La vie est-elle apparue à partir de processus chimiques purement terrestres ou faut-il faire intervenir des facteurs extraterrestres dont les astéroïdes et les comètes gardent la mémoire ? Pour le savoir, les exobiologistes analysent notamment les échantillons de Ryugu ramenés sur Terre par la sonde Hayabusa-2. Ils annoncent qu'ils y ont découvert une des briques de l'ARN.


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    Le 25 avril 2023, cela fera 70 ans que le généticiengénéticien américain James Watson et le physicienphysicien britannique Francis CrickFrancis Crick ont publié un article où ils décrivaient pour la première fois la structure en trois dimensions de l'ADN : une double hélice enroulée autour d'un axe portant une série de bases azotéesbases azotées, entrant dans la composition de ce qui est appelé un nucléotidenucléotide, codant la synthèse des protéinesprotéines et finalement portant toute l'information génétiquegénétique permettant à un organisme vivant de se reproduire. Pour cette découverte, ils avaient bénéficié des résultats de diffraction aux rayons X obtenus sur des cristaux d'ADNADN, réalisés par Maurice Wilkins et surtout Rosalind Franklin. La chercheuse décédera malheureusement d'un cancercancer en 1958, à Londres, quatre ans avant que Watson, Crick et Wilkins ne soient distingués par le comité Nobel.


    Une vidéo sur le fonctionnement de l'ADN et de l'ARN dans les cellules. © Inserm

    Les années qui vont suivre la découverte de James Watson et Francis Crick vont permettre de mieux comprendre le rôle de l'ADN ainsi que de l'ARNARN. En 1953, c'est aussi l'année où le tout jeune chimiste Stanley Miller, alors étudiant en thèse du prix Nobel de chimie Harold Urey, a montré dans une expérience restée célèbre qu'il était possible de fabriquer des acides aminés, les briques des protéines, à partir d'une atmosphèreatmosphère que l'on pensait alors similaire à celles de JupiterJupiter et de SaturneSaturne.

    Un montage d'artiste pour l'échantillonnage de matériaux sur l'astéroïde Ryugu contenant de l'uracile et de la niacine par le vaisseau spatial Hayabusa-2. © Nasa Goddard, Jaxa, Dan Gallagher
    Un montage d'artiste pour l'échantillonnage de matériaux sur l'astéroïde Ryugu contenant de l'uracile et de la niacine par le vaisseau spatial Hayabusa-2. © Nasa Goddard, Jaxa, Dan Gallagher

    Une origine cosmique de la vie ?

    Les spéculations sur l'origine de la vie vont donc dès lors combiner des réflexions et des expériences sur l’apparition naturelle de l’ADN et de l’ARN en raison de processus cosmochimiques sur Terre et ailleurs dans l’Univers dont on peut trouver les traces dans les météorites et les comètes. De nos jours, on va même prélever directement de la matière sur les astéroïdesastéroïdes dans ce but. La raison en est que l'on pense que certaines des moléculesmolécules prébiotiquesprébiotiques ayant permis à la vie sur notre Planète bleue d'apparaître y ont probablement été amenées par un bombardement primitif d'astéroïdes et de comètes, contribuant à la chimiechimie des océans de la toute jeune Terre. On ne sait pas toutefois à quel point cet apport de matériaux prébiotiques était nécessaire car les océans et notamment les sources hydrothermales de la fin de l'HadéenHadéen ou du début de l'ArchéenArchéen pourraient fort bien avoir fait tout le travail seuls.

    Toujours est-il qu'une équipe internationale, dirigée par Yasuhiro Oba de l'université d'Hokkaido au Japon, vient de faire une publication intéressante dans Nature Communications concernant des analyses des échantillons prélevés sur l'astéroïde Ryugu par la sonde Hayabusa-2sonde Hayabusa-2 de la Jaxa, l'Agence spatiale japonaiseAgence spatiale japonaise.

    Ramenés sur Terre et étudiés en laboratoires, ces échantillons ont déjà fait l'objet de plusieurs analyses et cette fois-ci, c'est la présence d'une base azotée particulière, propre à l'ARN, qui vient d'être mise en évidence : l'uracileuracile.

    Photographies des échantillons A0106 et C0107 prélevés sur l'astéroïde Ryugu, lors du 1<sup>er</sup> échantillonnage d'atterrissage et du 2<sup>e</sup> échantillonnage d'atterrissage, respectivement. © Yasuhiro Oba, et al., <em>Communication Nature</em>.
    Photographies des échantillons A0106 et C0107 prélevés sur l'astéroïde Ryugu, lors du 1er échantillonnage d'atterrissage et du 2e échantillonnage d'atterrissage, respectivement. © Yasuhiro Oba, et al., Communication Nature.

    Les chercheurs annoncent également la présence de l'acide nicotiniqueacide nicotinique, également connu sous le nom de vitamine B3vitamine B3 ou niacineniacine, qui est un cofacteur important pour le métabolismemétabolisme des organismes vivants.

    Dans un communiqué de l'université d'Hokkaido, Yasuhiro Oba précise que « les scientifiques ont déjà trouvé des nucléobases et des vitamines dans certaines météorites riches en carbonecarbone, mais il y avait toujours la question de la contaminationcontamination par exposition à l'environnement terrestre. Étant donné que le vaisseau spatial Hayabusa-2 a collecté deux échantillons directement de l'astéroïde RyuguRyugu et les a livrés sur Terre dans des capsules scellées, la contamination peut être exclue ».

    Et le chercheur ajoute : « La découverte d'uracile dans les échantillons de Ryugu renforce les théories actuelles concernant la source des nucléobases de la Terre primitive. La mission Osiris-REx de la Nasa livrera des échantillons de l'astéroïde Bennu cette année, et une étude comparative de la composition de ces astéroïdes fournira des données supplémentaires pour s'appuyer sur ces théories. »

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