Jupiter tourne en seulement dix heures sur elle-même, ce qui semble spectaculairement rapide pour sa taille mais c'est anormalement lent selon les scénarios expliquant sa formation. Une théorie vient d'être proposée pour résoudre cette énigme : comme le jeune Soleil (et d'autres étoiles), la géante aurait vu sa rotation freinée par des champs magnétiques.

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    L'astronomeastronome Konstantin Batygin, connu pour ses travaux sur la possible existence d'une neuvième planète dans le Système solaire, vient à nouveau de faire parler de lui avec une publication sur arXiv. Il propose une solution à l'énigme de la vitesse de rotationvitesse de rotation anormale de JupiterJupiter, qui concerne aussi SaturneSaturne et d'autres exoplanètes. Tous ces corps célestes tournent plus lentement sur eux-mêmes que ne le laissent prévoir les modèles de formation.

    Les astrophysiciensastrophysiciens et les astronomes avaient rencontré un problème similaire avec le Soleil il y a plus d'un siècle et cela avait contribué à l'abandon temporaire de la théorie de la nébuleuse protoplanétaire de Kant-Laplace. En effet, cette lenteur semble contredire la loi de la conservation du moment cinétique, relié à la vitesse de rotation et au moment d'inertieinertie d'un corps.

    La théorie de Kant-Laplace suppose que le Soleil et les planètes se sont formés par effondrementeffondrement gravitationnel d'un nuagenuage de gazgaz et de poussière grossièrement sphérique et en rotation lente. De même que la rotation d'une patineuse accélère lorsqu'elle approche les bras de son corps, à cause de la conservation du moment cinétique, la vitesse du nuage se contractant a dû augmenter. Le Soleil, représentant la majorité de la matièrematière de la nébuleuse, devrait tourner très rapidement sur lui-même pour retenir l'essentiel du moment cinétique du Système solaire. Or, ce n'est pas le cas : il n'en contient que 1 %. Les planètes, en particulier Jupiter et Saturne, du fait de leur orbiteorbite autour du Soleil, représentent donc 99 % du moment cinétique.

    Le prix Nobel de physique Hannes Alfvén. © DP

    Le prix Nobel de physique Hannes Alfvén. © DP

    Jupiter, tout comme Saturne, aurait commencé à se former par accrétionaccrétion de petits corps rocheux et surtout glacés, créant un noyau solidesolide contenant plusieurs fois la massemasse de la Terre. Puis, assez rapidement, est intervenue une phase d'effondrement rapide du gaz, composé majoritairement d'hydrogènehydrogène et d'héliumhélium. Ce qui a conduit aux deux géantes gazeusesgéantes gazeuses que l'on connaît. Les calculs indiquent que cette formation aurait duré quelques millions d'années tout au plus mais aussi que la vitesse de rotation de ces planètes aurait dû être la vitesse limite au-delà de laquelle la force centrifugeforce centrifuge est supérieure à la force de gravitationforce de gravitation.

    Jupiter devrait donc tourner sur elle-même en un peu moins de trois heures et Saturne en quatre heures environ. Ce n'est pas le cas : les vitesses de rotation sont respectivement de dix et onze heures.

    Un freinage magnétique ralentirait les étoiles et les planètes

    Le problème semble être résolu pour le Soleil et les étoilesétoiles, après la découverte de jets de matière des jeunes étoiles T-Tauri et aussi en faisant intervenir des forces de freinage magnétique, comme l'a proposé dès les années 1940 le prix Nobel de physiquephysique Hannes Alfvén. Le disque protoplanétairedisque protoplanétaire initial était en effet suffisamment chaud et proche du jeune Soleil pour que la matière soit ionisée, formant un plasma abritant un champ magnétiquechamp magnétique.

    Les lignes de ce champ auraient couplé la rotation du Soleil au disque, lequel aurait agi comme un frein. L'éjection de matière, le long des jets et par le vent solairevent solaire, aurait emporté au loin une partie du moment cinétique, ralentissant le proto-Soleil. Dans l'analogieanalogie de la patineuse, ce transport de matière et du moment cinétique qui l'accompagne est semblable à un mouvementmouvement d'extension des bras, qui la ralentit.

    Un schéma expliquant le mécanisme de freinage de la rotation de Jupiter proposé par Konstantin Batygin. Voir les explications dans le texte ci-dessous. © James Keane

    Un schéma expliquant le mécanisme de freinage de la rotation de Jupiter proposé par Konstantin Batygin. Voir les explications dans le texte ci-dessous. © James Keane

    Il n'était pas évident d'appliquer le même mécanisme au cas de la jeune Jupiter en formation puisqu'elle ne devait générer ni l'équivalent du vent solaire et ni de jets de matière. Mais l'article de Konstantin Batygin esquisse des raisonnements et des calculs analytiques en ce sens, qui demanderaient tout de même à être confirmés et précisés par des simulations numériquessimulations numériques basées sur la magnétohydrodynamique, la théorie de la mécanique des fluides chargés.

    Dans le scénario proposé par Batygin, déjà en partie soutenu par des simulations numériques, la proto-Jupiter accrèterait de la matière dans le disque protoplanétaire froid (en bleu) via des courants de matière tombant sur les pôles comme le montre le schéma ci-dessus. Une partie de cette matière est absorbée par Jupiter mais une autre forme un second disque d'accrétiondisque d'accrétion, chaud et ionisé, autour de la géante (le disque orange). Le mécanisme de freinage magnétique d'Alfvén peut alors opérer dans ce disque parce que de la matière y est transportée vers l'extérieur, retournant donc au disque protoplanétaire du Soleil. Finalement, ce transport de moment cinétique fait baisser la vitesse de rotation acquise initialement par Jupiter.

    Si Batygin a raison, le mystère de la rotation de Jupiter et des exoplanètes joviennes est résolu.