Provoquer la dilatation d'un matériau en le comprimant, voilà qui paraît paradoxal. Pourtant, les muscles des céphalopodes, pieuvres et calmars, semblent bien exploiter cette étrange propriété. On cherche à la reproduire pour toutes sortes d'applications en ingénierie, par exemple des capteurs de pression ultrasensibles. Un record vient d'être battu avec le dicyanoaurate de zinc.

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    Une représentation de la molécule de dicyanoaurate de zinc, de formule Zn[Au(CN)2]2. Elle est constituée d'une sorte d'hélice en or en forme de ressort inscrite dans un cadre en nid d'abeille flexible. Les boules grises sont des atomes de carbone, celles en violet de l'azote, et le reste du zinc. Le matériau obtenu est transparent, et il présente un phénomène de compression linéaire négative géante : il se dilate quand on le comprime. © Andrew Goodwin

    Une représentation de la molécule de dicyanoaurate de zinc, de formule Zn[Au(CN)2]2. Elle est constituée d'une sorte d'hélice en or en forme de ressort inscrite dans un cadre en nid d'abeille flexible. Les boules grises sont des atomes de carbone, celles en violet de l'azote, et le reste du zinc. Le matériau obtenu est transparent, et il présente un phénomène de compression linéaire négative géante : il se dilate quand on le comprime. © Andrew Goodwin

    Un groupe de physiciensphysiciens et de chimistes menés à Oxford par Andrew Goodwin étudie depuis quelque temps des matériaux possédant une propriété singulière : ils se dilatent dans une direction quand on les comprime. Ce comportement contre-intuitif est désigné sous le terme de compression linéaire négative, ou encore negative linear compression (NLC) en anglais.

    Les biologistes ont des raisons de penser que les muscles des calmarscalmars et des pieuvres possèdent ce genre de comportement. Cela a inspiré des physiciens du solide et des ingénieurs qui aimeraient bien disposer de sortes de muscles artificiels similaires, ou réaliser des capteurscapteurs de contraintes avec des capacités nouvelles. Ils tentent donc de développer des matériaux artificiels à NLC. On est donc en présence d'un type de recherche qui relève plus ou moins de la bionique au sens exact du terme. Les tentatives pour obtenir des matériaux à NLC remontent à quelques décennies. Mais les résultats sont restés décevants jusqu'à récemment, avec des effets de l'ordre de quelques pour cent seulement dans l'effet de dilatationdilatation du matériau obtenu par compression.

    Les chercheurs d'Oxford sont en train d'obtenir de meilleurs résultats, et parlent de NLC géante. Avec des collègues français du CNRS, ils montrent dans Nature que le dicyanoaurate de zinc présente une compressibilité linéaire négative géante, qui est d'un ordre de grandeur plus élevé que la contraction observée dans les matériaux typiques utilisés pour les applications en ingénierie. Comme ce matériau est transparenttransparent, une petite variation de pressionpression entraîne un changement de la lumière qui le traverse. Selon les chercheurs, cela permet d'envisager la création de capteurs de pressioncapteurs de pression interférométrique ultrasensibles.