Le carbone, c’est un peu la colonne vertébrale de la vie. Et des chercheurs précisent aujourd’hui l’origine du carbone présent sur notre Terre. Il viendrait du milieu interstellaire.


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    Nous sommes tous faits de poussières d’étoiles, disent les poètes. Et pas que les poètes. Les scientifiques aussi. Peut-être même un peu plus encore aujourd'hui, après la publication de deux études menées par des chercheurs de l’université du Michigan et par d'autres de l'université du Minnesota (États-Unis). Ils se sont intéressés à l'un des éléments essentiels à l'apparition de la vie. Non pas l'eau, pour une fois. Mais le carbone.

    Rappelons que le carbone est, d'une part, le constituant central de toute matière organique. De la vie, donc. Et qu'il permet, d'autre part, à une Planète de réguler son climatclimat. De devenir habitable, en quelque sorte. « Du carbone, vous ne voulez pas en avoir trop peu, mais vous ne voulez pas non plus en avoir trop », souligne Edwin Bergin, astronomeastronome à l'université du Michigan, dans un communiqué.

    Le saviez-vous ?

    Avec trop de carbone, l’atmosphère de notre Terre ressemblerait à celle de Vénus, emprisonnant la chaleur du Soleil — nous savons tous désormais que le carbone est un constituant de pas mal de gaz à effet de serre — et maintenant une température de plus de 400 °C.

    Trop peu de carbone, en revanche et la Terre ressemblerait à Mars. Une planète peu hospitalière et incapable de supporter la vie à base d’eau, avec des températures autour de -60 °C.

    Jusqu'alors, les astronomes imaginaient que le carbone présent sur notre Terre provenait de molécules tourbillonnant dans le gaz de la nébuleuse qui a fini par former le Système solaireSystème solaire. « Le modèle de condensationcondensation suppose que, lors de la formation du Soleil, les éléments qui formeraient plus tard les planètes se sont vaporisés. Alors que le disque protoplanétairedisque protoplanétaire se refroidissait, ces éléments se sont condensés et ont fourni des ingrédients chimiques aux corps solidessolides. Mais cela ne fonctionne pas pour le carbone », assure Jie Li, chercheur à l'université du Michigan.

    Des travaux à transposer sur les exoplanètes

    Lorsque le carbone est vaporisé, en effet, il produit des espècesespèces beaucoup plus volatiles. Celles-ci nécessitent des températures très basses pour former des solides. Plus important encore, le carbone ne se condense pas à nouveau sous une forme organique. Pour cette raison, Jie Li et son équipe ont déduit que la majeure partie du carbone de la Terre était probablement originaire du milieu interstellaire. Et que ce carbone a dû arriver jusqu'à nous bien après que le SoleilSoleil se soit formé -- environ un million d'années après -- au moment où le disque protoplanétaire qui a donné naissance au Système soleil se refroidissait.

    Les travaux menés par les chercheurs de l'université du Minnesota remettent eux aussi en question les modèles actuels. « La plupart expliquent que le carbone -- et d'autres éléments essentiels à la vie -- passe de la nébuleuse primitive aux planétésimaux -- les précurseurs des planètes -- dans des corps rocheux », explique Marc Hirschmann. Mais, avec son équipe, il montre aujourd'hui, grâce à un examen approfondi de quelques météoritesmétéorites qui ont gardé en mémoire l'époque à laquelle se formaient les noyaux métalliques des planétésimaux, qu'une grande partie du carbone est perdue au moment où les planétésimaux fondent et forment des noyaux.

    Si les astronomes s'intéressent tant à la manière dont le carbone est arrivé sur Terre (une planète que les chercheurs de l'université du Michigan qualifient aujourd'hui de pauvre en carbone) et à la façon dont il a pu s'en échapper, c'est que cela pourrait les aider à comprendre comment et où trouver des planètes susceptibles d’abriter la vie.


    Les ingrédients à l’origine de la vie sont arrivés plus tard que prévu sur Terre

    La question de l'origine de la vie sur Terre n'est pas encore élucidée. C'est pour en apprendre un peu plus que des chercheurs ont étudié, au Groenland, les plus anciennes roches du manteau terrestremanteau terrestre. Elles semblent révéler que les ingrédients à l'origine de la vie sont arrivés sur notre planète plus tard que prévu.

    Article de Nathalie MayerNathalie Mayer paru le 16/03/2020

    Des chercheurs estiment aujourd’hui que les ingrédients à l’origine de la vie sur Terre, l’eau, le carbone et l’azote sont arrivés durant une phase tardive de formation de notre Planète. © ysbrandcosijn, Adobe Stock
    Des chercheurs estiment aujourd’hui que les ingrédients à l’origine de la vie sur Terre, l’eau, le carbone et l’azote sont arrivés durant une phase tardive de formation de notre Planète. © ysbrandcosijn, Adobe Stock

    L'eau, le carbone et l'azoteazote. Ils ont ceci de commun que ce sont des éléments indispensables au développement de la vie telle que nous la connaissons sur une planète. Et jusqu'alors, les chercheurs pensaient qu'ils étaient apparus sur Terre au tout début de sa formation. Mais des scientifiques de l'université de Cologne (Allemagne) et de l'université de Nouvelle-Galles du Sud (Australie) montrent aujourd'hui que la majeure partie de l'eau est arrivée sur notre planète alors que son processus de formation touchait à sa fin.

    Rappelons que les éléments volatils tels que l'eau sont réputés provenir des astéroïdesastéroïdes. Ceux qui voyageaient il y a quelque quatre milliards d'années dans le Système solaire et qui ont constitué notre Terre. Tout l'enjeu restait de savoir à quelle période de l'histoire de notre planète cela s'était produit.

    « Nous avons comparé la composition des plus anciennes roches du manteau terrestre -- elles datent de l'ArchéenArchéen, soit d'il y a environ 3,8 milliards d'années -- que l'on trouve au Groenland à celle des astéroïdes à partir desquels ils se sont formés et à celle du manteau terrestre que nous connaissons aujourd'hui », explique Mario Fisher-Gödde, chercheur, dans un communiqué de l’université de Cologne.

    Image du site Futura Sciences
    Dans le sud-ouest du Groenland, les roches les plus anciennes du manteau de notre Terre sont directement accessibles dans des affleurements de surface comme on en voit sur la photo du haut. Sur la photo du bas, une coupe de cette roche composée principalement d’olivine minérale. © Université de Nouvelle-Galles du Sud ; Julia van de Löcht, Université de Cologne
    Dans le sud-ouest du Groenland, les roches les plus anciennes du manteau de notre Terre sont directement accessibles dans des affleurements de surface comme on en voit sur la photo du haut. Sur la photo du bas, une coupe de cette roche composée principalement d’olivine minérale. © Université de Nouvelle-Galles du Sud ; Julia van de Löcht, Université de Cologne

    Eau, carbone et azote ne sont arrivés que tardivement

    Pour élucider ce qui s'est passé dans le temps, les chercheurs ont déterminé les abondances isotopiques d'un métalmétal très rare déjà présent dans le manteau de l'Archéen : le ruthéniumruthénium. « Ce type de métal a tendance à se combiner avec le ferfer. Par conséquent, lorsque la Terre s'est formée, le ruthénium s'est retrouvé prisonnier du noyau métallique de la planète, précise Mario Fisher-Gödde. Ainsi, si on retrouve du ruthénium dans le manteau terrestre, on peut supposer qu'il est arrivé là après la formation du noyau », poursuit Carsten Münker, professeur, dans le même communiqué.

    Et le ruthénium trouvé dans les roches du Groenland semble provenir du Système solaire interne. Probablement des mêmes objets qui ont formé MercureMercure et VénusVénus, rapportent les géologuesgéologues allemands.

    De nouvelles expéditions prévues pour étudier plus d’échantillons

    Les dernières analyses des chercheurs suggèrent donc que l'eau comme d'autres éléments volatils tels que le carbone ou l'azote sont finalement bien arrivés sur Terre très tard dans l'histoire de sa formation. À l'heure de ce que les spécialistes appellent la phase d'accrétionaccrétion tardive. Un peu surpris par ces résultats, les chercheurs prévoient déjà de nouvelles expéditions, en Inde et au Groenland, pour étudier un peu plus d'échantillons.