Scrutant des dizaines de milliers d’étoiles en continu et durant plusieurs mois dans une direction du ciel, Kepler est donc bien « placé » pour assister à l’explosion d’une étoile quand elle survient sans prévenir. Le satellite a pu en surprendre dont la luminosité n’a duré que quelques jours seulement au contraire des supernovae « typiques ». Des chercheurs pensent avoir trouvé l’explication à ces phénomènes étonnants nommés Felt.

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    Grâce aux observations du satellite Kepler, une équipe d'astrophysiciensastrophysiciens pense avoir résolu le mystère des Felt, acronyme de Fast-Evolving Luminous Transient que l'on pourrait traduire en français par phénomène « transitoire lumineux à évolution rapide ». Découverts il y a une dizaine d'années, les Felt ont stupéfait les scientifiques car ils ne ressemblent pas aux supernovaesupernovae habituelles dont la luminositéluminosité peut durer plusieurs semaines. Rares, les Felt brillent intensément durant quelques jours seulement, ce qui est 10 fois plus rapide qu'une supernova « classique ».

    Mais comment expliquer ce phénomène ? Quelle est la véritable nature d'un Felt ? Pour tenter de trouver une réponse, les chercheurs se sont tournés vers Kepler. Le télescope spatialtélescope spatial lancé en 2009, connu surtout pour avoir découvert des milliers d'autres mondes par la méthode du transit -- plus de 2.300 exoplanètes dans son escarcelle auxquelles s'ajoutent 2.245 candidates -- est aussi très précieux pour les scientifiques qui étudient les étoiles car il surveille quasiment en continu des portions du ciel pendant plusieurs mois, enregistrant des données toutes les 30 minutes. Pour les astronomesastronomes qui disposent ainsi d'un volume important de mesures très précises de la luminosité de milliers d'étoiles, c'est une manne. Et lorsqu'une étoile explose dans notre galaxie ou au-delà, dans la direction où Kepler regarde, ils recueillent alors des informations sur leurs derniers soubresauts et ce qui s'ensuit. Ce que ne peuvent pas faire, hélas, les télescopes terrestres, lesquels passent souvent à côté de phénomènes aussi brefs que les Felt, ou alors ils arrivent trop tard, vers la fin de l'évènement. Les données manquent.

    Illustration du scénario probable expliquant les Felt. D’abord, la géante rouge en fin de vie expulse de la matière formant ainsi plusieurs couches tout autour d’elle (1). L’étoile s’effondre sur elle-même (2) et explose en supernova. L’onde de choc frappe la coquille et l’illumine (3). © Nasa, ESA, A. Feild (STScI)

    Illustration du scénario probable expliquant les Felt. D’abord, la géante rouge en fin de vie expulse de la matière formant ainsi plusieurs couches tout autour d’elle (1). L’étoile s’effondre sur elle-même (2) et explose en supernova. L’onde de choc frappe la coquille et l’illumine (3). © Nasa, ESA, A. Feild (STScI)

    Un nouveau type de supernova ?

    Pour l'équipe tout semble plus clair maintenant. Les données de Kepler engrangées sur le cas KSN 2015K leur ont donc permis d'éliminer plusieurs théories alternatives pour expliquer la luminosité furtive des Felt. Celle-ci ne serait donc pas provoquée par la rémanencerémanence d'un sursaut gamma et ne serait pas non plus le fruit d'une supernova dopée par un magnétarmagnétar, ou encore d'une supernova de type Ia ratée, comme cela avait été supposé.

    Les Felt semblent être un nouveau type de supernova dont la luminosité est renforcée par son environnement. Il s'agirait donc de géantes rougesgéantes rouges enrobées d'une ou plusieurs couches de gazgaz et de poussière qu'elles éjectent, embrasée(s) par l’onde de choc déclenchée par l’étoile qui s'effondre sur elle-même. La plus grande partie de l'énergie cinétiqueénergie cinétique est alors convertie en lumièrelumière. Les auteurs de l'étude qui vient de paraître dans Nature Astronomy expliquent que « contrairement aux supernovae de type Ia, la courbe de lumière de KSN 2015K n'était pas alimentée par la désintégration des éléments radioactifs ».

    « Nous avons recueilli une courbe de lumière impressionnante, a déclaré l'auteur principal Armin Rest, du STScI (Space Telescope Science Institute). Grâce à Kepler, nous avons pu contraindre le mécanisme et les propriétés de l'explosion, exclure des théories alternatives et arriver à l'explication du modèle de la couche dense. C'est une nouvelle façon pour les étoiles massives de mourir et de distribuer la matièrematière dans l'espace. Avec Kepler, nous sommes maintenant en mesure de connecter les modèles aux données », se réjouit-il.

    Les chercheurs ont pu déterminer que la dernière coquille de matière éjectée par l'étoile date de moins d'un an avant l'explosion finale. Et selon eux, les Felt étaient des étoiles subissant des « expériences de mort imminente », évènements précurseurs de la supernova.

    Kepler poursuit à présent sa mission K2K2 mais la NasaNasa a expliqué il y a quelques jours que le satellite approchait de la panne sèche. La bonne nouvelle est que son « successeur » Tess (Transiting Exoplanet Survey SatelliteTransiting Exoplanet Survey Satellite) est prêt à partir. Lancement prévu le 16 avril. « Avec le lancement imminent du nouveau télescope spatial de la Nasa, nous espérons trouver encore plus de ces explosions rares et violentes », s'enthousiasme Brad Tucker, coauteur de l'article et chercheur à l'ANU (Australian National University). Encore plus de données pour mieux comprendre ce phénomène et affirmer ou infirmer cette explication.