La théorie des trous noirs nous dit que parfois ils s'entourent d'un disque de matière chauffée fortement et qu'ils rayonnent donc de ce point de vue. On doit pouvoir observer une sorte d'ombre, si l'on peut dire, de l'horizon des événements d'un trou noir qui, lui, ne rayonne pas, sur une image suffisamment agrandie et résolue montrant le disque d'accrétion. C'est bien ce qu'ont fait les membres de la collaboration EHT avec le trou noir M87* et aujourd'hui avec le trou noir supermassif de notre Voie lactée dont ils révèlent pour la première fois l'image.


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    Il y a environ 3,5 millions d'années, le trou noir supermassif de la Voie lactée serait entré brusquement en activité en accrétant un nuagenuage de gaz contenant l'équivalent de 100.000 masses solaires. L'éruption cosmique résultante aurait illuminé de la matière galactique pendant presque un million d'années, matière bien visible pour les hominines de l'époque, dont certains sont les ancêtres du genre HomoHomo, avant de disparaître de leur regard.

    Pendant longtemps, les Homo sapiensHomo sapiens n'ont donc, a fortiori, pas soupçonné la présence dans notre GalaxieGalaxie d'un astreastre compact donnant une illustration extrême de la physiquephysique de l'espace-tempsespace-temps courbe découvert il y a plus d'un siècle par EinsteinEinstein. Et l'on est donc songeur devant la capacité qui est aujourd'hui offerte à la noosphère, non seulement de comprendre cette physique mais aussi de la contempler en action avec la première image de ce trou noir supermassif qui semble bel et bien être derrière la source radio baptisée Sgr A*, et que nous révèlent aujourd'hui les près de 300 membres de la collaboration mondiale  Event Horizon Telescope (EHT), appartenant à des pays d'Afrique, d'Asie, d'Europe, d'Amérique du Nord et du Sud.

    Cette image, en fausses couleurscouleurs, prise dans le domaine radio, a été rendue possible à partir des observations d'un réseau lui aussi mondial de radiotélescopesradiotélescopes, tel l'Atacama Large Millimeter/submillimeter Array (Alma) au Chili, dont les pouvoirs de résolutionrésolution ont été combinés grâce au développement de l'interférométrieinterférométrie à très longue base (ou VLBIVLBI pour Very Long Baseline Interferometry). Cela a ainsi permis aux astrophysiciensastrophysiciens de disposer d'un radiotélescope virtuel de la taille de la Terre qui, s'il opérait dans le domaine visible, pourrait former une image claire d'un donut à la surface de la LuneLune.

    Cette image montre l'<em>Atacama Large Millimeter/submillimeter Array</em> (Alma) regardant la Voie lactée ainsi que l'emplacement de Sagittarius A*, le trou noir supermassif au centre de notre Galaxie. L'image de Sagittarius A* prise par la collaboration de l'<em>Event Horizon Telescope</em> (EHT) est mise en évidence dans l'encadré. Situé dans le désert d'Atacama au Chili, Alma est le plus sensible de tous les observatoires du réseau EHT. L'ESO est copropriétaire d'Alma au nom de ses États membres européens. © ESO, José Francisco Salgado (josefrancisco.org), EHT Collaboration
    Cette image montre l'Atacama Large Millimeter/submillimeter Array (Alma) regardant la Voie lactée ainsi que l'emplacement de Sagittarius A*, le trou noir supermassif au centre de notre Galaxie. L'image de Sagittarius A* prise par la collaboration de l'Event Horizon Telescope (EHT) est mise en évidence dans l'encadré. Situé dans le désert d'Atacama au Chili, Alma est le plus sensible de tous les observatoires du réseau EHT. L'ESO est copropriétaire d'Alma au nom de ses États membres européens. © ESO, José Francisco Salgado (josefrancisco.org), EHT Collaboration

    Comme Futura l'avait expliqué dans le précédent article ci-dessous, l'EHT avait déjà permis d'obtenir une image du trou noir supermassif de la galaxie elliptiquegalaxie elliptique géante M87, bien connue notamment pour ses jets de matière relativistes dus à une accrétionaccrétion massive de matière. Le trou noir central de la Voie lactée se trouve lui dans une galaxie spiralegalaxie spirale et il est nettement moins actif. Toutefois, on s'attendait à faire des observations comparables avec les mêmes buts, en particulier renforcer les preuves de l'existence de vrais trous noirs et disposer d'un laboratoire pour tester des alternatives à la théorie de la relativité généralerelativité générale d'Einstein, et plus généralement peut-être certaines théories sur la matière noirematière noire et la gravitation quantiquegravitation quantique.

    Tout ce que nous avions expliqué précédemment dans cet article ainsi que le contenu des vidéos qu'il présente est donc pertinent pour comprendre en détail ce que les chercheurs de l'EHT ont expliqué dans la conférence en direct que l'on pouvait suivre sur YouTubeYouTube. On dispose aussi aujourd'hui de nombreux communiqués l'accompagnant, comme celui de l'Observatoire européen austral (ESOESO) ou encore un article dans le Journal du CNRS.

    Les astrophysiciens nous y expliquent notamment que la masse du trou noir déduite de la détermination de la taille de l'ombre du trou noir que nous supposons être à l'origine de Sgr A* est parfaitement compatible avec celle déduite depuis une vingtaine d'années de l'étude des mouvementsmouvements de certaines étoilesétoiles proches de lui en utilisant les lois de la relativité générale d'Einstein (cette détermination avait été à l'origine de l'attribution du prix Nobel de physique à Andrea Ghez et Reinhard Genzel).


    Regardez cette séquence vidéo qui fait un zoom sur le trou noir (Sgr A*) au centre de notre Galaxie. Après une vue d'ensemble de la Voie lactée, nous plongeons dans les nuages denses de gaz et de poussière du centre de notre Galaxie. Les étoiles qui s'y trouvent ont été observées par le Very Large Telescope de l'ESO et l'interféromètre du Very Large Telescope de l'ESO pendant des décennies, l'immense attraction gravitationnelle du trou noir déformant les orbites des étoiles les plus proches de lui. Enfin, nous arrivons à Sgr A*, dont la première image a été obtenue. Le trou noir est représenté par une région centrale sombre appelée ombre, entourée d'un anneau de gaz chaud et lumineux. Les diverses observations utilisées ici ont été prises à des moments différents, par des équipes différentes et avec des installations différentes, et rassemblées pour les besoins de l'effet de zoom. Les images vont des longueurs d'onde visibles au début jusqu'à l'infrarouge, la toute dernière image étant prise aux longueurs d'onde radio. © ESO, L. Calçada, N. Risinger (skysurvey.org), DSS, Vista, VVV Survey/D. Minniti DSS, Nogueras-Lara et al., Schoedel, NACO, Gravity Collaboration, EHT Collaboration (Music: Azul Cobalto)

    La conférence du 12 mai 2022 en direct. © European Southern Observatory (ESO)

    « Nous avons été stupéfaits de voir à quel point la taille de l'anneau correspondait aux prédictions de la théorie de la relativité générale d'Einstein, explique ainsi dans le communiqué de l'ESO le responsable actuel de la collaboration EHT, Geoffrey Bower, de l'Institut d'astronomie et d'astrophysiqueastrophysique, Academia Sinica, Taipei. Ces observations sans précédent ont considérablement amélioré notre compréhension de ce qui se passe au centre même de notre Galaxie, et offrent de nouvelles perspectives sur la façon dont ces trous noirs géants interagissent avec leur environnement. »

    Le communiqué contient aussi une explication de la raison pour laquelle il n'a pas été possible de former l'image de Sgr A* aussi vite qu'on le pensait contrairement au cas du trou noir M87*M87*, comme Futura l'expliquait dans le précédent article. « Le gaz à proximité des trous noirs se déplace à la même vitessevitesse - presque aussi vite que la lumièrelumière - autour de Sgr A* et de M87*. Mais alors que le gaz met des jours, voire des semaines, à décrire une orbiteorbite autour du grand M87*, il ne met que quelques minutes à le faire autour de Sgr A*, beaucoup plus petit. Cela signifie que la luminositéluminosité et la configuration du gaz autour de Sgr A* changeaient rapidement pendant que la collaboration EHT l'observait - un peu comme si l'on essayait de prendre une photo claire d'un chiot qui court après sa queue », précise Chi-kwan (CK) Chan, de l'observatoire Steward, du département d'astronomie et de l'Institut des sciences des données de l'université d'Arizona (États-Unis).

    Il a donc fallu mettre au point des techniques de traitement d'images adaptées et les utiliser en complément, comme dans le cas de M87*, de savants calculs menés avec des superordinateurssuperordinateurs et permettant de faire des comparaisons avec des trous noirs simulés également sur ces machines.

    Au final, la théorie de la relativité générale et celle des trous noirs qui en est déduite en sortent renforcées même si le dernier mot n'a pas encore été dit. On pourra consulter les articles techniques mis en ligne en accès libre sur ce sujet ci-dessous.

    Comme Futura l'avait expliqué, c'est bel et bien Jean-Pierre LuminetJean-Pierre Luminet qui avait été le premier à modéliser sur ordinateurordinateur l'aspect que pourrait avoir un trou noir entouré d'un disque d'accrétiondisque d'accrétion chaud et il vient de faire ses premiers commentaires sur l'image de Sgr A*, commentaires que nous reprenons.

    Comparaison de la taille des deux trous noirs imagés par la collaboration <em>Event Horizon Telescope</em> (EHT) : M87*, au cœur de la galaxie Messier 87, et <em>Sagittarius A*</em> (Sgr A*), au centre de la Voie lactée. L'image montre l'échelle de Sgr A* par rapport à M87* et à d'autres éléments du Système solaire tels que les orbites de Pluton et de Mercure. Le diamètre du Soleil et la position actuelle de la sonde spatiale <em>Voyager 1</em>, le vaisseau spatial le plus éloigné de la Terre, sont également affichés. M87*, qui se trouve à 55 millions d'années-lumière, est l'un des plus grands trous noirs connus. Alors que Sgr A*, situé à 27.000 années-lumière, a une masse d'environ quatre millions de fois celle du Soleil, M87* pèse six cents fois ce chiffre. En raison de leur distance relative à la Terre, les deux trous noirs semblent avoir la même taille dans le ciel. © EHT collaboration (Lia Medeiros, xkcd)
    Comparaison de la taille des deux trous noirs imagés par la collaboration Event Horizon Telescope (EHT) : M87*, au cœur de la galaxie Messier 87, et Sagittarius A* (Sgr A*), au centre de la Voie lactée. L'image montre l'échelle de Sgr A* par rapport à M87* et à d'autres éléments du Système solaire tels que les orbites de Pluton et de Mercure. Le diamètre du Soleil et la position actuelle de la sonde spatiale Voyager 1, le vaisseau spatial le plus éloigné de la Terre, sont également affichés. M87*, qui se trouve à 55 millions d'années-lumière, est l'un des plus grands trous noirs connus. Alors que Sgr A*, situé à 27.000 années-lumière, a une masse d'environ quatre millions de fois celle du Soleil, M87* pèse six cents fois ce chiffre. En raison de leur distance relative à la Terre, les deux trous noirs semblent avoir la même taille dans le ciel. © EHT collaboration (Lia Medeiros, xkcd)

    Voici donc les commentaires de Jean-Pierre Luminet :

    1/ Ce n'est pas une annonce aussi sensationnelle que cela, dans la mesure où l'image ressemble énormément à celle déjà obtenue en 2019 avec M87*, bien qu'à des échelles de masses et de tailles très différentes (SgrA* est 1.500 fois moins massif, donc plus petit, que M87*). Cela confirme d'une part (mais le contraire eût été très étonnant !) que les lois de la relativité générale décrivent correctement les environnements de trous noirs indépendamment de leur taille (je parle évidemment des trous noirs astrophysiques, pas des hypothétiques micro-trous noirs primordiaux qui, eux, pourraient s'évaporer par effet quantique). Et plus encore ce que j'écrivais à la fin de mon article de 1979 concluant mes simulations numériquessimulations numériques : « Figures 9-11 are valid for a large number of black hole situations, i.e. black holes with any mass accreting matter at any raterate sufficiently far below the Eddington limit. Thus our picture could represent many relatively weak sources. »

    Le taux d'accrétion (masse de gaz absorbée par unité de temps) de SgrA* est en effet très faible, très en dessous du taux maximal (limite d'Eddingtonlimite d'Eddington), ce qui était aussi le cas de M87*.

    2/ Contrairement à ce que certains espéraient, il n'y a pas de vidéo ni de time lapsetime lapse : pour cela il faudra au moins attendre les résultats de la deuxième campagne d'observations qui a eu lieu en mars 2022, soit pas avant 2024.


    Une simulation numérique basée sur des calculs de la relativité générale de l'aspect d'un trou noir entouré d'un disque d'accrétion chaud. Elle a été réalisée par l'astrophysicien Jean-Alain Marck en 1991. Extrait du documentaire « Infiniment courbe ». Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © Auteurs : Laure Delesalle, Marc Lachieze-Rey, Jean Pierre Luminet. Réalisateur : Laure Delesalle. Production : CNRS-Arte, France (1994)

    3/ Le système est vu encore plus de face que M87* (c'est-à-dire un angle de vue polaire, quasiment 90° au-dessus du plan du disque. L'image est donc encore plus éloignée de celle en noir et blanc que j'avais finalisée à la main avec une inclinaison d'à peine 10° au-dessus du plan du disque (malheureusement pour ma petite gloriole !). C'est la raison pour laquelle l'effet Dopplereffet Doppler, c'est-à-dire l'amplification importante du flux lumineux apparent du côté où le gaz chaud du disque d'accrétion s'approche d'un observateur lointain, disparaît. Le montage d'images ci-dessous que je viens de réaliser le montre bien. Dans la rangée du haut, les reconstructions d'image de SgrA* à droite et de M87* à gauche. Dans la rangée du bas, les simulations faites en 1989 avec Jean-Alain Marck avec des angles de vue de 65° à gauche et de 90° à droite.

    4/ La principale différence concerne les taches chaudes. J'en déduis que la grosse tache chaude du disque de M87* est due à l'effet Doppler (similitude frappante avec la simulation numérique que j'ai mise en dessous) et non pas aux fluctuations de luminosité du disque (qui est très stable à l'échelle de M87*). En revanche, les trois taches chaudes du disque de SgrA* ne pouvant résulter de l'effet de Doppler comme expliqué plus haut (et qui effectivement n'apparaissent pas dans la simulation numérique), elles sont dues à la turbulenceturbulence intrinsèque du disque (bulles chaudes, champ magnétiquechamp magnétique, etc.), que nous n'avions évidemment pas modélisée à l'époque faute de moyens informatiques.

    Dans la rangée du haut, les reconstructions d’image de SgrA* à droite et de M87* à gauche. Dans la rangée du bas, les simulations faites en 1989 avec Jean-Alain Marck avec des angles de vue de 65° à gauche et de 90° à droite. © Luminet, ESO
    Dans la rangée du haut, les reconstructions d’image de SgrA* à droite et de M87* à gauche. Dans la rangée du bas, les simulations faites en 1989 avec Jean-Alain Marck avec des angles de vue de 65° à gauche et de 90° à droite. © Luminet, ESO
    • Principaux articles scientifiques: 

     

     


    On se souvient que le mercredi 10 avril 2019, à 15 h en France, l'équipe internationale de l'Event Horizon Telescope (EHT) dirigée par Shep Doeleman, chercheur au centre d'astrophysique Harvard-Smithsonian, avait fait la une de l'actualité mondiale en publiant l'image historique du trou noir supermassif présumé M87*. Il se trouve au centre de la grande galaxie elliptique M87 située à environ 53 millions d'années-lumièreannées-lumière de la Voie lactée.

    On s'attendait à voir également l'image du trou noir supermassif tout aussi présumé au cœur de notre Galaxie. Avec des masses respectivement de 4,3 millions et 6 à 7 milliards de masses solaires (M87*), la théorie de la relativité générale prédit pour ces astres des tailles des horizons des évènements respectivement de 12 millions et 36 milliards de kilomètres. En tenant compte des distances à la Terre, ces objets compacts ont des diamètres apparents voisins qui sont de l'ordre de celui d'une pomme ou d'une balle de golfe observée depuis la Terre sur la surface de la Lune.


    Jean-Pierre Luminet, directeur de recherche au CNRS et Françoise Combes, professeur au Collège de France, nous parlent des trous noirs, notamment des grands trous noirs supermassifs des galaxies qui sont derrière les quasars et qui impactent l'évolution des galaxies. © Fondation Hugot du Collège de France

    Rappelons que la seule chose qui définit un trou noir c'est la possibilité d'identifier les limites d'une surface close virtuelle entourant une région de l'espace-temps dont on ne peut pas s'échapper sans pouvoir dépasser la vitesse de la lumièrevitesse de la lumière, ce que la physique connue interdit. L'état de la matièreétat de la matière et de l'espace-temps sous cette surface à l'intérieur d'un trou noir est inconnu et même si la théorie de la relativité seule implique l'occurrence d'une singularité au cœur du trou noir où la courbure de l'espace-temps est infinie et la densité de matière tout autant (ce qu'a démontré le prix Nobel de physique Roger Penrose ), nous n'en savons rien. En fait, les lois de la mécanique quantique que Heisenberg et Schrödinger nous ont révélées et qui décrivent ce que l'on appelle l'écume de l'espace-temps, suggèrent fortement que rien de tel ne se produit probablement.

    Enfin, il se pourrait bien que les objets que nous prenons pour des trous noirs soient en fait des astres presque aussi compacts, se comportant donc à bien des égards comme des trous noirs d'un point de vue astrophysique, mais sans horizon des événementshorizon des événements réels, donc pas des trous noirs comme Hawking lui-même l'avait envisagé. Il pourrait s'agir de boules de supercordes, de gravastars et même de trous de ver !

    Malheureusement, ce mercredi 10 avril 2019, aucune image du trou noir supermassif de la Voie lactée associé à la fameuse source radio Sagittarius A* (Sgr A* en abrégé), n'avait été montrée car les données collectées par le réseau international de radiotélescopes permettant d'obtenir un instrument virtuel presque de la taille de la Terre pour atteindre le pouvoir de résolution nécessaire aux observations s'étaient révélées plus difficiles à traiter que prévu. Les chercheurs de la collaboration EHT ont cependant continué tout à la fois de prendre de nouvelles données et d'améliorer leur traitement.

    Inutile de dire donc que depuis plus d'une semaine la tension monte suite à une annonce qui nous promet du nouveau concernant Sgr A*.

    Il s'agissait d'un communiqué conjoint de European Southern Observatory (ESO) et de l'Event Horizon Telescope (EHT) expliquant que le 12 mai 2022, grâce au village global et du WWW, il y aura en ligne une conférence à ce sujet que l'on pourra suivre en direct à partir de 15 h 00 en France. ssssssss


    Comment les chercheurs du télescope IRAM 30m ont capturé la toute première image d'un trou noir en 2017. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © IRAM

    En prélude à cette conférence et pour tenter d'imaginer son contenu, rappelons ce que Shep Doeleman avait expliqué en 2019 à l'AFP : « Pendant des années, je disais aux gens que nous allions obtenir l'image d'un trou noir et ils me répondaient qu'ils me croiraient quand ils la verraient. La communauté scientifique exprimait un certain degré de scepticisme, ce qui est normal. Quand on obtient enfin la preuve, quand on réussit une telle percée, on ressent vraiment la satisfaction d'avoir donné naissance à un nouveau champ de recherche, continue-t-il. Nous sommes désormais dans l'ère des images de haute précision des trous noirs. Nous pouvons faire des cartes de l'espace-temps pour la première fois ». Mieux, selon l'astrophysicien, déjà à cette époque, ses collègues travaillaient à produire une vidéo à partir des montagnes de données enregistrées. « D'ici la fin de la prochaine décennie, nous ferons des films de haute qualité et en temps réel de trous noirs qui révèleront non seulement leur apparence mais aussi leur comportement sur la scène cosmique », assurait Shep Doeleman.

    Il expliquait aussi que c'est précisément en raison de l'accrétion très dynamique et turbulente de la matière sur le trou noir central de la Voie lactée que l'on n'avait pas encore eu une image de Sgr A*. Mais cela veut dire aussi très précisément que l'on devrait obtenir des images montrant une évolution claire dans le temps. « Il faut environ un mois pour que la matière circule autour de M87*. Mais pour Sagittarius A*Sagittarius A*, elle ne met qu'une demi-heure. En une nuit d'observation, Sgr A* peut changer devant nous », avait-il ajouté, en expliquant également que : « Il est possible que nous fassions un premier film assez brut. Idéalement, il faudrait plus de télescopestélescopes, sur Terre ou en orbite terrestre, pour augmenter la résolution. Mais nous raffinerons cela avec le temps. Ce sera peut-être comme les premiers films du cinéma ».

    Rappelons enfin que c'est l'astrophysicien et cosmologiste français Jean-Pierre Luminet, comme il l'a expliqué à plusieurs reprises et avec de nombreux détails sur les versions française et anglaise du blogblog que Futura a mis à sa disposition, qui a été le premier à la fin des années 1970 à calculer sur ordinateur l'aspect visuel d'un trou noir entouré d'un disque d'accrétion. Avec son collègue Jean-Alain Marck, il a ensuite réalisé des simulations montrant sous plusieurs angles l'aspect d'un tel objet et on peut donc penser que l'on pourra faire des comparaisons entre M87* et Sgr A* qui ne devraient pas se présenter sous la même orientation aux yeuxyeux de la noosphère.

    Les membres de la collaboration EHT pourraient donc nous surprendre demain avec des images époustouflantes de Sgr A*. On peut raisonnablement s'attendre aussi à des contraintes nouvelles sur de la nouvelle physique qui pourrait remplacer la théorie de la relativité d'Einstein et bien sûr également sur l'existence ou non d'un horizon des événements.


    On peut estimer la masse du trou noir M87* en étudiant les mouvements des étoiles autour de lui. Une solution des équations d'Einstein avec la masse de M87* implique une image et une taille données pour l'ombre de l'horizon des événements d'un trou noir. Des théories de la gravitation alternatives avec en plus des sortes de charges électriques exotiques impliquent des images différentes avec des tailles d'horizon des événements plus petites, comme l'explique cette vidéo. L'EHT permet donc de tester de nouvelles théories de la gravitation et l'existence de trous noirs exotiques. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © BlackHoleCam

    La théorie de la relativité générale d'Einstein n'est en effet pas la seule possible compatible avec la théorie de la relativité restreinterelativité restreinte et basée sur la possibilité d'une courbure de l'espace-temps. Des équationséquations différentes se réduisant à celles d'Einstein dans certaines situations tout comme ce fut le cas pour les équations de NewtonNewton qui sont des cas limites de celles d'Einstein sont en effet envisagées et étudiés depuis plus de 50 ans comme les fameuses théories tenseur-scalaire. 

    Invalider la théorie d'Einstein au profit de ces variantes pourrait nous donner des clés pour résoudre les énigmes en rapport avec la matière noire et l'énergie noireénergie noire. Inversement, on pense que les trous noirs supermassifstrous noirs supermassifs doivent posséder une géométrie de l'espace-temps externe qui est celle d'un trou noir de Kerr en rotation. Cela implique des mouvements bien précis pour la matière et des trajectoires qui le sont tout autant pour les rayons lumineux qui sont produits par la matière chauffée d'un disque d'accrétion autour de certains trous noirs.

    Si l'accord est suffisamment bon entre les prédictions de la théorie d'Einstein pour un trou noir de Kerrtrou noir de Kerr et les nouvelles observations qu'ont réalisées les membres de la collaboration EHT, alors il pourrait conduire à réfuter des alternatives exotiques et plutôt peu crédibles à la théorie des trous noirs.

    On peut se faire une idée de la manière dont les observations de Sgr A* peuvent conduire à des explorations des théories alternatives à celle d'Einstein et aux solutions de leurs équations décrivant des alternatives à celles de la relativité générale d'Einstein en consultant la vidéo ci-desuus qui parlait déjà de ces tests effectués avec l'EHT, mais pour M87*.

    Pour se rafraîchir la mémoire au sujet du réseau mondial de radiotélescopes de l'EHT et ce qu'il permet d'observer pour ce que l'on appelle l'ombre (shadow, en anglais) d'un trou noir, on pourra consulter la vidéo ci-dessous.

    Une longue présentation de la découverte faite avec l'Event Horizon Telescope en 2019. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © European Southern Observatory (ESO)