Une équipe de chercheurs a utilisé le télescope spatial Hubble pour réaliser une carte relativement précise des températures à la surface d’une Jupiter chaude dont l’année dure 19 heures. Ils ont également étudié l’abondance de l’eau dans son atmosphère. Leurs recherches contribuent à une meilleure compréhension de la formation des planètes géantes.

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    Grâce aux techniques d'observation qu'ils n'ont de cesse de perfectionner, les astronomesastronomes parviennent de mieux en mieux à étudier et caractériser les atmosphèresatmosphères de mondes lointains, celles des planètes géantes, dans un premier temps. Des exo-Neptunes commencent aussi à parler. Les progrès rapides et le déploiement d'ici 2020 de nouvelles générations de télescopes géantstélescopes géants tels que, sur Terre, l'E-ELT et, dans l'espace, le télescope spatial James Webb (JWSTJWST), laissent espérer que bientôt quelques super-Terres trahiront à leur tour les secrets des couches de gaz qui les enrobent...

    Dans cet élanélan de vouloir mieux comprendre la nature physico-chimique et la dynamique des atmosphères d'exoplanètes géantes et de confronter aussi les observations avec les modèles développés sur la formation de planètes géantes, une équipe internationale de chercheurs s'est alloué quelques jours les services de Hubble pour examiner la Jupiter chaude WASP-43b. La double enquête qu'ils ont menée -- leurs recherches sont exposées au sein de deux articles publiés dans les revues en ligne Science Express (9 octobre) et The Astrophysical Journal Letters (12 septembre) -- a permis de présenter la meilleure cartographie jamais réalisée des températures des différentes couches de l'atmosphère d'une exoplanète et aussi d'évaluer les quantités et la distribution de l'eau dans ce milieu particulièrement perturbé.

    Un monde aux températures extrêmes

    Gravitant très près de son étoile (une naine orangenaine orange distante de 260 années-lumièreannées-lumière de nous), WASP-43b arbore des conditions extrêmes. Cette planète d'une taille équivalente à celle de JupiterJupiter, pour deux fois sa massemasse, a une révolution synchronisée, si bien qu'elle présente toujours la même face à son soleilsoleil, à l'instar de la LuneLune avec la Terre. Côté jour, en continu, la température dépasse allègrement les 1.500 °C. On pourrait y faire fondre du ferfer. Tandis que côté nuit, il fait un peu plus frais avec environ... 500 °C. Les chercheurs ont relevé également des ventsvents « hurlant » littéralement à la vitesse du sonvitesse du son : plus de 340 mètres par seconde !

    Puisqu'une année sur WASP-43b ne dure que 19 heures, « nous avons pu observer trois rotations complètes -- soit trois années pour cette planète lointaine -- en l'espace de quatre jours » raconte Jacob Bean (université de Chicago) qui a dirigé les recherches. Avec son équipe, ils ont d'abord prêté attention à l'abondance de l'eau. Pour cela, ils ont employé la technique dite de « spectroscopie de transmission » qui consiste à étudier la lumière de l'étoile au prisme de l'atmosphère de la planète gazeuseplanète gazeuse, sur le limbelimbe, à l'orée du jour et de la nuit. « La planète est si chaude que toute l'eau de son atmosphère est vaporisée plutôt que de se condenser en nuagesnuages de glace comme sur Jupiter » commente Laura Kreidberg de l'université de Chicago.


    Le tableau de gauche présente le spectre d’émission de la planète et celui de droite, son profil thermique. Comme l’ont observé les chercheurs, il y a une large raie d’absorption caractéristique de l’eau entre les longueurs d’onde 1,35 à 1,6 μm. En dessous, les sphères en rotation affichent les cartes de température dans trois canaux spectrophotométriques. © K. Stevenson et al.

    Quel rôle joue l'eau dans la formation des planètes gazeuses ?

    Grâce à la grande stabilité et la vue aiguisée de Hubble, les chercheurs sont parvenus à soustraire plus de 99,95 % de la lumière émise par l'étoile-parent. Cette méthode qualifiée de « spectroscopie d'émissionémission » leur a permis de se focaliser sur la seule lumière rayonnant de la planète, à plusieurs points de son orbiteorbite, et d'évaluer ainsi les températures régnant à différentes longitudeslongitudes« Ce fut essentiel pour nous permettre de créer la première carte complète des températures pour une exoplanète et pour sonder son atmosphère afin de connaître quels éléments elle détient et leurs distributions. »

    Jacob Bean et ses collègues y voient de précieux indices quant à la genèse des planètes. « (...) Caractériser l'atmosphère d'un monde si étrange fournit un laboratoire unique qui permet d'acquérir une meilleure compréhension de la formation des planètes et de la physiquephysique planétaire » explique Nikku Madhusudhan, chercheur à l'université de Cambridge qui a cosigné les deux études. « Dans ce cas, la découverte s'accorde bien avec les modèles préexistants sur la façon dont ces planètes se comportent. »

    Ils soulignent que l'eau semble jouer un rôle important dans leur processus de formation, aussi supposent-ils que des comètescomètes aient pu enrichir de plusieurs moléculesmolécules l'atmosphère des planètes géantes. Des hypothèses cependant encore difficiles à vérifier au sein des astresastres gazeux de notre Système solaireSystème solaire car hors de portée des instruments des sondes spatiales qui les ont visités. « Les sondes spatiales n'ont pas été capables de pénétrer en profondeur dans l'atmosphère de Jupiter pour obtenir une mesure précise de l'abondance de l'eau. Mais cette planète géante est différente, commente Derek Homeier de l'École Normale Supérieure de Lyon. L'eau sur WASP-43b est sous une forme de vapeur qui peut être plus facilement identifiée. Nous avons été aussi capables de mesurer directement sa quantité. »

    L'équipe a observé que les quantités d'eau présente dans la Jupiter chaudeJupiter chaude WASP-43b sont comparables à celles qu'un corps de la même composition chimique que le Soleil pourrait avoir. Bien sûr, les astronomes veulent en savoir davantage et envisagent donc de prospecter d'autres exoplanètes géantes. « Nous visons à faire des mesures de l'abondance de l'eau dans différentes planètes afin d'explorer leurs compositions chimiques et en apprendre davantage sur la façon dont les planètes de tailles et types variés ont pu se former autour d'étoiles comme le Soleil » déclare Laura Kreidberg.

    Pour plonger leurs regards dans les profondeurs des exoplanètes, quoi de mieux que le futur télescope spatialtélescope spatial James Webb dont le lancement est prévu pour 2018 ? Son acuité visuelleacuité visuelle et les instruments dont il sera doté lui permettront en effet de déceler la signature du monoxyde de carbonemonoxyde de carbone, du dioxyde de carbonedioxyde de carbone, de l'ammoniacammoniac et du méthane relativement aux températures de la planète.