Le deuxième touchdown de la sonde Hayabusa-2 sur l'astéroïde Ryugu ce 11 juillet 2019 est un grand succès, s'est félicité l'Agence spatiale japonaise (Jaxa). Il s'agissait cette fois de récolter des échantillons du sous-sol épargnés de l'érosion par le rayonnement solaire et cosmique, près d'un cratère artificiel produit exprès à la surface quelques mois auparavant. 


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    Pour la deuxième fois, la sonde japonaise HayabusaHayabusa-2 a réussi à se poser brièvement ce 11 juillet au matin, vers 10 h 20, heure japonaise, sur le lointain astéroïde RyuguRyugu, point culminant d'une délicate mission entamée fin 2014, dans le but d'enrichir les connaissances sur la formation de notre Système solaire. « L'atterrissage est un succès, un grand succès », a déclaré aux journalistes Takashi Kubota, directeur de recherche pour ce programme de l'Agence d'exploration spatiale japonaise (Jaxa).

    La nouvelle a été accueillie par des applaudissements et les mines enjouées des techniciens debout dans la salle de contrôle. Un peu plus tôt, un porteporte-parole de la Jaxa, Takayuki Tomobe, avait indiqué à l'AFP que des données montrant que la sonde avait apparemment atterri étaient parvenues au centre de gestion de la mission. Il restait cependant à confirmer la réussite du contact, ce qui fut chose faite quelques instants plus tard.

    Revivez le Live du deuxième touchdown de la sonde Hayabusa-2 sur l'astéroïde Ryugu. © Jaxa

    Première récolte de poussière issue du sous-sol d'un astéroïde

    Hayabusa-2 avait eu un premier contact furtif avec l'astéroïde en février 2019 pour recueillir des poussières en surface. Pour cette deuxième opération de touchdown réussi, Hayabusa-2 a ainsi touché Ryugu à proximité du cratère qu'elle avait produit à la surface en avril dernier à l'aide d'un « impacteur » qui avait provoqué une explosion près de l'astéroïde. Cette fois, il s'agissait de récolter des échantillons de poussières issues du sous-sol.

    Images prises par la caméra CAM-H embarquée sur la sonde japonaise Hayabusa-2 à la surface de l'astéroïde Ryugu quatre secondes avant le touchdown, au moment du touchdown et quatre secondes après. © Jaxa/@_RomanTkachenko

    « Nous pensons que la sonde a collecté quelque chose, mais nous ne pouvons le dire avec certitude tant que la capsule de la sonde n'est pas rentrée sur Terre », a précisé M. Kubota. L'engin, qui se trouve généralement en orbite à une vingtaine de kilomètres de l'astéroïde, avait entamé sa descente dès la veille (10 juillet).

    Images de la surface de l'astéroïde Ryugu prises par la caméra ONC-W1 juste après le « touchdown ». La tache sombre au centre de la seconde image correspond à la zone perturbée par le bref atterrissage de la sonde Hayabusa-2. © Jaxa

    Retour d'échantillons datant de l'aube du Système solaire

    L'aventure Hayabusa2 a débuté le 3 décembre 2014. La sonde est alors partie pour un long périple de 3,2 milliards de kilomètres pour arriver jusqu'à Ryugu, qui tourne autour du Soleil et se trouve à 340 millions de kilomètres de la Terre. Il était impossible pour la sonde de rejoindre l'astéroïde en ligne droite. Il lui a fallu trois ans et dix mois pour parvenir à destination. En juin 2018, elle s'est finalement stabilisée près de Ryugu, astéroïde très ancien d'environ 900 mètres de diamètre qui date de la formation du Système solaire.

    Les scientifiques pensent que ce corps céleste contient de relativement grandes quantités de matièresmatières organiques et d'eau depuis environ 4,6 milliards d'années, lorsque le Système solaire est né. La sonde y avait aussi largué en octobre 2018 un petit robot franco-allemand, Mascot, qui avait travaillé plus de 17 heures pour analyser la composition du sol.

    Le but affiché est de contribuer à enrichir les connaissances de notre environnement spatial « afin d'appréhender l'apparition de la vie sur Terre », selon la Jaxa. Cette deuxième manœuvre de récolte d'échantillons était l'ultime défi de cette ambitieuse mission avant le retour sur Terre d'une partie de la sonde l'an prochain, avec a priori de la précieuse poussière d'astéroïde dans ces bagages.


    Cette nuit, Hayabusa-2 va de nouveau prendre des échantillons sur l'astéroïde Ryugu

    Article de Rémy DecourtRémy Decourt, publié le 10/07/2019

    La Jaxa, qui s'est interrogée sur l'opportunité de réaliser une deuxième tentative pour récupérer des échantillons sur l'astéroïde Ryugu, a finalement donné son feufeu vert il y a quelques jours. Le but est de collecter de la matière du sous-sol de l'astéroïde, celle-ci n'ayant jamais été altérée par les rayonnements spatiaux et solaires, avec à la clé des avancées scientifiques très significatives. La manœuvre aura lieu le 11 juillet.

    La Jaxa et les responsables de la mission Hayabusa-2 ont donné leur feu vert pour une deuxième tentative de récupération d'échantillons à la surface de l'astéroïde Ryugu. Cette manœuvre est prévue le 11 juillet et n'est pas sans risque pour la sonde.

    Après le succès de la première opération qui a permis de prélever des échantillons de la surface de l’astéroïde, mais sans que l'on sache exactement quelle quantité, un débat s'était ouvert pour discuter de l'opportunité de réaliser cette seconde tentative. Cette manœuvre s'annonce techniquement tout aussi compliquée que la première, voire plus. Certains, au sein de l'équipe, souhaitaient que l'on se contente des échantillons déjà prélevés plutôt que de risquer d'endommager la sonde et d'empêcher son retour sur Terre.

    Vue d'artiste de la sonde Hayabusa-2 lors de sa tentative réussie de récupérer des échantillons de l'astéroïde Ryugu (février 2019). © Akihiro Ikeshita
    Vue d'artiste de la sonde Hayabusa-2 lors de sa tentative réussie de récupérer des échantillons de l'astéroïde Ryugu (février 2019). © Akihiro Ikeshita

    Comme nous l'explique Patrick Michel, directeur de recherche au CNRS, à l'Observatoire de la Côte d'Azur et membre de l'équipe scientifique de la mission, « le risque que nous prenons est mesuré et en vaut la peine du moment que toutes les mesures seront prises pour faire avorter la manœuvre si quelque chose de suspect se produit pendant l'opération ». Dont acte.

    Le site choisi par l'équipe scientifique d'Hayabusa-2 pour prélever des échantillons. © Jaxa
    Le site choisi par l'équipe scientifique d'Hayabusa-2 pour prélever des échantillons. © Jaxa

    Les échantillons les plus vieux jamais rapportés sur Terre

    Le but de cette seconde tentative est de récupérer des échantillons situés à la périphérie du cratère artificiel formé par la sonde en avril. Et donc, à la différence des fragments recueillis à même le sol, qui sont altérés par les effets du vent solairevent solaire, du rayonnement ultravioletultraviolet et du rayonnement cosmique, un échantillon du sous-sol ne subit pas ces effets d'altérations qui modifient la nature physico-chimique de la surface.

    Dit autrement, les scientifiques s'attendent à ce que Hayabusa-2 « prélève les échantillons primitifs les plus vieux et les plus propres, c'est-à-dire non altérés depuis leur formation, jamais rapportés sur Terre ». Parmi les avancées scientifiques attendues de leur étude, on citera « une meilleure compréhension des processus d'altérations dans l'espace ». De plus, puisque Ryugu n'est pas très hydraté par rapport à Bennu (par exemple), la bande d'hydratationhydratation étant très faible, il s'agira de « savoir si cette propriété est intrinsèque à tout le corps ou si la déshydratationdéshydratation de la surface peut être à l'œuvre à cause à la chaleurchaleur solaire ». S'il s'avère que les échantillons de la sous-surface sont plus riches en minérauxminéraux hydratés que ceux de la surface, nous aurons la réponse, ce « qui est extrêmement utile pour comprendre l'histoire de Ryugu et les propriétés de son corps d'origine ».


    Hayabusa-2 a réussi à créer un cratère artificiel sur l'astéroïde Ryugu !

    Article de Rémy Decourt, publié le 06/04/2019

    Quelle performance ! La sonde Hayabusa-2sonde Hayabusa-2 de la Jaxa a réussi l'exploit de former un cratère artificiel sur la surface de Ryugu. De la matière du sous-sol de l'astéroïde qui n'a jamais été altérée par les rayonnements spatiaux et solaires a très certainement été mise à nu. Pour en avoir le cœur net, il faut attendre le retour sur site de la sonde pour réaliser des mesures qui raconteront le passé de cet astéroïde.

    Nouvel exploit. La sonde Hayabusa-2 a réussi à former un cratère artificiel à l'intérieur duquel elle devrait récupérer des échantillons qui n'ont pas été altérés par les effets du vent solaire, du rayonnement ultraviolet et du rayonnement cosmique. « Une première historique » tient à nous préciser Patrick Michel, directeur de recherche au CNRS à l'Observatoire de la Côte d'Azur et membre de l'équipe scientifique de la mission. Après la récupération d'échantillons de la surface de Ryugu, en février 2019, Hayabusa-2 « vole » ainsi de succès en succès « bien que toutes ces opérations de récupération d'échantillons et de formation d'un cratère soient d'une incroyable complexité ».

    Pour former ce cratère artificiel, à l'intérieur duquel la sonde devrait « peut-être mais cela n'a pas encore été décidé » prélever des échantillons, Hayabusa-2 a réalisé plusieurs manœuvres.

    Sur Ryugu, le jet de matière éjectée trois à quatre secondes après l'impact. Cette image a été acquise avec la caméra analogique basse résolution DCAM3. © Jaxa, Kobe University, Chiba Institute of Technology, The University of Occupational and Environmental Health, Kochi University, Aichi Toho University, The University of Aizu, and Tokyo University of Science
    Sur Ryugu, le jet de matière éjectée trois à quatre secondes après l'impact. Cette image a été acquise avec la caméra analogique basse résolution DCAM3. © Jaxa, Kobe University, Chiba Institute of Technology, The University of Occupational and Environmental Health, Kochi University, Aichi Toho University, The University of Aizu, and Tokyo University of Science

    Elle a d'abord libéré une « petite boîte » avant que la sonde ne s'écarte pour libérer la petite caméra DCAM3, destinée à filmer le tir, et parte se « mettre à l'abri derrière l'astéroïde ». Tout cela en seulement 40 minutes.  En principe, à 11 h 36, la boîte a explosé « pour donner de la vitessevitesse à un projectile de 2 kg qui a tapé à 7.200 km/h la surface de Ryugu ! » Quatre heures d'attente ont été nécessaires avant d'avoir les premières images de la DCAM3, qui « ont confirmé que l'impact s'est bien produit en montrant un jet de matière sortant de la surface de l'astéroïde ». Ce qui a fait « sauter de joie toute l'équipe et crier à un niveau de décibelsdécibels tel que tout Tokyo a dû nous entendre ! ».

    Avant d'avoir des images de très bonne qualité de ce cratère artificiel, « voire le film de l'impact », l'équipe scientifique doit « attendre plusieurs jours ». Quant à avoir des informations sur les propriétés de ce cratère, en termes de dimension et de morphologiemorphologie, deux semaines seront nécessaires avant qu'« Hayabusa-2 revienne sur le site pour l'explorer ».

    Mais malgré l'absence de ces images, on peut d'ores et déjà dire que l'opération a été une très grande réussite.


    Hayabusa-2 s’apprête à créer un cratère sur l'astéroïde Ryugu pour récupérer des échantillons

    Article de Rémy Decourt, publié le 04/04/2019

    Après avoir collecté des échantillons de la surface de l'astéroïde Ryugu, la sonde Hayabusa-2 va en récupérer de son sous-sol. Pour cela, elle va utiliser un impacteur, doté d'une charge explosive, pour créer un cratère ! Le but est de recueillir de la matière qui n'aurait pas été altérée durant des millions d'années par différents rayonnements.

    Après avoir réussi à prélever des échantillons sur l’astéroïde Ryugu, lors d'une manœuvre complexe consistant à aller au contact de la surface, la sonde Hayabusa-2 se prépare à une nouvelle tentative encore plus audacieuse.

    Cette fois-ci, l'idée est de récupérer des échantillons situés sous la surface de l'astéroïde. Comment ? En éjectant un impacteur d'environ 2 kilogrammeskilogrammes, qui inclut une charge explosive, à la vitesse de deux kilomètres par seconde, soit pratiquement Mach 6 ! Le but est de former un cratère d'impact dans ou à proximité duquel sera prélevé ou non ce deuxième échantillon. Les explications de Patrick Michel, directeur de recherche au CNRS à l'Observatoire de la Côte d'Azur et membre de l'équipe scientifique de la mission.

    Le scénario de la manœuvre du 5 avril qui prévoit le lancement d'un projectile pour former un cratère de deux à dix mètres de diamètre sur la surface de l'astéroïde Ryugu. © Jaxa
    Le scénario de la manœuvre du 5 avril qui prévoit le lancement d'un projectile pour former un cratère de deux à dix mètres de diamètre sur la surface de l'astéroïde Ryugu. © Jaxa

    Une incertitude excitante pour les scientifiques

    L'impact est prévu à 11 h 36 du matin, heure japonaise, le 5 Avril (04 h 36, heure de Paris). « C'est la première fois qu'on tente une telle expérience dans l'espace, et la première fois que l'on va faire un impact à l'échelle d'un astéroïde », explique le chercheur. Cela risque de bouleverser notre « compréhension du processus de cratérisation sur ces objets, basée sur les expériences en laboratoire sur des cibles centimétriques dans les conditions de gravitégravité terrestre et sur les modélisationsmodélisations numériquesnumériques validées uniquement à ces échelles ».

    Donc, les chercheurs de la mission scientifique ne savent vraiment pas à quoi s'attendre, même si d'après leurs calculs, ils estiment que le cratère pourrait faire entre 2 et 10 mètres de diamètre. « Ces estimations sont loin d'être certaines, précise-t-il. Et si elles sont contredites, cela nous obligera à réviser beaucoup de choses, ce qui n'est pas nécessairement pour me déplaire car un chercheur adore les nouveaux défis ! » Par exemple, l'âge de la surface dépend de « l'abondance des cratères et de la relation entre taille du projectile et taille du cratère ». Cette relation, si elle s'avère très différente de celle actuellement utilisée selon le résultat de l'impacteur, permettra, estime le chercheur « de fournir un âge bien plus réaliste (et probablement très différent) par rapport à celui estimé actuellement ». En effet, l'âge de Ryugu, « qui tient compte de cette incertitude, est de l'ordre de 100 millions à 1 milliard d'année ».

    « Nous attendons tous cela avec une grande impatience, et aussi une grande appréhension car c'est vraiment une opération à haut risque. Mais c'est bien pour cela que je pousse, dans le domaine spatial, à prendre des risques, ne pas avoir peur des nouveaux défis et d'un échec, car c'est comme cela que l'on fera de grandes avancées. Cette mission montre que mes collègues japonais l'ont bien compris et mis en application. »

    Avec cet impact, les scientifiques sauront si « le matériaumatériau qui constitue Ryugu est fragile ou résistant, s'il s'enfonce ou se casse ». Et qui sait, peut-être cela « produira des volatiles si les minéraux hydratés qui constituent Ryugu se vaporisent. »

    Pour ne pas endommager Hayabusa-2 et éviter la collision d'éjectas, la sonde sera positionnée derrière l'astéroïde au moment de l'impact. L'impacteur sera séparé de la sonde 40 mn avant l'impact. Avant l'explosion, la sonde déploiera également « la caméra DCAM3 qui devrait observer l'impact, puis Hayabusa-2 ira se mettre dans sa zone de protection ». Elle devrait revenir voir le cratère deux semaines plus tard, dès que les débris du cratère formé seront retombés au sol.

    Les scientifiques de la mission espèrent une image par la caméra d'Hayabusa2 qui montrera le SCI une fois déployé avant son explosion, et  -- rêve de Patrick Michel -- que la caméra DCAM3 fournisse une « belle image » de l'impact et de son résultat (taille du cratère, abondance et champ de vitesse des éjectas). Si c'est le cas, les images devraient arriver dans la soirée du 5 avril.

    Les missions d'Hayabusa-2, autour de Ryugu, et d'Osiris-Rex, autour de Bennu, présentées par Patrick Michel. © OCA

    Une opportunité inédite d’étudier le matériau le plus primordial du Système solaire

    Si les responsables donnent le feu vert à une deuxième récolte d'échantillons, la sonde viendra prélever des matériaux qui, pour le coup, seront les échantillons primitifs les plus vieux et les plus propres, c'est-à-dire non altérés depuis leur formation, jamais rapportés sur Terre. « Pour l'instant, l'hypothèse de travail reste qu'une deuxième récolte sera effectuée mais la décision finale interviendra quand on aura effectué l'impact et analysé ses conséquences. »

    À la différence des échantillons récupérés à même le sol, qui sont altérés par les effets du vent solaire, du rayonnement ultraviolet et du rayonnement cosmique, un échantillon du sous-sol ne subit pas ces effets d'altérations qui modifient la nature physico chimique de la surface.

    Pour maximiser le retour scientifique, la sonde a effectué des reconnaissances à très faibles altitudes de la zone où le cratère est susceptible d'être généré, afin de pouvoir comparer la surface avant et après la formation du cratère. Hayabusa-2 devrait repartir de l'astéroïde Ryugu en décembre 2019 en vue d'un retour sur Terre des échantillons collectés, un an plus tard, soit en décembre 2020.