Depuis longtemps suspectée, la présence d’eau liquide sous les calottes polaires de Mars reste cependant difficile à prouver. Mais, depuis 2018, les données s’accumulent et se complètent. Une nouvelle étude, qui se base sur la comparaison de la topographie des calottes terrestres et martiennes, vient renforcer cette hypothèse.


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    Comme la Terre, Mars possède au niveau des pôles deux calottes de glace. La quantité d'eau gelée est cependant bien inférieure à ce que l'on trouve sur Terre, mais représente tout de même l'équivalent de l'inlandsis du Groenland. Pas mal pour cette planète qui, si elle a connu de l'eau liquide à sa surface il y a environ 3 milliards d'années, présente aujourd'hui un climatclimat totalement aride.

    Sur cette photographie acquise le 17 avril 2000 par la <em>Mars Orbiter Camera</em> (MOC) de <em>Mars Global Surveyor</em> (MGS), on voit la calotte polaire australe de Mars avec sa taille minimale en été. La largeur de la calotte d'est en ouest est d'environ 420 kilomètres. © Nasa
    Sur cette photographie acquise le 17 avril 2000 par la Mars Orbiter Camera (MOC) de Mars Global Surveyor (MGS), on voit la calotte polaire australe de Mars avec sa taille minimale en été. La largeur de la calotte d'est en ouest est d'environ 420 kilomètres. © Nasa

    Ces masses d'eau gelée attirent ainsi l'intérêt des scientifiques depuis de nombreuses années. Avec une question récurrente : est-il possible que de l'eau liquide soit présente à leur base, comme c'est le cas sur Terre ?

    Un signal radar suspect au niveau de la calotte du pôle Sud

    Longtemps considérée comme impossible, cette hypothèse a cependant été créditée de certaines observations en 2018. La sonde Mars Express, en orbite autour de la Planète rouge, a en effet révélé un étrange signal radar sous la calotte du pôle Sud.

    Signal radar enregistré en 2018 par Mars Express, imageant la calotte du pôle Sud de Mars. Le niveau brillant du haut représente la surface de la glace. Le niveau brillant inférieur a été interprété comme une poche d'eau liquide. © ESA, Nasa, JPL, ASI, Univ. Rome ; R. Orosei et al 2018
    Signal radar enregistré en 2018 par Mars Express, imageant la calotte du pôle Sud de Mars. Le niveau brillant du haut représente la surface de la glace. Le niveau brillant inférieur a été interprété comme une poche d'eau liquide. © ESA, Nasa, JPL, ASI, Univ. Rome ; R. Orosei et al 2018

    Un signal interprété par certains scientifiques comme une preuve de la présence d'eau liquide. Cependant, les résultats ne sont pas si clairs et laissent le doute sur la nature du ou des matériaux à l'origine de ce signal hautement réflectif capté par Mars ExpressMars Express. Certaines unités géologiques sèches pourraient en effet produire un signal similaire. De plus, étant donné les conditions climatiques extrêmement froides régnant sur la planète, l'hypothèse de la présence d'eau liquide sous la calotte glaciairecalotte glaciaire nécessiterait d'avoir à proximité une importante source de chaleur. Or, cela est problématique, car Mars est une planète tectoniquement inactive. C'est pourtant cette activité qui, sur Terre, conduit la chaleur du centre de la planète jusqu'à l'extérieur, un processus dont les volcans et le magmatisme en général, sont la principale signature. En l'absence d'une telle activité, le gradient géothermique est faible sur la Planète rouge. Trop faible pour certains scientifiques pour permettre le maintien d'eau liquide sous l'épaisseur de glace.

    Ces analyses semblaient donc sonner le glas de la présence d'eau liquide sous les calottes polaires. Mais l'histoire n'est pas terminée. Car en observant de plus près la surface de la glace au niveau du pôle Sud, précisément là où le signal radar a été identifié par Mars Express, une équipe de scientifiques a découvert une étonnante ondulation, formant une dépression de plusieurs mètres par rapport au reste de la surface gelée et s'étendant sur 10 à 15 kilomètres. Or, ces observations topographiques, acquises par la sonde Mars Global Surveyor, ne sont pas sans rappeler des structures typiques visibles à la surface des calottes polaires terrestres.

    À gauche : la topographie de la surface du pôle Sud de Mars, la ligne noire délimitant la calotte polaire. En bleu, la région utilisée pour les modélisations numériques, le carré vert représente la zone où la présence d'eau liquide est suspectée. L'épaisseur de la glace dans cette zone est d'environ 1.500 mètres. À droite : l'ondulation de la surface de la glace. En rouge, la zone surélevée de 5-8 mètres par rapport à la topographie régionale, la petite dépression de 2-4 m de profondeur en haut à droite de l'image (zone bleue). En noir, le contour de la zone où la présence d'eau liquide est supposée. © <em>University of Cambridge</em>
    À gauche : la topographie de la surface du pôle Sud de Mars, la ligne noire délimitant la calotte polaire. En bleu, la région utilisée pour les modélisations numériques, le carré vert représente la zone où la présence d'eau liquide est suspectée. L'épaisseur de la glace dans cette zone est d'environ 1.500 mètres. À droite : l'ondulation de la surface de la glace. En rouge, la zone surélevée de 5-8 mètres par rapport à la topographie régionale, la petite dépression de 2-4 m de profondeur en haut à droite de l'image (zone bleue). En noir, le contour de la zone où la présence d'eau liquide est supposée. © University of Cambridge

    La topographie de la surface glacée donne des indications sur ce qu'il y a en dessous

    En effet, sur Terre, la présence d'eau liquide affecte fortement la topographie de surface des calottes polaires. Comme une empreinte inversée, les lacs d'eau liquide à la base de la calotte modifient la vitesse d'écoulement de la glace sus-jacente. Cette anomalieanomalie locale dans la vitesse d'écoulement va impacter la surface de la glace, en y créant une dépression, associée à une zone surélevée en aval du lac.

    Si ce type d'architecture de la surface gelée est un indice fiable de la présence d'eau liquide sur Terre, pourquoi n'en serait-il pas de même pour Mars ? Afin d'appuyer cette hypothèse, les scientifiques ont mené une série de simulations numériquessimulations numériques afin de tester, dans les conditions martiennes, l'effet qu'aurait la présence d'eau liquide sur la topographie de la calotte polaire.

    Les résultats, publiés dans Nature Astronomy, montrent une étonnante similarité entre les modèles et les observations. Ils suggèrent que de l'eau liquide doit bien être présente à la base de la calotte du pôle Sud de Mars et que la source de chaleur nécessaire au maintien de l'état liquideétat liquide de l'eau proviendrait d’une activité magmatique relativement récente dans l'histoire de Mars.

    Ces résultats montrent encore une fois à quel point la comparaison des structures terrestres et martiennes permet d'apporter des contraintes sur certaines questions essentielles, comme celle de la présence d'eau liquide sur Mars, actuellement ou dans le passé. Un point d'importance majeur dans la recherche d'une potentielle vie martienne.                           


    Y a-t-il vraiment de l’eau liquide sous le pôle Sud de Mars ?

    Il y a quelques mois, des chercheurs annonçaient avoir vu de l'eau liquide sous la glace du pôle Sud de Mars. Aujourd'hui, d'autres n'hésitent pas à parler de mirage. Un mirage qui semble vouloir se dissoudre peu à peu. À mesure que de nouvelles interprétations des données sont proposées.

    Article de Nathalie MayerNathalie Mayer publié le 30 janvier 2022

    Depuis quelques années, les chercheurs envisagent que de l'eau à l'état liquide pourrait se cacher sous le pôle sud de la planète Mars. En 2018, des « échos » de signaux radio avaient en effet révélé une zone hautement réfléchissante à environ 1,4 kilomètre sous la glace, puis, même plusieurs de ces zones, suggérant la présence d'un réseau de lacs souterrains. Mais, aujourd'hui, des astronomes de l’université du Texas à Austin (États-Unis) remettent cette conclusion en cause.

    Elle avait déjà été bousculée par des travaux qui mettaient en doute la possibilité de maintenir de l'eau à son état liquide du côté du pôle Sud de Mars compte tenu des conditions qui règnent sur la région. D'autres avaient montré -- par analogieanalogie avec ce qui se passe sur notre Terre -- que de l'argileargile gelée pourrait également produire le type d'« échos » enregistré par la sonde Mars Express. Et cette fois, les chercheurs suggèrent que le signal pourrait aussi être interprété comme renvoyé tout simplement par... de la roche volcaniqueroche volcanique !

    Grâce à un modèle informatique, des chercheurs de l’université du Texas à Austin (États-Unis) ont recouvert la surface de Mars d’une couche de 1,5 kilomètre de glace. Pour observer l’impact que cela aurait sur les échos radar. Les plaines volcaniques — ici en rouge — reflètent les ondes de la même manière que ne le ferait de l’eau liquide. © Cyril Grima, Université du Texas
    Grâce à un modèle informatique, des chercheurs de l’université du Texas à Austin (États-Unis) ont recouvert la surface de Mars d’une couche de 1,5 kilomètre de glace. Pour observer l’impact que cela aurait sur les échos radar. Les plaines volcaniques — ici en rouge — reflètent les ondes de la même manière que ne le ferait de l’eau liquide. © Cyril Grima, Université du Texas

    Quand l’eau se transforme en roches volcaniques

    Pour en arriver à cette conclusion, les astronomesastronomes ont recouvert toute la Planète rouge d'une calotte glaciaire imaginaire d'une épaisseur de l'ordre de 1,5 kilomètre. Histoire de voir ce que deviendraient alors les « échos » renvoyés par le sol martien. Et des zones réfléchissantes sont apparues à toutes les latitudeslatitudes. Là même où ont déjà été localisées des plaines volcaniques. Sur Terre, d'ailleurs, les coulées de lavelave riches en ferfer -- il y en a beaucoup sur Mars --, par exemple, peuvent laisser derrière elles des roches qui reflètent les ondes radio de la même manière.

    Mais des gisementsgisements de minérauxminéraux dans des lits de rivières asséchés aussi. De quoi orienter les recherches des astronomes qui enquêtent sur la manière dont la planète Mars s'est asséchée. Une histoire qui, en tout cas, semble vouloir montrer une fois de plus que la recherche... cherche et qu'elle progresse en faisant des erreurs.


    Mars : nouveaux soupçons de la présence de nombreux lacs sous sa surface

    La région du pôle Sud de Mars pourrait abriter de vastes lacs souterrains sous sa surface, selon une étude publiée le 16 juin par des chercheurs de la NasaNasa. En analysant les données transmises par le satellite Mars Express, les scientifiques tentent de comprendre et théoriser la composition des couches inférieures de la Planète rouge.

    Article de Dorian De SchaepmeesterDorian De Schaepmeester paru le 03/07/2021

    Illustration de la sonde Maven survolant le pôle nord de Mars. © dottedyeti, Adobe Stock
    Illustration de la sonde Maven survolant le pôle nord de Mars. © dottedyeti, Adobe Stock

    La surface aride de Mars abriterait-elle de vastes points d'eau ? Une étude publiée le 16 juin dans le Geophysical Research Letters théorise la présence de lacs souterrains sur la Planète rouge, plus précisément sous son pôle Sud. Des équipes de chercheurs de la Nasa, menées par le Dr. Jeffrey J. Plaut, ont analysé les données recueillies pendant plus de 15 ans par la sonde Mars Express de l’ESA, en orbite autour de Mars depuis décembre 2003. C'est notamment l'instrument MarsisMarsis (Mars Advanced Radar for Subsurface and IonosphèreIonosphère Sounding) qui a permis cette avancée dans la compréhension de la géologiegéologie martienne.

    Représentation 3D de Mars Express survolant la Planète rouge. © ESA, Nasa
    Représentation 3D de Mars Express survolant la Planète rouge. © ESA, Nasa

    Plongée souterraine avec Marsis

    Cela fait maintenant 16 ans que Marsis s'affaire dans sa quête de l’eau sur Mars, depuis sa mise en activité en 2005. L'instrument fonctionne selon une mécanique « simple », déjà utilisée sur terre pour sonder les profondeurs glaciaires de l'ArctiqueArctique et de l'AntarctiqueAntarctique. Grâce à deux longues antennes de 20 mètres chacune, Marsis pulse des signaux radio vers la surface de la planète, en ciblant précisément une zone à étudier. L'onde projetée va alors se réfléchir. Cet « écho » va être réceptionné par une seconde antenne de sept mètres installée sur la sonde. Plusieurs informations sont codées dans le signal réfléchi et renseignent sur son parcours dans le sol martien. On étudie notamment l'intensité du signal toutes ces informations sont ensuite traitées par les équipes de chercheurs sur Terre pour déterminer la composition des éléments traversés.

    Marsis est un outil polyvalent, sondant de l'atmosphèreatmosphère martienne aux couches inférieures de la planète. Les signaux peuvent se réfléchir jusqu'à cinq kilomètres de profondeur, dessinant la formation géologique des zones pointées grâce aux données reçues via les échos. Mais s'il y a un domaine dans lequel l'instrument performe, c'est la détection d'eau, sa principale mission. Et les résultats de 16 années de sondage du pôle Sud se sont révélés intrigants...

    La calotte polaire sud de Mars imagée par la sonde européenne Mars Express, le 17 décembre 2012. © ESA, DLR, FU Berlin, Bill Dunford
    La calotte polaire sud de Mars imagée par la sonde européenne Mars Express, le 17 décembre 2012. © ESA, DLR, FU Berlin, Bill Dunford

    La théorie des lacs souterrains

    Le pôle Sud de Mars est une vaste zone de la taille de la France composée de différentes couches alternant de la glace simple, de la poussière et de la neige carbonique, pouvant atteindre une épaisseur de 3,7 kilomètres. Les signaux radio projetés par Marsis ont joué un rôle prédominant dans la cartographie de cette partie de la planète. Au contact de la glace, les ondes ont une réaction similaire lors de leur réflexion à celle qu'elles ont lorsqu'elles traversent des roches et autres matériaux solidessolides, avec des variations subtiles mais un écho affaibli.

    Mais dans certains secteurs, les échos captés par Mars Express ont mis en valeur une surbrillancesurbrillance des signaux. L'intensité de ces rayonnements est rapidement associée à la présence d’eau sous la surface du pôle Sud, les composants les plus conducteurs s'avérant être les plus réfléchissants.

    Cartographie du pôle Sud de Mars, la zone rouge étant la région la plus épaisse. © Nasa, JPL
    Cartographie du pôle Sud de Mars, la zone rouge étant la région la plus épaisse. © Nasa, JPL

    À cette assertion, un détail fait défaut. Certaines analyses proviennent de moins d'un kilomètre sous la surface, à une profondeur où la température est estimée à -63 °C, ce qui impliquerait une eau gelée. Selon Aditya Khuller, coautrice de l'étude et doctorante à l'université d'État d'Arizona, la présence de points d'eau liquide s'expliquerait par une activité volcanique souterraine pouvant réchauffer la couche glaciaire.

    « Nous n'avons cependant pas noté de réelle probabilité d'une telle activité sous le pôle Sud, cela ne pourrait donc pas expliquer la présence d'eau sous forme liquide dans cette zone », ajoute-t-elle dans un article pour la Nasa.

    Le mystère reste donc entier. Nul ne peut affirmer avec certitude que les couches inférieures de la calotte polaire de Mars abriteraient de l'eau, mais les équipes du Dr. Plaut sont à l'œuvre pour déterminer ce qui pourrait provoquer une si grande intensité des échos radar. Avec plus de 44.000 sondages effectués par Mars Express sur ce secteur, le satellite devrait encore effectuer quelques tours de pistes jusqu'en 2022. L'occasion rêvée pour trouver la clé de l'énigme ?


    Mars : plusieurs lacs d'eau salée ont été découverts sous sa surface !

    Article d'Adrien CoffinetAdrien Coffinet publié le 4 octobre 2020

    En 2018, un lac avait été trouvé sous la surface de Mars, près du pôle Sud de la planète. Maintenant, trois autres réservoirs souterrains viennent compléter la liste. La nature de leur contenu - eau liquide ou non - continue cependant de faire débat.

    Il y a deux ans (voir article ci-dessous) a été rapportée la découverte d'un grand lac d'eau salée sous la glace au pôle Sud de Mars. Cette découverte avait alors suscité beaucoup d'enthousiasme mais aussi de scepticisme. En effet, cette conclusion était basée sur seulement 29 observations faites de 2012 à 2015, et de nombreux chercheurs avaient alors déclaré qu'ils avaient besoin de plus de preuves pour étayer cette affirmation.

    Une nouvelle étude menée par Sebastian Emanuel Lauro, chercheur à l'Université de Rome III, et ses collègues, publiée le 28 septembre dans Nature Astronomy, confirme la présence de ce lac et annonce la découverte de trois autres étendues liquides souterraines. Ces nouveaux résultats proviennent les données radar de l'orbiteur européen Mars Express et d'un ensemble de données plus large comprenant 134 observations de 2012 à 2019.

    L'équipe a utilisé un instrument radar sur Mars Express, appelé Mars Advanced Radar for Subsurface and Ionosphere Sounding (Marsis), pour sonder la région polaire sud de la planète. Marsis envoie des ondes radio qui rebondissent sur des couches de matériaux à la surface et sous la surface de la planète. La manière dont le signal est réfléchi indique le type de matériaumatériau présent à un endroit particulier (roche, glace, eau...). Une méthode similaire est utilisée pour identifier les lacs glaciaires souterrains sur Terre. L'équipe a détecté des zones de haute réflexivité qui, selon elle, indiquent des masses d'eau liquide emprisonnées sous plus d'un kilomètre de glace martienne.

    Les lacs sont répartis sur environ 75.000 kilomètres carrés, l'équivalent de la région Occitanie. Le plus grand lac central mesure 30 kilomètres de diamètre et est entouré de trois lacs plus petits, chacun de quelques kilomètres de large.

    Illustration de la sonde <em>Mars Express</em>, en orbite autour de la Planète rouge depuis 2003. © ESA, ATG medialab, DLR/FU Berlin, CC by-sa 3.0 IGO
    Illustration de la sonde Mars Express, en orbite autour de la Planète rouge depuis 2003. © ESA, ATG medialab, DLR/FU Berlin, CC by-sa 3.0 IGO

    De l'eau salée, de la boue ou encore autre chose ?

    Pour que ces lacs puissent rester liquides malgré les températures glaciales régnant sur Mars, ils doivent nécessairement être salés. En effet, bien qu'ils soient profondément sous la surface, la petite quantité de chaleur de l'intérieur de Mars ne peut pas suffire à faire fondre la glace. Bien que la découverte d'eau liquide conduise généralement à la question de la présence ou non de formes de vie présentes ou passées, il est probable que ces lacs soient trop salés pour abriter des formes de vie telles qu'on les connaît sur Terre.

    La présence de ces lacs eux-mêmes est cependant encore débattue. Bien que les dernières découvertes confirment l'observation de 2018, tout le monde n'est pas convaincu que les régions identifiées soient de l'eau liquide. Mike Sori, géophysicien planétaire à l'université Purdue de West Lafayette, dans l'Indiana, pense que « [si] le matériau brillant est vraiment de l'eau liquide, [alors] il est plus probable qu'il représente une sorte de gadoue ou de boue ». Jack Holt, planétologue à l'université de l'Arizona à Tucson et membre de l'équipe scientifique du Mars Shallow Radar (Sharad) sur le Mars Reconnaissance OrbiterMars Reconnaissance Orbiter de la Nasa, dit que, même s'il pense que les dernières données sont correctes, « [il] n'y a pas assez de flux de chaleur pour supporter une saumuresaumure ici, même sous la calotte glaciaire ».

    La mission chinoise Tianwen-1, qui entrera en orbite autour de Mars en février 2021 et déploiera un roverrover à sa surface, pourrait offrir un moyen de vérifier ces affirmations.


    Mars : un lac d'eau liquide découvert sous sa surface !

    Article de Xavier DemeersmanXavier Demeersman publié le 25 juillet 2018

    Tout indique qu'il existe un lac d'eau liquide d'environ 20 kilomètres de long sous la surface de Mars, près du pôle sud. Après des années d'enquête et de sondages du sol avec le radar de la sonde européenne Mars Express, les chercheurs en sont presque convaincus. Y en-a-t-il d'autres ? Combien sont-ils ? Y a-t-il de la vie dans cette poche d'eau souterraine ?

    Une grande nouvelle, et pour le moins rafraîchissante, nous vient de Mars. Une équipe de chercheurs pense avoir découvert un grand réservoir d'eau liquide et salée dans le sous-sol martien non loin de la calotte polaire australe. Il mesurerait environ 20 kilomètres de large et représente le plus grand volumevolume d'eau liquide découvert à ce jour sur Mars. « Cette découverte passionnante est un point culminant pour la science planétaire et contribuera à notre compréhension de l'évolution de Mars, de l'histoire de l'eau sur notre planète voisine et son habitabilité », a déclaré Dmitri Titov, qui travaille pour la mission Mars Express.

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    Un mystérieux lac sous-glaciaire caché en Antarctique

    Justement, c'est cette mission de l'ESAESA qui a fait la découverte. En orbite autour de la Planète rouge depuis bientôt 15 ans, la sonde spatiale et son instrument Marsis (Mars Advanced Radar for Subsurface and Ionospheric Sounding) ont en effet mis en évidence la possibilité d'un lac stable d'eau liquide logé sous une couche de glace et de poussière d'environ 1,5 kilomètre d'épaisseur. Depuis des années, le radar sonde le sous-sol de Mars pour en deviner la composition et aussi à la recherche d'éventuels indices de présence d'eau, de cavités, etc. C'est donc dans une portion de quelque 200 kilomètres de long, près du pôle sud, que l'équipe a fait cette découverte. Et pour que Marsis repère cette masse d'eau, il faut qu'elle soit profonde d'au moins plusieurs dizaines de centimètres.

     <br>Localisation du réservoir d’eau liquide détecté sous la surface par Mars Express. © Nasa, Viking, Themis,   ESA, Nasa, JPL, ASI, Université Rome, R. Orosei et al 2018
     
    Localisation du réservoir d’eau liquide détecté sous la surface par Mars Express. © Nasa, Viking, Themis,   ESA, Nasa, JPL, ASI, Université Rome, R. Orosei et al 2018

    Deux indices appuyant l’existence du lac d’eau liquide sur Mars

    En réalité, des indices de son existence avaient déjà été pointés depuis plusieurs années, des signaux brillants qui pouvaient être plus que des roches et de la glace. Mais les chercheurs voulaient en avoir le cœur net car les données de Marsis n'étaient pas toujours les mêmes à chaque survolsurvol. L'équipe de l'instrument dirigée par Roberto Orosei, qui est aussi l'auteur principal de l'étude, s'est ensuite aperçue que l'ordinateurordinateur de bord de la sonde lissait d'éventuelles anomalies afin de compresser les données transmises à la Terre. Rectifications faites, les passages suivants au-dessus de la zone, entre 2012 et 2015, ont confirmé la présence de ces taches brillantes interprétées comme de l'eau liquide. C'était sous leurs yeuxyeux depuis plusieurs années. « Cette anomalie souterraine sur Mars a des propriétés radar qui correspondent à l'eau ou à des sédimentssédiments riches en eau », a précisé l'auteur principal de l'article scientifique paru dans Science.

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    Les chercheurs ont trouvé aussi un autre indice tangible : la permittivitépermittivité diélectriquediélectrique, plus grande pour de l'eau liquide que pour de la glace, et qui dans cette affaire apparaît plus importante dans cette zone qu'ailleurs sur le reste du globe martien. Cela invite donc à y croire mais les scientifiques préfèrent la pondération et en parlent encore au conditionnel. Car, comment de l'eau pourrait demeurer durablement liquide dans le sous-sol de Mars, une planète très froide aujourd'hui ? La réponse vient peut-être des perchlorates présents à la surface de Mars. Ces sels pourraient en effet abaisser le point de fusionfusion.

    Exemple de profil radar pour l'une des 29 orbites de la région d'étude de 200 x 200 km dans la région du pôle sud de Mars. © ESA, Nasa, JPL, ASI, Université Rome, R. Orosei et al 2018
    Exemple de profil radar pour l'une des 29 orbites de la région d'étude de 200 x 200 km dans la région du pôle sud de Mars. © ESA, Nasa, JPL, ASI, Université Rome, R. Orosei et al 2018

    Y a-t-il de la vie dans le lac martien ?

    Alors, évidemment, si cette découverte se confirme, la première question qui vient à l'esprit est : peut-il y avoir de la vie dans le lac ? Impossible d'y répondre pour l'instant. Cela dépend de la température et du taux de sel. Une vie terrestre n'y résisterait pas, estime Roberto Orosei. Mais des formes de vie apparues sur Mars pourraient y avoir trouvé refuge. Rappelons qu'avant un changement climatiquechangement climatique majeur qui a progressivement refroidi et asséché la planète il y a quelque 3,5 milliards d'années, Mars était couverte de lacs, de rivières et de mers. Il faisait bien plus chaud et humide qu'aujourd'hui, comme l'a montré le rover CuriosityCuriosity qui explore un ancien lac. Il y avait de l'eau liquide en surface. Et probablement qu'il y en a encore aujourd'hui un peu partout sous la surface. « Il y a d'autres domaines qui semblent être similaires, a déclaré Elena Pettinelli, de l'université Roma Tre, qui a cosigné ces recherches. Il n'y a aucune raison de dire que c'est le seul endroit ». Pour le savoir, il n'y a donc plus qu'à y aller. D'autres missions et, qui sait ?, peut-être bientôt des expéditions humaines. En tout cas, de l'eau sur Mars il y en a toujours, ce qui peut être intéressant pour les futures missions humaines. Et on est bien curieux de savoir quel goût elle a.

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    Un ancien lac repéré sur Mars !

    Article de Jean-Luc GoudetJean-Luc Goudet publié le 18 juin 2009

    Détecté grâce à l'orbiteur MRO, un canyon montre les restes d'un lac de 200 kilomètres carrés. D'après ses découvreurs, il était encore empli d'eau liquide à une époque où l'on pensait jusque-là que Mars était devenue froide et sèche.

    Sur Mars, les traces d'écoulements importants d'eau liquide dans un lointain passé ne manquent pas. Les engins en orbite et les robotsrobots roulants ont amplement démontré la présence de glace d'eau et de restes d'érosion due à des écoulements liquides, parfois importants. Aujourd'hui, les planétologues s'accordent pour décrire une période chaude et humide de l'histoire martienne, durant l'époque dite du NoachienNoachien, entre 4,1 et 3,7 milliards d'années avant le présent. Ainsi, dans le passé mouvementé de la planète Mars et pendant un temps assez long, peut-être des millions d'années, de l'eau aurait coulé et recouvert de vastes surfaces.

    Une équipe d'une université américaine (University of Colorado at Boulder) vient de confirmer cette hypothèse de manière spectaculaire en repérant un ancien lac dans Shalbatana Vallis, près de l'équateuréquateur (par 7° 50 N et 42° 05 W), l'une des vallées qui se jettent dans le bassin Chryse Planitia. A l'intérieur, un long canyon de 48 kilomètres de longueur a été détecté grâce à l'instrument HiRise (High Resolution Imaging Science Experiment) de la sonde MRO (Mars Reconnaissance Orbiter), offrant une résolutionrésolution de un mètre. Les scientifiques ont pu mettre en évidence la trace du rivage et même localiser d'anciennes plages.

    Un site d'atterrissage potentiel ?

    Il a ainsi été possible d'estimer les dimensions du volume d'eau emprisonné là. Le lac Shalbatana, puisque c'est désormais son nom, s'étendait sur une surface de plus de deux cents kilomètres carrés (à peu près celle du lac de Neuchâtel, en Suisse), pour une profondeur maximale de près de cinq cents mètres.

    La datation de ce lac a apporté elle aussi une surprise. D'après les auteurs, Gaetano Di Achille, Brian Hynek et Mindi Searls (Laboratory for Atmospheric and Space Physics), qui publient leurs résultats dans la revue Geophysical Research Letters, ce lac s'est formé il y a environ 3,4 milliards d'années seulement, durant la période appelée Hespérien. Or, les planétologues pensaient jusque-là que Mars était alors froide et asséchée depuis déjà trois cents millions d'années.

    Les scientifiques attirent l'attention sur les traces de deltasdeltas qui bordent ce lac fossilefossile. « Sur Terre, les deltas et les lacs enregistrent très bien les signes d'une vie disparue » explique Gaetano Di Achille. Cette région pourrait bien constituer une cible de choix pour de futures missions martiennesmissions martiennes.