Grâce aux séismes détectés à la surface de Mars, il a été possible de déterminer la taille du noyau de la Planète rouge. Mesurant entre 1.810 et 1.860 kilomètres de rayon, ce noyau s'avère plus grand et moins dense qu'estimé jusqu'alors.


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    Les planètes telluriques du système solaire ont une structure en plusieurs couches, avec un noyau métallique surmonté d'un manteau et d'une croûte silicatés. Cependant, la taille précise de ces différentes couches n'est pas directement mesurable, étant donné qu'il est impossible de creuser à des dizaines, centaines, milliers de kilomètres de profondeur. Pour déterminer les dimensions de ces couches, paramètres cruciaux pour comprendre comment les planètes se sont formées et ont évolué, il faut donc utiliser des moyens indirects, comme les ondes sismiquesondes sismiques.

    Sur Terre, cette technique a été développée à partir de la fin du XIXe siècle, quand on s'est aperçu que des ondes, produites par un séisme à un bout de la planète, pouvaient être détectées à des milliers de kilomètres de là. L'hypothèse, émise par John Milne en 1883, fut confirmée par Ernst von Rebeur-Paschwitz en 1889. Cela conduisit à la découverte de la discontinuité croûte-manteau par Andrija Mohorovičić en 1909, de la limite noyau-manteau par Beno Gutenberg en 1914, puis de celle entre le noyau externe et le noyau interne par Inge Lehmann en 1936.

    Un sismomètre à l'écoute de Mars

    Pour faire le même genre d'analyses ailleurs que sur Terre, il a fallu attendre les missions ApolloApollo. Les séismesséismes détectés grâce aux sismomètressismomètres déposés sur la Lune ont pu être analysés et ont alors permis de mieux cerner la structure de notre satellite. L'idée est donc de faire de même pour Mars.

    L'atterrisseur InSight de la Nasa, qui s'est posé sur la Planète rouge en 2018, est équipé d'un sismomètre, Seis. Selon Philippe Lognonné, géophysicien à l'Institut de PhysiquePhysique du Globe de Paris (France), qui dirige l'équipe de Seis, InSight a mesuré plus de 500 séismes depuis son atterrissage, la plupart relativement petits, mais près de 50 d'entre eux étaient de magnitudemagnitude 2 à 4, suffisamment puissants pour fournir des informations sur l'intérieur de la planète. Lorsque ces séismes se produisent, l'atterrisseur mesure deux types d'ondes sismiques : celles qui sont près de la surface et voyagent pratiquement en ligne droite du foyerfoyer du séisme jusqu'à l'atterrisseur, et celles qui rebondissent à l'intérieur de la planète avant d'atteindre les détecteurs.

    Autoportrait d'InSight pris début 2019 après le déploiement de son sismomètre. © Nasa/JPL-Caltech
    Autoportrait d'InSight pris début 2019 après le déploiement de son sismomètre. © Nasa/JPL-Caltech

    L'équipe d'InSight a découvert que de nombreux enregistrements comprenaient un ensemble d'ondes sismiques dont la forme suggérait qu'elles rebondissaient sur la frontière entre le manteaumanteau de la planète et son noyau. Ces ondes, arrivées environ 500 secondes après les premiers tremblements en surface, ont permis de calculer que le noyau de Mars a un rayon d'environ 1.810 à 1.860 kilomètres, environ la moitié du rayon de la Planète rouge et du noyau de la Terrenoyau de la Terre.

    Un noyau plus gros et moins dense

    Cette taille se situe dans le haut de la fourchette des estimations précédentes, ce qui implique que le noyau de Mars pourrait être moins dense qu'estimé jusqu'alors. Cela pourrait signifier que l'intérieur de Mars est plus riche en éléments relativement légers, comme l'oxygèneoxygène, en plus du ferfer et du soufresoufre qui constituent une grande partie de sa composition. Pour reproduire les conditions à l'intérieur des noyaux planétaires, d'autres chercheurs ont soumis des combinaisons de différents éléments chimiqueséléments chimiques à des pressionspressions et des températures élevées. Selon Edgar Steenstra, géochimiste à la Carnegie Institution for Science à Washington (États-Unis), la densité du noyau martien estimée grâce à InSight est en accord avec bon nombre de ces estimations en laboratoire.

    Vue d'artiste de la structure interne de Mars. © IPGP/David Ducros
    Vue d'artiste de la structure interne de Mars. © IPGP/David Ducros

    Simon Stähler, sismologuesismologue à l'École polytechnique fédérale de Zurich (Suisse), a déclaré par ailleurs que « nous pouvons rechercher des signes d'un possible noyau interne solidesolide, même si c'est peu probable qu'il y en ait un ». Toutes les mesures de l'atterrisseur, à ce jour, sont en effet cohérentes avec un noyau entièrement fondu. Les données sismiques suggèrent également que le manteau supérieur, qui s'étend jusqu'à environ 700 à 800 kilomètres sous la surface, contient une zone de matériaumatériau épaissi dans laquelle l'énergieénergie sismique se déplace plus lentement.

    InSight est actuellement en activité réduite, à cause de la poussière qui s'est accumulée sur ses panneaux solaires. Mars approche par ailleurs du point de son orbiteorbite le plus éloigné du SoleilSoleil, ce qui réduit les possibilités de recharge de l'engin.