Il y a quelques jours, des images satellites du port de Sébastopol (Crimée) étaient rendues publiques. Les autorités y voient la preuve que des dauphins ont été postés là par l’armée russe. Mais dans quel but, exactement ? 


au sommaire


    Il y a eu des chevaux, bien sûr. Mais aussi des chiens, des pigeons, des rats, des éléphants ou encore des moutons. Tous utilisés par les hommes pour les soutenir dans leurs opérations militaires. Et aujourd'hui, l'examen d'images satellites par l'US Naval Institute (USNI) révèle que la Russie a déployé des dauphins -- des grands dauphins, des Tursiops truncatusTursiops truncatus, comme disent les scientifiques --, dans une base navale de la mer Noiremer Noire, du côté du port de Sébastopol (Crimée). C'était en février dernier. Au moment même où la fameuse « opération militaire spéciale » était lancée en Ukraine par Vladimir Poutine.

    Le saviez-vous ?

    Le premier usage de dauphins comme support de guerre serait à attribuer aux États-Unis. Pendant la guerre du Vietnam. Garth, John, Slan, Tinker et Toad auraient stationnés dans la baie de Cam Ranh. Leur mission : empêcher les plongeurs ennemis d’attaquer un quai de munitions.

    À ce jour, quatre pays auraient développé des programmes militaires reposant sur des mammifères marins — des dauphins, mais aussi des bélugas, des phoques ou des lions de mer : les États-Unis, la Russie, la Corée du Nord et Israël.

    En 2018, des satellites auraient déjà, de la même manière, montré que la Russie avait déployé des dauphins dans une base au large de Tartous, le second port de Syrie. Des pêcheurs norvégiens ont, quant à eux, observé en 2019, un bélugabéluga au comportement étonnant nageant autour de leurs bateaux. Selon eux, l'animal portait un harnais -- sur lequel il aurait été possible de fixer une caméra GoPro -- indiquant « équipement de Saint-Pétersbourg ». Il n'en a pas fallu plus pour que le béluga soit soupçonné d'espionnage.

    Mais dans quel but des enclos à dauphins ont-ils été disposés à l'entrée du port de Sébastopol cette fois ? Les experts ont plusieurs idées. Ainsi ces dauphins pourraient servir à la détection de mines -- ou d'autres objets. Grâce à l'écholocationécholocation. Des programmes d'entraînement ont été lancés par l'Union soviétique -- et les États-Unis -- pendant la guerre froide. Parce que les dauphins, bien sûr, sont de meilleurs nageurs que les humains. Et qu'ils ne souffrent pas de problèmes de décompression. Parce que les dauphins, ensuite, parviennent à détecter des objets que nos systèmes dédiés ne voient pas. Leur agilité dans l'eau leur évite également le plus souvent de déclencher accidentellement les mines recherchées.

    En attendant les drones sous-marins

    Ces dauphins pourraient aussi servir de « chienschiens de garde de la mer ». Ils pourraient patrouiller pour repérer des intrus. Et même, assurent certains, être entraînés à... tuer des plongeurs humains ! De quoi empêcher donc des forces d'opération ennemies de s'infiltrer dans le port pour saboter les navires qui y sont stationnés.

    Rappelons que la base de Sébastopol est particulièrement importante pour la Russie. Du fait de sa proximité à la Crimée, annexée par le pays en 2014. De nombreux navires y sont ancrés, hors de portée des missiles ukrainiens. Mais pas hors de portée d'éventuelles opérations de sabotage sous-marinsous-marin.

    C'est dans ce même port que les Soviétiques avaient entraîné leurs dauphins à la détection de mines pendant la guerre froide. Au moment de la chute de l’URSS, au début des années 1990, les unités de mammifèresmammifères marins étaient passées sous contrôle... ukrainien. Lorsque la Russie a « récupéré » la Crimée, elle s'est aussi réapproprié les dauphins. Et a renforcé son programme sur les mammifères marins. Même si des programmes de développement de drones sous-marins sont menés en parallèle. Ainsi, la technologie a déjà progressé. Pourtant, selon les experts militaires, « il reste encore aujourd'hui difficile de lutter contre des centaines de milliers d'années d'évolution ».