Basée sur la physique quantique, la microscopie électronique fournit des images à haute résolution et sert aussi à identifier des éléments chimiques. Des chercheurs viennent de lui ajouter une nouvelle fonction : l'identification d'isotopes. Réussie avec le carbone de feuillets de graphène, la technique pourrait être adaptée à d'autres matériaux, permettant d'en améliorer l'analyse.

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    La technique de la microscopie électronique en transmission (MET) est ancienne puisqu'elle a été mise au point en 1931 par Max Knoll et Ernst Ruska, ce qui a valu à ce dernier le prix Nobel de physique en 1986. Elle repose sur les propriétés ondulatoires de la matière découvertes théoriquement en 1923 par Louis de Broglie. En utilisant des lentilleslentilles magnétiques, les ondes de matière associées aux électrons peuvent être exploitées à la manière des ondes lumineuses pour obtenir des images de bien meilleure résolutionrésolution que celles d'un microscope optique. On peut ainsi observer des détails de l'ordre de l'angström.

    La microscopie électronique en transmission est un outil précieux en biologie cellulairebiologie cellulaire et en physique du solide car elle fournit des images à haute résolution de structures de dimensions nanométriques. Elle peut aussi renseigner sur la composition chimique d'échantillons, mais seulement au niveau des espèces chimiques, sans distinguer les isotopesisotopes d'un même élément.

    À droite, Ernst Ruska devant l'un des premiers microscopes électroniques. © <em>Technische Universität</em>, Berlin

    À droite, Ernst Ruska devant l'un des premiers microscopes électroniques. © Technische Universität, Berlin

    Application possible : améliorer la synthèse de nouveaux matériaux

    Pour détecter et mesurer les abondances des isotopes d'un même élément, il faut faire appel à la spectroscopie de massemasse, un autre outil précieux pour la biologie ou l'étude des roches et des matériaux. Cette technique a permis de faire des bonds de géant, notamment dans le domaine de la géochimie isotopique. Mais ces instruments ont plusieurs défauts. Ils ne peuvent pas localiser précisément les divers isotopes au sein d'un échantillon, ce qui peut être porteur d'informations, et ils sont parfois un peu fastidieux à mettre en œuvre.

    Une équipe de chercheurs de l'université de Vienne vient de publier dans Nature Communications (voir sur arXiv) un article qui ouvre peut-être une nouvelle voie pour surmonter ces difficultés en utilisant la technique de microscopie électronique en transmission. Ils ont réussi à la mettre en œuvre sur un réseau d'atomesatomes devenu mythique depuis quelques années, celui, en feuillets, du graphène. En utilisant un microscope électroniquemicroscope électronique Nion UltraSTEM100, ils sont parvenus à détecter la présence d'isotopes du carbone différents, en l'occurrence 13C et 12C, et à mesurer leurs concentrations sur un échantillon de graphènegraphène de la taille du nanomètrenanomètre. L'idée centrale de la méthode est que l'éjection d'un isotope donné du feuillet requiert un nombre d'électrons, de même énergieénergie, spécifique. En mesurant ce nombre d'électrons nécessaire en moyenne, il est donc possible d'identifier l'isotope et sa concentration localement.

    La méthode ne s'applique pour le moment qu'au graphène mais elle devrait pouvoir être transposée à d'autres matériaux pourvu qu'ils présentent une structure en 2D. Une applicationapplication envisageable est l'étude des différents isotopes d'un matériaumatériau afin de mieux comprendre comment les atomes s'arrangent lors de sa synthèse, ce qui permettrait d'améliorer celle-ci. La spectroscopie de masse est un moyen pour cela mais elle détruit le matériau et la localisation des isotopes n'est précise qu'à quelques centaines de nanomètres près. Cette faible résolution peut constituer un obstacle à la compréhension des phénomènes étudiés. La nouvelle technique permettrait donc d'affiner ces analyses.