Les méthodes utilisées pour classer les êtres vivants ne servent pas qu’aux biologistes. Pour preuve, un anthropologue britannique les a exploitées pour retrouver l’origine du petit chaperon rouge ! Le débat est clos, il trouve ses racines en Europe, dans le conte Le loup et les sept chevreaux.

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    Reconstruire l'évolution d'un conte, c'est « faire le travail d'un biologiste qui montre par exemple que les humains et les grands singes partagent un ancêtre commun, mais ont évolué dans des espècesespèces distinctes », explique l'anthropologue britannique Jamie Tehrani, de l'université de Durham, au Royaume-Uni. Son étude, publiée mercredi dans la revue scientifique américaine Plos One, retrace la genèse et le cheminement dans le temps et les lieux de contes et croyances populaires pour apporter un nouvel éclairage sur les mouvements de populations dans l'histoire humaine.

    Cette étude révèle que Le loup et les sept chevreaux remonte probablement au Ier siècle de l'ère chrétienne, et qu'il a donné naissance 1.000 ans plus tard à une variante devenue Le petit chaperon rouge. Le loup et les sept chevreaux, populaire en Europe et au Proche-Orient, est l'histoire d'un loup déguisé en « mère chèvre » pour dévorer ses petits. Dans Le petit chaperon rouge, le loup mange une petite fille après avoir pris l'apparence de sa grand-mère.

    Le petit chaperon rouge figurait dans les ouvrages des frères Grimm publiés au XIXe siècle. Cette version était basée sur celle écrite au XVIIe siècle par le français Charles Perrault. Celui-ci s'était inspiré d'un conte plus ancien transmis par la tradition orale en France et en Autriche. Il en existe de nombreuses variantes en Afrique et en Asie, comme Le tigretigre grand-mère au Japon, en Chine et en Corée.

    Illustration de Karl Fahringer inspirée du conte <em>Le loup et les sept chevreaux</em>, qui aurait inspiré<em> Le petit chaperon rouge. ©</em> Karl Fahringer, Wikimedia Common, DP

    Illustration de Karl Fahringer inspirée du conte Le loup et les sept chevreaux, qui aurait inspiré Le petit chaperon rouge. © Karl Fahringer, Wikimedia Common, DP

    Un conte transmit oralement en Europe, puis en Chine

    Pour retrouver les origines du conte, Jamie Tehrani a soumis 58 variantes à une analyse phylogénétique, une méthode mathématique utilisée par les biologistes pour la classification des êtres vivants qui permet d'établir le degré de parenté entre les espèces et de comprendre leur évolution. L'analyse s'est concentrée sur 72 scénarios en fonction de différents protagonistes comme le loup, l'ogre, le tigre ou d'autres créatures et les ruses utilisées pour berner les victimes, ainsi que le sort de ces dernières.

    Cette étude a aussi permis de démentir une théorie répandue selon laquelle la version la plus ancienne du Petit chaperon rouge était née dans la tradition orale chinoise avant de se répandre en Occident par la route de la soie. « Ma recherche montre l'opposé, à savoir que la version chinoise est dérivée des traditions orales européennes, affirme le chercheur. Les Chinois ont en fait mélangé Le petit chaperon rouge, Le loup et les sept chevreaux et des contes du folklore local pour créer une nouvelle version hybridehybride. »