont les résultats viennent d'être mis à l'épreuve d'une nouvelle expérience menée par les physiciensphysiciens du Fermilab aux États-Unis.

    Le 7 avril 2021 marque un tournant dans l'énigme du moment magnétique du muon, un désaccord étudié depuis plus de deux décennies entre la valeur de ce moment calculée à partir des équationséquations de la théorie quantique des champs et les expériences menées pour le mesurer.

    Rappelons que le muon est un leptonlepton, un cousin de l'électron mais un peu plus lourd possédant tout comme lui une charge électrique élémentaire. On peut donc lui appliquer l'équation quantique et relativiste découverte en 1928 par le prix Nobel de physique Paul DiracPaul Dirac. Cette équation prédit automatiquement que, tout comme l'électron, le muon doit posséder un moment cinétique intrinsèque, un spin, et qu'il doit donc se comporter comme s'il était une petite sphère chargée en rotation (la mécanique quantiquemécanique quantique interdit cependant de pousser la comparaison trop loin car cela conduit à des contradictions avec la théorie de la relativité notamment). L'équation implique alors, en bonus, que ces deux particules doivent aussi se comporter comme une petite barre aimantée et donc posséder ce que les physiciens appellent un moment magnétique.

    L'équation de Dirac n'est pas la seule qui gouverne les propriétés du muon et de l'électron. Il faut faire intervenir - à des degrés d'approximation divers - toutes les autres équations du modèle standard de la physique des particules et donc, indirectement, toutes les autres particules connues, comme les quarks, les neutrinosneutrinos ou même le boson de Brout-Englert-Higgs.


    Une présentation de l'énigme du moment magnétique du muon. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © Fermilab

    Une particule plongée dans un vide quantique bouillonnant de particules

    Pour décrire les effets de toutes ces particules, et en premier lieu des photons et des particules chargées, on peut faire des calculs analytiques avec les fameux diagrammes de Feynman. Le vide quantique autour d'un muon se révèle alors un objet compliqué qui se polarise comme le fait un corps diélectriquediélectrique sous l'action d'un champ électriquechamp électrique. L'interaction du muon avec ce vide change la valeur du moment magnétique qui devient alors indirectement une sonde plus ou moins sensible à l'existence non seulement des particules du modèle standard, mais aussi à celles d'une nouvelle physique.

    Les premiers calculs menés sur les effets supposément dominants des équations de l'électrodynamique quantiqueélectrodynamique quantique, la QED, avaient fourni une valeur en désaccord avec l'expérience et, depuis, toute la question est de savoir si ce désaccord est le produit d'erreurs de mesure ou d'une sous-estimation des effets des autres équations du modèle standard sur le vide quantique autour du muon, à savoir celle de la chromodynamique quantiquechromodynamique quantique (la QCD décrivant les forces fortes en quarks dans le monde des hadrons) et de la théorie électrofaiblethéorie électrofaible. Si aucune de ces éventualités n'est la cause du désaccord, alors nous aurions enfin le signe d'une nouvelle physique.

    Il y a quelques années, Futura avait déjà donné quelques explications à ce sujet dans le précédent article ci-dessous et en utilisant les vidéos du Fermilab avec les commentaires du physicien Don Lincoln. Les théoriciens n'ont pas chômé depuis lors, et la tâche était difficile car les équations de la QCD sont non linéaires. Pour certains calculs, il est plus facile de les effectuer sur ordinateurordinateur en utilisant ce que l'on appelle des simulations sur réseaux que l'on doit aux travaux de pionnier du prix Nobel de physique Kenneth G. Wilson.

    Évocation du calcul de l'effet de la polarisation du vide hadronique sur le magnétisme du muon. Comme une toupie, le muon (µ) tourne sur lui-même, devenant un minuscule aimant entouré d'un champ magnétique. Le muon suit une trajectoire le long de laquelle il interagit avec l'aimant de l'expérience « Muon g-2 » et avec des particules éphémères du vide quantique. Il polarise ainsi le vide hadronique, ce qui modifie son moment magnétique. Le fond, de 0 et de 1, et le pavage carré, évoquent le calcul sur supercalculateurs qui est l'une des approches décrites ici. © Dani Zemba, <em>Penn State University, Cnrs</em>
    Évocation du calcul de l'effet de la polarisation du vide hadronique sur le magnétisme du muon. Comme une toupie, le muon (µ) tourne sur lui-même, devenant un minuscule aimant entouré d'un champ magnétique. Le muon suit une trajectoire le long de laquelle il interagit avec l'aimant de l'expérience « Muon g-2 » et avec des particules éphémères du vide quantique. Il polarise ainsi le vide hadronique, ce qui modifie son moment magnétique. Le fond, de 0 et de 1, et le pavage carré, évoquent le calcul sur supercalculateurs qui est l'une des approches décrites ici. © Dani Zemba, Penn State University, Cnrs

    Quels effets pour le vide hadronique ?

    On peut alors faire des calculs plus précis concernant ce que l'on appelle le vide hadronique autour d'un muon, c'est-à-dire les effets des fluctuations quantiques du vide qui font interagir le muon avec des paires évanescentes d'antiparticules et de particules composant les hadronshadrons, donc les quarks chargés et les gluons, les cousins du photon de l'interaction nucléaire forte. L'effet du vide hadronique vient en  seconde place derrière les effets photoniques de la QED pour le muon. La troisième place correspond, elle, aux effets de la force nucléaire faibleforce nucléaire faible incorporée dans les équations de la théorie électrofaible de Glashow-Salam-Weinberg.

    Une équipe internationale de chercheurs, parmi lesquels on trouve des physiciens du CNRS dont le Français Laurent Lellouch (Futura avait déjà parlé de travaux que lui et ses collègues ont menés avec les simulations sur réseaux concernant les calculs ab initio des masses du proton et du neutron), vient justement de publier dans Nature un article à ce sujet. Le désaccord avec la valeur du moment magnétique mesurée il y a 20 ans et connue avant ce 7 avril 2021 persistait dans leur calcul mais il était plus faible, ce qui laissait un peu plus penser, malheureusement, que l'on finirait peut-être par obtenir un accord entre théorie et observations complètement compatible avec les incertitudes des deux estimations et ne nécessitant donc aucune nouvelle physique.

    Mais l'optimisme peut rester de mise car ce 7 avril 2021, c'est aussi le jour où les physiciens du Fermilab ont rendu publics, via des articles sur arXiv publiés dans plusieurs journaux réputés,  les résultats d'une nouvelle expérience destinée à mesurer le moment magnétique du muon, beaucoup plus précise que celle menée aux États-Unis il y a 20 ans au Brookhaven National Laboratory (BNL).

    Les résultats combinés des expériences du Fermilab et du BNL montrent finalement une différence avec la théorie de l'ordre de 4,2 sigmas, comme disent les chercheurs dans leur jargon. Ce n'est pas encore une découverte, il faudrait atteindre les 5 sigmas. Mais la probabilité que les résultats soient une fluctuation statistique dans les deux expériences, des perturbations accidentelles des instruments de mesure ou des phénomènes mesurés, est maintenant d'environ 1 sur 40.000.

    Bien que le débat ne soit pas clos, on peut affirmer que l'apparition des effets d'une nouvelle physique qui se manifesterait dans l'anomalie du moment magnétique du muon est devenue plus crédible. On devrait en savoir plus dans les années à venir car les mesures au Fermilab vont se poursuivre et pour le moment seulement 6 % environ du volumevolume de données qu'il est prévu de collecter a été obtenu et analysé. Les théoriciens vont également continuer de leur côté à raffiner leurs calculs.

    À gauche, les résultats des calculs de la valeur du moment magnétique du muon prédite par le modèle standard et la barre d'erreur indiquant les incertitudes de ces calculs. Sur la droite, les résultats expérimentaux de l'expérience au <em>Brookhaven National Laboratory</em> et ceux de l'expérience du Fermilab, là aussi avec des barres d'erreur. En combinant les statistiques des deux expériences, une estimation plus précise est obtenue qui est en désaccord encore plus marqué avec l'estimation théorique, puisque de 4,2 sigmas. Mais c'est insuffisant pour parler d'une découverte. Calculs et prises de données doivent continuer. © Ryan Postel, Fermilab Muon g-2 collaboration
    À gauche, les résultats des calculs de la valeur du moment magnétique du muon prédite par le modèle standard et la barre d'erreur indiquant les incertitudes de ces calculs. Sur la droite, les résultats expérimentaux de l'expérience au Brookhaven National Laboratory et ceux de l'expérience du Fermilab, là aussi avec des barres d'erreur. En combinant les statistiques des deux expériences, une estimation plus précise est obtenue qui est en désaccord encore plus marqué avec l'estimation théorique, puisque de 4,2 sigmas. Mais c'est insuffisant pour parler d'une découverte. Calculs et prises de données doivent continuer. © Ryan Postel, Fermilab Muon g-2 collaboration

    Le séminaire donné le 7 avril 2021 au Fermilab concernant les résultats de la nouvelle mesure du moment magnétique du muon. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © Fermilab

    Moment magnétique du muon : l'énigme enfin résolue ?

    Article de Laurent Sacco publié le 12/02/2018

    Cousin lourd de l'électron, le muon se comporte comme un petit aimant en rotation et, depuis longtemps, défie les prédictions du modèle standard. Laboratoire pour tester des théories peut-être invérifiables avec le LHC, comme celles concernant la matière noire, cette énigme a peut-être été finalement résolue : et si l'on avait jusque-là oublié la Terre et EinsteinEinstein ?

    Ni les expériences au LHC ni les autres tentatives, comme la mission Planckmission Planck ou Microscope, n'ont pour le moment été couronnées de succès pour explorer une éventuelle nouvelle physique au-delà du modèle standard. La déception et la perplexité sont certainement grandissantes parmi les théoriciens qui n'ont pourtant fait que pousser jusqu'au bout les idées fondant ce modèle au succès extraordinaire. Cette « nouvelle physique » se cache peut-être dans des phénomènes mettant en jeu des énergies trop élevées pour un accélérateur, fût-il de la taille de la Terre.

    Tout espoir n'est pas encore perdu de découvrir cette nouvelle physique, bien que de manière indirecte. L'un des moyens se cache peut-être dans une énigme qui interpelle les chercheurs depuis au moins le début du XXIe siècle : celle du moment magnétique anomal (attention c'est bien anomal et pas anormal dans le langage des physiciens) d'un cousin de l'électron, le muon, un lepton de masse 207 fois plus grande. Sa valeur ne semble pas être en accord avec les calculs menés dans le cadre du modèle standard.

    Or, une façon d'expliquer ce désaccord est de faire intervenir les mythiques particules supersymétriques de masses plus lourdes que celles accessibles au LHC. Toutefois, il pourrait s'agir d'une erreur de mesure et c'est pourquoi une nouvelle expérience baptisé Muon g-2, destinée à clore le débat sur cette éventualité, est actuellement en cours au Fermilab depuis peu.

    Le muon et l'électrodynamique quantique

    Cependant, le désaccord entre les expériences passées et la théorie n'est que de l'ordre de 3,5 sigmas, comme disent les physiciens. En clair : ce n'est pas encore une découverte solidesolide. Des théoriciens viennent peut-être de régler la question en suggérant, calculs à l'appui, que cette différence serait due à la non prise en compte de l'influence de gravitégravité, effectivement négligée jusque-là. Il en irait donc de la célèbre énigme du moment magnétique du muon comme du cas des neutrinos transluminiques de l'expérience Opera.

    Mais que signifie, au juste, cette histoire de moment magnétique et de nouvelle physique qui intervient dans son calcul ?

    Rappelons que le muon a été initialement découvert en 1937 et qu'on l'avait pris à l'époque pour le pion, encore appelé mésonméson pipi, le boson de spin nul prédit par Hideki Yukawa dans le cadre de sa théorie de la force nucléaire forte entre les nucléonsnucléons. En 1947, le pion est finalement identifié et le muon, qui est en fait un fermionfermion, apparaît alors comme une nouvelle particule défiant les explications des théoriciens. Que vient faire dans l'univers ce cousin lourd de l'électron qui se désintègre en donnant un deuxième neutrino, en plus de celui déjà connu dans la désintégration bêtabêta ?

    Or, tout comme l'électron, le muon est une particule chargée de spin ½ qui peut donc se concevoir, dans une certaine limite car c'est un objet quantique, comme une petite sphère en rotation. Qui dit charge en rotation dit courant électriquecourant électrique donc production de champ magnétique. Le muon, comme l'électron, doit se comporter comme un petit aimant. Il doit présenter un moment magnétique proportionnel à son spin, avec entre autres, un facteur g (facteur de Landé) lié à une constante de proportionnalité, le rapport gyromagnétique.


    La QED, la théorie de base pour calculer des moments magnétiques en physique des particules. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © Fermilab

    Ce facteur g peut se calculer avec la version relativiste de l'équation de Schrödingeréquation de Schrödinger appliquée à l'électron, c'est-à-dire l'équation de Dirac, laquelle prédit magiquement le spin de l'électron et l'existence de l'antimatièreantimatière. Dans le cas de l'électron et du muon, g vaut 2 mais c'est sans compter avec l'effet du champ électromagnétiquechamp électromagnétique généré par ces particules et qui doit être décrit par une version quantique du champ électromagnétique de Maxwell. L'expérience prouve que g-2 n'est pas nul et ce fut un grand succès de l'électrodynamique quantique (Quantum Electrodynamic ou QED en anglais) de Feynman-Tomonaga-Schwinger de la fin des années 1940 et du début des années 1950 de commencer à prédire la valeur précise de cet écart dans le cas de l'électron mais aussi du muon.

    La valeur anormale du moment magnétique anomal de ces leptons par rapport aux prédictions de l'équation de Dirac s'explique en gros par le fait que ces particules sont continuellement en train d'interagir avec un nuagenuage de particules chargés virtuelles apparaissant et disparaissant sans cesse autour d'elle et dont les effets sont décrits par les diagrammes de Feynmandiagrammes de Feynman (montrés dans la vidéo ci-dessus). Les années passant, et avec la découverte de l'existence de nouvelles particules chargées comme les bosons W ou les quarks, les calculs se sont affinés au point d'être spectaculairement confirmés à au moins 10 décimales avec l'électron, ce qui fait de la QED la théorie physique la plus précise et la mieux vérifiée.


    Les tests expérimentaux de la QED. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © Fermilab

    L'accord, bien que remarquable, n'est donc pas aussi bon dans le cas du muon et c'est pourquoi on a été tenté de supposer l'existence d'autres particules relevant d'une nouvelle physique dans le nuage de particules virtuelles en interaction avec le muon. Actuellement, la communauté scientifique est quelque peu en effervescence car un groupe de chercheurs japonais a publié sur arXiv trois articles suggérant qu'il fallait en fait réaliser les calculs de QED en écrivant l'équation de Dirac en espace-tempsespace-temps courbe.

    Les expériences réalisées pour mesurer le moment magnétique des muons, depuis par exemple celle du CernCern avec l'accélérateur PSPS (proton synchrotron) au début des années 1960, à laquelle avait participé le prix Nobel de physique Georges Charpak, jusqu'à celle du Brookhaven National Laboratory (E82) à la fin des années 1999, souffriraient donc d'un même biais : la non prise en compte du champ de gravitation de la Terre dans les calculs théoriques.

    Cependant, la situation reste confuse car il semblerait que ces physiciens aient commis des erreurs dans leurs calculs. C'est du moins l'avis de Matt Visser, un expert bien connu de la théorie des champs en espace-temps courbe et de son applicationapplication aux trous de ver.