Eau, carbone, molécules organiques… Encelade semble bien prometteuse pour la recherche d’une vie extraterrestre dans notre Système solaire. Mais il reste à identifier des biosignatures. Une nouvelle étude montre que si ces témoins d’une activité biologique existent, ils pourraient être facilement retrouvés à la surface de cette petite lune de Saturne.


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    EnceladeEncelade, petite lune de SaturneSaturne, s'avère de plus en plus être une destination de choix pour étudier la potentielle présence d'une vie extraterrestre dans notre Système solaire. L'étude de la composition des geysersgeysers qui jaillissent de sa surface gelée montre que sous l'épaisse croûtecroûte de glace, Encelade posséderait en effet un océan d'eau liquide renfermant de nombreux composés organiques que l’on considère comme des précurseurs du vivant. Alors, pourrait-il y avoir plus que de simples molécules au fond de ces océans sous-glaciaires ? Des êtres unicellulaires, des organismes primitifs ?

    Comment percer le secret des océans d’Encelade ?

    Une hypothèse possible mais loin d'être vérifiée. Car pour cela il faudrait trouver des preuves d'une telle activité biologique. Deux solutions étaient jusqu'à présent envisagées dans le cadre d'une mission envoyée vers Encelade. La première, idéale mais très compliquée à mettre en œuvre à l'heure actuelle, serait d'atteindre l'océan d'eau liquide en forant à travers la croûte de glace, vraisemblablement épaisse de plusieurs kilomètres. La deuxième, moins directe, serait de traverser l'un des geysers pour échantillonner du matériel provenant directement des profondeurs d'Encelade.

    Sur cette vue en coupe d’Encelade, on peut voir sous une banquise de 30 à 40 kilomètres d’épaisseur, l’océan d’environ 10 kilomètres de profondeur qui se situe au pôle Sud. Ce dernier est en contact avec les roches du noyau, lequel serait relativement poreux comme le suggèrent les mesures de la gravité de ce petit satellite naturel de quelque 504 kilomètres de diamètre. © Nasa, JPL-Caltech
    Sur cette vue en coupe d’Encelade, on peut voir sous une banquise de 30 à 40 kilomètres d’épaisseur, l’océan d’environ 10 kilomètres de profondeur qui se situe au pôle Sud. Ce dernier est en contact avec les roches du noyau, lequel serait relativement poreux comme le suggèrent les mesures de la gravité de ce petit satellite naturel de quelque 504 kilomètres de diamètre. © Nasa, JPL-Caltech

    De potentielles biosignatures pourraient être retrouvées en surface

    Une équipe de scientifiques montre désormais qu'il existerait une solution encore plus simple. Dans un article publié dans la revue Communications Earth and Environment, les chercheurs révèlent en effet que de potentielles biosignatures pourraient être retrouvées directement à la surface de la lune gelée. On sait qu'environ 90 % des particules éjectées par les geysers retombent sur la surface. Le problème est que les molécules organiques qu’elles contiennent (et potentiellement les biosignatures) sont sensibles aux rayons UVUV émis par le Soleil, qui les dégradent. Grâce aux données d'Hubble et de la sonde Cassini, les scientifiques viennent cependant de montrer que les UV ne pénètrent pas profondément dans la croûte de glace. Seuls les 100 premiers micromètresmicromètres (soit l'épaisseur d'un cheveu) seraient ainsi détériorés par les UV. Les résultats suggèrent donc qu'il suffirait d'effectuer un petit forage pour obtenir des échantillons de qualité permettant d'analyser la composition de l'océan d'Encelade et peut-être savoir si ses océans possèdent une vie extraterrestre.


    Nasa : les scientifiques veulent explorer Uranus et atterrir sur Encelade, une lune de Saturne

    Article de Rémy DecourtRémy Decourt, publié le 26 avril 2022

    Les rapports décennaux du Conseil national de la recherche des États-Unis, qui flèche les stratégies de la NasaNasa dans les domaines de l'exploration et des sciences spatiales et lui recommande des missions, sont très attendus. Il y a quelques jours, le rapport sur les sciences planétaires et l'astrobiologieastrobiologie pour la période 2023-2032 a été rendu public. Il détaille les missions qui seront réalisées pendant cette décennie et les objectifs scientifiques à atteindre.

    Après le rapport décennal sur l’astronomie et l’astrophysique pour la période 2023-2032, dévoilé en novembre 2021, le Conseil national de la recherche des États-Unis vient de rendre public son rapport décennal sur les sciences planétaires et l'astrobiologie. Ce nouveau rapport explore les questions clés en sciences planétaires, de façon à aider la Nasa à définir ses priorités en matièrematière d'exploration pour la décennie 2023-2032.

    Les rapports décennaux de ce prestigieux institut sont très attendus par la communauté scientifique américaine. Sorte de boussole, ils sont des indicateurs forts des axes de recherche et des orientations des stratégies décennales de la Nasa dans les domaines concernés. Ils orientent donc plusieurs milliards de dollars de financement vers les destinations identifiées comme présentant des intérêts scientifiques majeurs.

    Uranus vue par Chandra en rayon X en 2002 (en rose) et en lumière visible par le télescope Keck-I en 2004. © Rayons X : Nasa, CXO, University College London, W. Dunn et al. ; optique : W.M. Keck Observatory
    Uranus vue par Chandra en rayon X en 2002 (en rose) et en lumière visible par le télescope Keck-I en 2004. © Rayons X : Nasa, CXO, University College London, W. Dunn et al. ; optique : W.M. Keck Observatory

    Ce nouveau rapport a identifié Uranus et Encelade comme deux cibles prioritaires

    Ce nouveau rapport a identifié Uranus et Encelade comme deux cibles prioritaires. Avant de choisir UranusUranus, le Comité scientifique - qui a rédigé ce rapport décennal - a évalué les possibilités de mission à destination de NeptuneNeptune et Uranus mais a conclu qu'une mission vers Uranus était préférable. Aucun concept de mission passé en revue ne pouvait être mis en œuvre au cours de la décennie 2023-2032 avec les lanceurslanceurs actuellement disponibles. Le rapport recommande donc l'envoi d'une sonde autour d'Uranus pour étudier la planète, ses anneaux et ses lunes. Ainsi, une sonde serait déployée dans l'atmosphèreatmosphère de la planète qui n'a été visitée qu'une seule fois par Voyager 2Voyager 2 en 1986. La mission, dont le coût est estimé à 4,2 milliards de dollars, pourrait être lancée dès 2031 à bord d'un Falcon HeavyFalcon Heavy de SpaceXSpaceX et atteindrait Uranus en seulement 13 ans et en utilisant l'assistance gravitationnelleassistance gravitationnelle de JupiterJupiter.

    Découvrir de la vie dans les recoins de la surface d'Encelade

    Concernant Encelade, le concept de mission retenu par le rapport est très ambitieux avec une sonde orbilander qui aura comme principal objectif l'étude des panaches de gazgaz et de particules, provenant de son océan souterrain, qui sont projetés dans l'espace. À cela s'ajoute que les conditions qui règnent sur Encelade permettent d'étudier directement l'habitabilité d'un monde océanique et de déterminer s'il est habité ou non. Cela répond à l'une des questions les plus fondamentales : y a-t-il de la vie au-delà de la Terre et si non, pourquoi ?

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    Mission sur Encelade : « un retour d’échantillons va permettre de répondre à un nombre de questions fondamentales totalement incroyables »

    Orbilander passerait un an et demi à tourner autour d'Encelade et à échantillonner ces panaches avant de se poser sur la surface glacée de ce petit monde saturnien pour une mission de deux ans visant à rechercher des preuves de vie. La mission, dont le coût est estimé à 4,9 milliards de dollars, pourrait être lancée à la fin des années 2030 à bord d'un lanceur SLS ou d'un Falcon Heavy avec un atterrissage au début des années 2050.

    Vue d'artiste des jets de matière localisés au pôle Sud d'Encelade. © Vue d'artiste, Nasa
    Vue d'artiste des jets de matière localisés au pôle Sud d'Encelade. © Vue d'artiste, Nasa

    Dans le domaine de l'exploration martienne, ce rapport recommande à la Nasa de poursuivre ses efforts et de faire aboutir la mission de retour d’échantillons martiens aussi vite que possible tout en restant dans un budget d'environ 5,3 milliards de dollars. Cette mission avait été identifiée comme une priorité lors du précédent rapport décennal. Ce nouveau rapport donne la priorité à la mission Mars Life Explorer (MLE). Contrairement à PerseverancePerseverance et MSRMSR qui se focalisent plutôt sur les bio-signatures éteintes, MLE recherchera des formes de vie en activité et évaluera l'habitabilité de la planète aujourd'hui. Cette mission de 2,1 milliards de dollars pourrait être lancée au milieu des années 2030. Concernant l'exploration robotiquerobotique de la Lune, le Comité recommande la mission Endurance-A qui a pour objectif de parcourir quelque 2.000 kilomètres aux alentours et dans le bassin Aitken du pôle Sud et de collecter une centaine de kilogrammeskilogrammes d'échantillons. L'originalité de cette mission, c'est que ces échantillons seront livrés aux astronautesastronautes des missions Artemis qui se chargeront de les rapporter sur Terre. Avec cette stratégie de retour plutôt originale, cette mission de 1,9 milliard de dollars coûte environ 1 milliard de dollars de moins qu'une mission qui impliquait à la fois un roverrover et un engin de retour d'échantillons qui n'aurait pu retourner qu'environ deux kilogrammes de matière lunaire.

    Quatre autres concepts de missions ont été passés en revue, mais le comité a refusé de les approuver en raison des coûts et des technologies nécessaires un peu trop « avant-gardistes ». Il s'agit d'une mission à destination de Neptune et d'atterrisseurs sur Europe (satellite de Jupiter), sur Mercure et sur VénusVénus.

    Le rapport a aussi identifié et sélectionné des destinations d'un très grand intérêt scientifique pour les futures missions New Frontiers de la Nasa :

    Concrètement, le rapport recommande à la Nasa de sélectionner un de ses concepts pour New Frontiers 6, dont la sélection est prévue à la fin de cette décennie. Pour New Frontiers 7, dont la sélection aura lieu du début au milieu des années 2030, le choix se fera parmi cette liste de concept, à l'exception de celui sélectionné pour la mission numéro 6 du programme. À cette liste, le rapport recommande d'ajouter une mission à destination de TritonTriton, un des satellites de Neptune.

    Enfin, dans le  domaine de la défense planétaire, le rapport soutient la poursuite des travaux visant à atteindre l'objectif fixé par le Congrès en 2005 de découvrir et caractériser 90 % des objets proches de la Terre (NEO) d'au moins 140 mètres de diamètre. Cependant, il recommande à la Nasa de travailler à la découverte du plus grand nombre possible d'objets plus petits. Dans ce contexte, le télescope spatialtélescope spatial NEO Surveyor est fortement soutenu. Un soutien de poids pour la mission dont la dernière proposition de budget pour l’exercice 2023 a réduit le budget de la mission, repoussant d'au moins deux ans son lancement (2026). Après NEO Surveyor, le rapport recommande la réalisation d'une mission à destination d'un de ces objets proches de la Terre, d'une taille de 50 à 100 mètres, afin de mieux préparer une réponse à une menace d'un NEO de courte duréedurée.