L'astronomie X, grâce à un instrument de la Nasa à bord de l'ISS, Nicer, vient de faire une percée en ce qui concerne les pulsars. Une première carte rudimentaire de la répartition des régions les plus brillantes en rayons X à la surface d'une de ces étoiles à neutrons a pu être déterminée. Elle n'est pas conforme aux prédictions des astrophysiciens.


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    Les pulsars sont des objets fascinants que les astrophysiciensastrophysiciens étudient depuis leur découverte par Jocelyn Bell en 1967. En radioastronomie, ils se manifestent comme des sources périodiques d'impulsion radio mais, pour les astrophysiciens, il s'agit d'abord de cadavres stellaires, le point final de l'évolution de certaines étoiles qui ont explosé en supernova SNSN II tout en s'effondrant gravitationnellement et en donnant ce qui est appelé des étoiles à neutrons. Ce sont des astres compact dont la massemasse est de l'ordre de celle du SoleilSoleil. Ils possèdent un diamètre de quelques dizaines de kilomètres tout au plus et ressemblent à un gigantesque noyau d'atomeatome.

    L'existence des étoile à neutrons avait été prédite en 1933 par Zwicky et Baade. La première description théorique détaillée des étoiles à neutrons a ensuite été donnée en 1939 par Oppenheimer et Volkkoff. C'est vers la fin des années 1960 que les astrophysiciens Franco Pacini et Thomas Gold, respectivement italien et britannique, comprennent que ces objets peuvent se comporter comme les pulsars de Jocelyn Bell.

    Les pulsars, des phares cosmiques issus des explosions de supernovae

    La densité, le champ de gravitationgravitation et le champ magnétiquechamp magnétique y sont extrêmes et presque toute la physiquephysique est nécessaire pour comprendre les propriétés d'une étoile à neutrons : la relativité générale, bien sûr, mais aussi la magnétohydrodynamique, la théorie de la superfluiditésuperfluidité et celle de la supraconductivitésupraconductivité, la physique nucléaire et des particules élémentairesparticules élémentaires. Aujourd'hui, on étudie même les ondes gravitationnellesondes gravitationnelles produites par les collisions de deux étoiles à neutrons, lesquelles conduisent aussi à ce que l'on appelle des kilonovae.


    Extrait du documentaire Du Big Bang au vivant, associé au site du même nom, un projet multiplateforme francophone sur la cosmologie contemporaine. Jean-Pierre Luminet parle de la mort des étoiles massives, leur explosion en supernova et la formation de pulsars. © ECP Productions, YouTube

    Comme leur nom l'indique, les pulsars émettent des ondes radio à un rythme rapide et régulier. Pour comprendre la raison de ce phénomène, il faut savoir que toutes les étoiles tournent sur elles-mêmes. Or, de même qu'une patineuse voit sa vitesse de rotationvitesse de rotation accélérer lorsqu'elle rassemble ses bras vers son corps, une étoile en effondrementeffondrement voit sa vitesse de rotation augmenter. C'est une conséquence de la conservation du moment cinétiquemoment cinétique, l'une des lois les plus fondamentales de la physique. De plus, comme une étoile possède un champ magnétique, celui-ci doit également être amplifié en raison d'une autre loi de conservation (celle du flux magnétique) lorsqu'elle se contracte. Juste après sa formation, le cœur chaud et dense d'une étoile devenue une étoile à neutrons doit donc tourner assez rapidement et posséder un intense champ magnétique.

    Un mécanisme s'enclenche alors, lié à ce champ, qui conduit l'astre à rayonner puissamment en émettant un faisceau d'ondes radio collimatées à la façon d'un phare. Lorsque ce faisceau coupe l'orbiteorbite de la Terre, il se manifeste dans un radiotélescoperadiotélescope comme une série régulière de bips.


    Une présentation des observations de Nicer concernant le pulsar PSR J0030+0451. La grande majorité des pulsars possède une période de rotation comprise entre 0,1 et 10 secondes. En perdant de l’énergie cinétique de rotation par l’intermédiaire du flux d’ondes radio, ils ralentissent lentement et, en une dizaine de millions d’années tout au plus, leur vitesse de rotation devient trop faible pour générer une émission radio. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © NASA Goddard

    J0030, un pulsar X mais isolé

    Les pulsars sont aussi des sources de rayon Xrayon X. C'est notamment le cas lorsqu'ils sont dans un système binairesystème binaire avec une étoile compagne à laquelle ils arrachent de la matièrematière avec leur champ de gravitation. Il se forme alors un disque d'accrétiondisque d'accrétion où la température devient si élevée que le plasma chaud formé rayonne dans le domaine X.

    Toutefois, des étoiles à neutrons isolées peuvent aussi être des sources X comme le prouve le cas de J0030+0451 (en abrégé J0030), un pulsar distant d'environ 1.100 années-lumièreannées-lumière du Système solaireSystème solaire en direction de la constellationconstellation des PoissonsPoissons. De juillet 2017 à décembre 2018, J0030 a été observé par le Neutron star Interior Composition Explorer (Nicer), un instrument de la NasaNasa à bord de l'ISSISS, spécialement dédié à l'astronomie X avec les étoiles à neutrons.

    La résolutionrésolution des images de Nicer est telle qu'elle permet de localiser les régions les plus brillantes en rayons à la surface de J0030 et donc d'en établir une carte rudimentaire. Il s'agit en fait d'une grande première car cela n'avait encore été accompli avec aucune étoile à neutrons. Nicer a aussi permis la première mesure précise de la masse et du rayon d'une même étoile à neutrons et la première détermination de la masse d'un pulsar isolé. Ces informations sont précieuses pour contraindre l'état de la matièreétat de la matière à l'intérieur d'une étoile à neutrons car cet état détermine la relation entre sa masse et son rayon ainsi que la valeur limite de la masse autorisée (au-delà, l'étoile doit devenir un trou noirtrou noir). Plusieurs équipes de chercheurs viennent de publier les conclusions qu'ils ont tirées de l'étude des données collectées avec Nicer pour J0030 dans plusieurs articles de The Astrophysical Journal Letters.

    Ils sont tombés sur une surprise. La théorie standard des pulsars prévoyait l'existence de deux régions particulièrement brillantes diamétralement opposées à la surface de l'étoile à neutrons et proches des pôles définis par l'axe de rotation de l'astre compact. L'analyse des données à l'aide de deux superordinateurssuperordinateurs par deux équipes indépendantes a abouti à la conclusion que les régions sont toutes dans l'hémisphère sudhémisphère sud et même qu'il pourrait y en avoir trois au lieu de deux comme l'explique ci-dessus la vidéo de présentation des observations de Nicer concernant J0030.


    Jocelyn Bell Burnell, explique au Perimeter Institute sa découverte des pulsars en 1967 et sa remarquable carrière en physique. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © Perimeter Institute for Theoretical Physics

    Des champs magnétiques plus complexes que prévu

    Une des idées de base de la théorie des pulsars est que les étoiles à neutrons possèdent un champ magnétique dipolaire comme celui de la Terre ou du Soleil. Ce dipôle peut être incliné ou non par rapport à l'axe de rotation de l'astre qui tourne dans son champ magnétique. Un effet relativiste conduit ce champ magnétique à se comporter comme un champ électriquechamp électrique très intense à la surface des étoiles à neutrons. Ce champ arrache et accélère des électronsélectrons qui vont se déplacer dans le champ magnétique et produire en cascade des paires électron-positronpositron. Certaines de ces particules vont arriver aux pôles magnétiquespôles magnétiques sur le pulsar et y générer des régions particulièrement chaudes donc émettrices de rayons X.

    Une équipe de chercheurs de l'Université d'Amsterdam a donc utilisé le superordinateur néerlandais Cartesius pour aboutir à la conclusion qu'il y a deux de ces régions mais uniquement dans l'hémisphère sud (il n'y en aurait pas dans l'hémisphère nordhémisphère nord), l'une ayant la forme d'un croissant. Une autre équipe de l'Université du Maryland (USA) en utilisant le superordinateur Deepthought2 a obtenu une interprétation des données avec trois régions chaudes, mais toujours dans l'hémisphère sud. Dans les deux cas, si les astrophysiciens ont raison, le champ magnétique du pulsar est plus complexe que ce que l'on imaginait et donc en fait multipolaire.

    Il est intéressant de mentionner que l'analyse du rayonnement X émis par J0030 fait intervenir l'effet de déviation des rayons lumineux en relativité généralerelativité générale qui conduit aux fameuses images du disque d'accrétion d'un trou noir. Ainsi, lorsque la masse d'une étoile à neutrons est suffisamment élevée, alors qu'une des régions chaudes émettrices de rayons X se trouverait temporairement occultée par la rotation de l'étoile, son champ de gravitégravité la rend visible en déviant les rayons générés. La taille de l'étoile à neutrons apparaît également plus grande que dans le cadre de la physique newtonienne comme par effet de lentillelentille.