Lundi 7 mars 2005, le premier aimant dipolaire supraconducteur du plus grand accélérateur de particules au monde, le Large hadron collider (LHC), a été installé dans le tunnel du Cern1. Cette étape marque le début de l'agencement de cet instrument unique au monde auquel le CEA est associé.

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    Enceinte du détecteur CMS, un des détecteurs qui servira au LHCCrédit : © CEA/Dapnia

    Enceinte du détecteur CMS, un des détecteurs qui servira au LHCCrédit : © CEA/Dapnia

    Le LHC est un collisionneur proton-proton de 27 km de circonférence, qui nécessite 1232 aimants dipolaires (15 m de long et 8.3 T) pour guider les faisceaux de particules, et de l'ordre de 400 aimants quadripolaires (3 m de long et 225 T/m) pour les focaliser. Il a pour objectif de répondre aux questions que pose le modèle standard2 et tenter de découvrir le cadre plus général dans lequel il s'inscrit. A partir de 2007, année de sa mise en service, il permettra notamment de "traquer" le (ou les) boson de Higgs ou de découvrir de nouvelles particules, envisagées par la théorie, mais jusque là jamais encore observées.

    Des aimants supraconducteurs à 50 m sous terre

    Lundi 7 mars, à 14h, les équipes du groupe TS-IC (Coordination de l'Installation) ont descendu un aimant supraconducteursupraconducteur dipôle dans le tunnel du LHC. A 23h, l'aimant de 15 mètres de long et de 35 tonnes était positionné à son emplacement définitif, entre le Point 8 et le Point 1 du tunnel. C'est le premier des 1232 dipôles à être ainsi positionné.

    Image du site Futura Sciences

    L'installation du coeur de la machine démarre donc. Outre ces aimants dipôles principaux, des centaines d'autres aimants, plus petits, sont aussi à installer. Ce sont au total quelque 1800 ensembles magnétiques que le groupe TS-IC devra placer dans le tunnel, avant leur positionnement précis et leur raccordement.

    Ces précieux convois empruntent tous le même chemin. Les aimants sont descendus par le puits PMI2 de section ovale creusé à cet effet, à l'extrême ouest du site de Meyrin. Cinquante mètres plus bas, ils « atterrissent » dans le tunnel de transfert TI2. Transportés par des véhicules qui ont été spécialement développés, leur voyage souterrain vers le tunnel du LHC commence. Il peut durer plusieurs heures, les convois circulant à 3 km/h. « Ces opérations de manutention sont rendues ardues par l'étroitesse du tunnel, précise Claude Hauviller, chef du groupe TS-IC qui supervise l'installation du LHC. Il sera impossible pour deux convois de se croiser et il n'y a souvent que quelques millimètres de jeu. » Une fois l'aimant parvenu à destination, il est déplacé sur une table de transfert qui le positionne correctement.

    La descente du premier aimant coïncide avec une autre date importante pour le CERNCERN : la livraison de la moitié des aimants supraconducteurs dipôles. Le 7 mars, 616 aimants avaient été livrés. C'est un remarquable succès tant le passage de la phase des prototypes et des préséries à celle de la production à grande échelle avait été difficile.

    Une implication française forte

    Etat fondateur du Cern, la France contribue à toutes les grandes collaborations internationales de cette organisation depuis sa création. La participation française est principalement celle du Département d'astrophysiqueastrophysique, de physiquephysique des particules, de physique nucléaire et instrumentation associée (Dapnia) du CEA et de l'Institut national de physique nucléaire et de physique des particules (IN2P3) du CNRS.

    Le Dapnia, qui joue un rôle de premier plan en physique des particules, est très impliqué dans le LHC que ce soit dans la réalisation de la machine ou de celle des expériences de physique qui lui sont associées. En particulier, le Dapnia s'est vu confier le développement et le suivi de l'industrialisation des 400 aimants quadripolaires supraconducteurs3 et il collabore activement aux expériences Atlas, CMSCMS, LHCb et Alice. Rappelons également que les aimants dipolaires et quadripolaires du LHC sont refroidis à l'héliumhélium superfluide4, une technologie mise en œuvre pour la première fois à grande échelle dans le Tokamak Tore Supra du CEA Cadarache5.

    Notes :

    1 Organisation européenne pour la recherche nucléaire, le Cern comprend 20 Etats membres européens : Allemagne, Autriche, Belgique, Bulgarie, Danemark, Espagne, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Italie, Norvège, Pays-Bas, Pologne, Portugal, République slovaque, République tchèque, Royaume-Uni, Suède et Suisse. Les pays membres contribuent au capital et aux frais d'exploitation des programmes du Cern, et sont représentés au Conseil, responsable de toutes les décisions importantes concernant l'Organisation et ses activités.
    2 Le "modèle standard" est le cadre théorique de la physique des particules. Elaboré dans les années 1970, il rassemble toutes les connaissances théoriques, expérimentalement confirmées depuis, sur les constituants élémentaires de la matièrematière et sur leurs interactions, à l'exception de l'interaction gravitationnelle.
    3 Dans un accélérateur de particules, il faut pouvoir contrôler la largeur et la hauteur du faisceau de particules afin qu'il reste à l'intérieur de la chambre à vide. Ceci est réalisé par des aimants quadripolaires, qui agissent sur le faisceau comme le ferait une lentillelentille sur un faisceau de lumièrelumière, et l'empêchent de diverger.
    4 La superfluiditésuperfluidité est une propriété unique de l'hélium liquideliquide qui, refroidi en dessous d'une température de l'ordre de 2,17 K à pression atmosphériquepression atmosphérique, perd toute viscositéviscosité et devient un supraconducteur de la chaleurchaleur.
    5 Tore Supra est un réacteur expérimental de fusion nucléairefusion nucléaire qui utilise 18 bobines toroïdales supraconductrices refroidies à l'hélium superfluide pour le confinement magnétique du plasma.