Par rapport aux autres lunes du Système solaire, notre Lune a une caractéristique bien spécifique : elle est particulièrement grosse par rapport à la Terre. Des chercheurs viennent de montrer que la masse relativement faible de la Terre et sa composition seraient les facteurs principaux permettant la création d’une lune imposante lors d’une collision majeure.


au sommaire


    Au sein du Système Solaire, la Terre a de nombreuses particularités. L'une d'elles est d'avoir une lune relativement grande. Notre Lune atteint en effet environ 1 % de la masse de la Terre. Une taille exceptionnelle pour un satellite. Toutes les autres lunes du Système solaire, dont les lunes des planètes géantes, font en effet moins d'un dix-millième de la masse de leur planète, à l'exception de CharonCharon, qui pèse 12 % de la masse de PlutonPluton. Qu'est-ce qui a donc pu permettre cette spécificité ?

    Pour rappel, la Lune a été formée lors d’un gigantesque impact entre un corps planétaire et la Terre primitive. Pour les scientifiques, cette collision est certainement l'une des explications à la taille exceptionnelle de la Lune par rapport à la Terre. Pourtant, cela n'explique pas tout. Car les grandes collisions de ce type ont été légion au début de la formation du Système solaire. Et pourtant, les lunes de Mars, JupiterJupiter, SaturneSaturne, UranusUranus et NeptuneNeptune ont une taille relativement faible. À noter que Mercure et VénusVénus n'ont pas de satellite naturel.

    Des petites planètes pour former de grandes lunes

    La diversité des lunes que nous observons dans notre Système solaire résulte en effet de la diversité des processus menant à leur formation. Car toutes ne sont pas issues d'une collision. La plupart des satellites naturels comme les lunes de Jupiter ou TitanTitan, la lune de Saturne, se sont condensées à partir d'un disque de matièrematière résiduel suite à la formation de leur planète mère. Les lunes de Mars (Phobos et Deimos), ainsi que la lune de Neptune (Triton), seraient en réalité des corps rocheux capturés par le champ gravitationnel de ces deux planètes, même si cette hypothèse est discutée. Seuls notre Lune et Charon seraient issues des débris d'impacts majeurs avec des corps protoplanétaires.

    Pluton et sa lune géante, Charon. © Nasa
    Pluton et sa lune géante, Charon. © Nasa

    Dans un article publié dans Nature Communications, une équipe de scientifiques a observé la formation de lunes après un tel impact, grâce à la simulation numériquesimulation numérique. Ils ont notamment étudié l'influence de différents paramètres, comme la nature des corps planétaires entrant en collision, ainsi que leurs masses respectives.

    Les chercheurs ont ainsi montré que lors d'un impact majeur, seules les planètes rocheusesplanètes rocheuses de masse inférieure à six fois celle de la Terre et les planètes glacées de moins d'une masse terrestre peuvent former une lune de taille relativement importante.

    Le facteur limitant : la quantité de gaz dans le disque de débris

    Dans leurs simulations, les scientifiques ont modélisé plusieurs types de collisions : entre deux protoplanètes rocheuses ou entre deux protoplanètes glacées. Ces deux types de planètes se différencient par leurs compositions. Les planètes rocheuses contiennent un noyau de ferfer et un manteaumanteau silicaté, alors que les planètes glacées ont un noyau silicaté et un manteau principalement composé de glace d'eau. Les simulations montrent que dans chacun des deux cas, la collision génère un nuagenuage de fines particules et de gazgaz, qui va ensuite se condenser pour reformer un nouveau corps, une lune.

    La Lune de Saturne, Encelade, s'apparente à une planète glacée. © Nasa
    La Lune de Saturne, Encelade, s'apparente à une planète glacée. © Nasa

    Cependant, les valeurs des masses entrant en collision jouent un rôle important sur le résultat final. Il apparaît que pour des planètes rocheuses (aussi appelées telluriques) six fois plus lourdes que la Terre, les lunes résultant de la collision seront relativement petites. Il en va de même pour des planètes glacées de masse supérieure à une fois celle de la Terre. Seules des valeurs inférieures à ces masses peuvent mener à la création de lunes relativement imposantes, d'au moins quelques pourcents de la masse de la planète mère. L'un des facteurs limitant à la création de grandes lunes semble être la quantité de vapeurs (de silicatesilicate ou d'eau en fonction du type de planète) présente dans le disque de débris.

    En effet, un disque principalement composé de gaz ne mènera pas à la formation d'une lune. Dans le cas de planètes très massives, les débris vont ainsi rapidement retomber sur la planète avant qu'ils aient pu former une lune. À l'inverse, pour des planètes plus petites, comme la Terre, la quantité plus faible de gaz permet aux différents matériaux de graviter les uns autour des autres, menant éventuellement à la formation d'une grande lune (simulation ci-dessous).

    Simulation de la formation d'une grande lune. © AGU, YouTube

    Ces résultats aident à comprendre l'évolution du couple Terre-Lune et donnent des pistes de recherche pour la détection de potentielles « exolunes » autour de planètes de masse proche de celle de la Terre.