Des chercheurs ont réussi à révéler ce qui se cachait sous l’un des cinq manuscrits rescapés des Mixtèques, cette civilisation précolombienne. Les pictogrammes offrent un rare témoignage qui pourrait se révéler très précieux pour l’interprétation des vestiges archéologiques du sud du Mexique.

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    Des chercheurs néerlandais et britanniques ont récemment fait une découverte extraordinaire dans la bibliothèque Bodleian, au Royaume-Uni. Ils ont révélé que le Codex Selden, aussi appelé Codex Añute, est un palimpseste, c'est-à-dire un parchemin manuscrit dont on a effacé la première écriture afin d'écrire un nouveau texte.

    Depuis les années 1950, après que sa surface fut légèrement grattée et qu'une image se devinait, il y avait une forte présomption. Cette fois, grâce aux techniques d'imagerie hyperspectrale employées, les chercheurs ont pu découvrir le manuscrit plus ancien qui se cachait en dessous depuis plus de cinq siècles.

    Achevé en 1560, ce manuscrit narrant la généalogie de la dynastie Jaltepec, entre le Xe et le XVIe siècle, est un des rares témoignages de la culture mixtèque (se prononce « Michtèque ») qui ai survécu aux flammes des autodafés espagnols, après leur arrivée dans le sud du Mexique, aujourd'hui région d'Oaxaca, berceau de cette grande civilisation. C'est l'un des 20 codex restants pour toutes les civilisations du Mexique ancien et l'un des cinq seulement issus du peuple mixtèque, dont le nom en nahuatl signifie « territoire du peuple des nuagesnuages ».

    Pictogrammes du manuscrit plus ancien révélés grâce à l’imagerie hyperspectrale. © Ludo Snijders <em>et al.</em>

    Pictogrammes du manuscrit plus ancien révélés grâce à l’imagerie hyperspectrale. © Ludo Snijders et al.

    Qu’y a-t-il sous le manuscrit le plus récent du Codex Selden ?

    Le codex, qui devint la propriété de John Selden au XVIIe siècle, et dont il conserve l'appellation, est une bande en peau de cerf de cinq mètres de long comprenant 20 pages pliées en accordéon. Les pictogrammes qui composent le récit le plus récent sont dessinés et peints sur l'enduit de gessogesso qui le recouvre.

    « Après quatre ou cinq années à essayer différentes techniques, nous avons enfin été en mesure de révéler une abondance d'images sans endommager pour autant cet objet extrêmement vulnérable », a déclaré Ludo Snijders, de l'université de Leiden, qui a codirigé ces recherches publiées dans la revue Journal of Archaeological Science : Reports. C'est la première fois qu'un palimpseste est mis en évidence dans un codex mexicain.

    Le récit qu'ils ont déchiffré en dessous, qui est donc plus ancien, se distingue des autres connus : « La généalogie que nous voyons semble être unique, ce qui signifie qu'il pourrait se révéler très précieux pour l'interprétation des vestiges archéologiques du sud du Mexique ».

    Pour l'instant, de tout ce qui a été analysé, plusieurs scènes rappellent celles figurant dans les autres manuscrits : une assemblée de 20 personnes assises et regardant dans la même direction (un roi et ses sujets ?). Cependant, dans ce cas, contrairement aux autres manuscrits, il y a des hommes et des femmes. Par ailleurs, un personnage récurrent et important porteporte un nom qui s'apparente à celui d'une figure rencontrée dans les Codex Bodley et Zouche-Nuttall. Si son identité est confirmée, il serait un ancêtre de deux lignées liées aux sites archéologiques majeurs de Zaachila et Teozacualco.

    La description de la totalité du manuscrit (20 pages) devrait être présentée dans les années à venir.