En regardant le ciel en direction du centre de notre galaxie, les Australopithèques ont peut-être été les témoins d’une formidable explosion. Une éruption cataclysmique qui, selon les chercheurs, s’est produite il y a quelque 3,5 millions d’années, propulsant un rayonnement ionisant de part et d’autre de notre Voie lactée et jusqu’à 200.000 années-lumière de nous. Le responsable : le trou noir supermassif Sagittarius A !


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    En 2013, des astronomesastronomes avaient découvert une raie d'émission H alpha - une raie d'émission particulière de l'atome d'hydrogène dans le visible - quelque part dans le grand courant de Magellan. Juste dans l'alignement d'immenses bulles de Fermi découvertes quelques années plus tôt, de part et d'autre de notre bulbe galactique. Pour eux, l'explication la plus plausible de ces traces d'une explosion gigantesque était à chercher du côté du trou noir supermassif situé au centre de notre Voie lactée, Sagittarius A (Sgr A*).

    Aujourd'hui, des données fournies par le télescope spatial Hubble apportent de nouveaux éléments. Certains rapports d'absorptionabsorption dans l'ultraviolet révèlent, dans le grand courant de Magellan, des zones fortement ionisées par une source extrêmement énergétique. « Nous montrons qu'il s'agit de nuagesnuages pris dans le faisceau d'un immense cônecône d'ionisationionisation bipolaire résultant d'une flambée de Seyfert associée à Sgr A* », expliquent les chercheurs d'Astro 3D (Australie).

    Comprenez que deux cônes en expansion sont partis d'une petite région proche du centre de notre Voie lactée pour s'étendre vers l'extérieur de la galaxiegalaxie. Ils ont projeté au passage des radiations ionisantes jusqu'à pas moins de 200.000 années-lumièreannées-lumière de nous, jusqu'à la traînée de gazgaz flottant dans le sillage de nos voisines, le grand nuage de Magellangrand nuage de Magellan et le petit nuage de Magellanpetit nuage de Magellan.

    Une vue d’artiste du phénomène. © James Josephides, Astro 3D, YouTube

    Nos ancêtres témoins de l’explosion

    Selon les chercheurs, un seul responsable possible : Sagittarius A, un trou noirtrou noir habituellement plutôt paisible, mais dont la massemasse est tout de même estimée à environ 4,2 millions de fois la masse du Soleil. Et aujourd'hui, grâce aux données recueillies par le télescope spatial Hubbletélescope spatial Hubble, ils nous apportent quelques précisions.

    Notre Voie lactée est plus dynamique que nous le pensions

    Le cataclysme se serait produit il y a seulement quelque 3,5 millions d'années. À l'échelle de la galaxie, c'était hier. À l'échelle de notre Planète, juste à l'époque où les Australopithèques peuplaient l'Afrique. « Cela montre que notre Voie lactée est plus dynamique que nous le pensions. Cela remet en question ce que nous imaginions de sa nature et de son évolution. Une chance tout de même que nous ne résidions pas à plus à proximité de son centre », commente LisaLisa Kewley, directrice d'Astro 3 D.

    Autre conclusion des chercheurs : l'explosion aurait duré environ 300.000 ans. Une duréedurée toujours extrêmement courte à l'échelle galactique. « Un peu comme un phare que l'on aurait allumé pendant quelques instants », conclut Joss Bland-Hawthorn, astronome à l'université de Sydney (Australie). Mais il faudra encore d'autres travaux pour compléter ces informations. Et comprendre un peu mieux le passé de notre Voie lactée.


    Une éruption géante autour du trou noir central de la Voie lactée

    Tel un super-volcansuper-volcan, le trou noir supermassiftrou noir supermassif au centre de la Voie lactée aurait généré une violente éruption il y a environ deux millions d'années, selon une étude présentée lors des rencontres de Galaxy Zoo à Sydney le 24 septembre 2013.

    Article de Xavier DemeersmanXavier Demeersman paru le 02/10/2013

    Une vue d'artiste d'un trou noir, comme celui qui se cache au centre de notre galaxie. Parfois, il se réveille : il s'est ainsi offert une forte éruption quand, sur Terre, marchaient les premiers primates du genre <em>Homo</em>. C'est ce que révèlent une lueur étrange et deux bulles géantes... © DP
    Une vue d'artiste d'un trou noir, comme celui qui se cache au centre de notre galaxie. Parfois, il se réveille : il s'est ainsi offert une forte éruption quand, sur Terre, marchaient les premiers primates du genre Homo. C'est ce que révèlent une lueur étrange et deux bulles géantes... © DP

    À l'instar de beaucoup de galaxies dans l'universunivers, la Voie lactée cache en son centre, derrière d'épais rideaux d'étoilesétoiles, de gaz et de poussières, un trou noir supermassif. En étudiant les mouvementsmouvements des étoiles de cette région, les astrophysiciensastrophysiciens ont pu évaluer sa masse à quelque quatre millions de fois celle de notre Soleil. Un beau petit monstre, certes, mais qui ne montre pas beaucoup d'appétit en ce moment. Tout au plus des petits en-cas (nuages de gaz et astéroïdesastéroïdes) qui n'ont rien à voir avec les festins observés chez certains de ses congénères voisins.

    Toutefois, il n'en a pas toujours été ainsi, comme l'a démontré récemment une équipe de chercheurs dirigée par le professeur Joss Bland-Hawthorn. Aux rencontres de Galaxy Zoo à Sydney, le chercheur à l'Observatoire astronomique australien (AAO) a présenté ses investigations, également publiées dans The Astrophysical Journal. Il a confronté ses arguments suggérant fortement une puissante éruption de Sagittarius A* (Sgr A*) par le passé.

    Sur les traces du réveil du trou noir de la Voie lactée

    Tout commence il y a plusieurs mois à l'université Stanford, lors d'un atelier de recherche sur le centre galactiquecentre galactique, quand le professeur Joss Bland-Hawthorn émet l'idée que le vaste courant de Magellan doit porter les stigmatesstigmates d'un puissant réveil de notre trou noir supermassif, tapi au centre de la Voie lactée. Et en effet, une étrange lueur intrigue la communauté scientifique depuis plus de 20 ans. « Nous n'avions pas compris la cause. Mais soudain, nous avons réalisé que cela devait être la marque, l'enregistrement fossilefossile, d'une énorme explosion d'énergieénergie survenue au centre de notre galaxie », déclare le chercheur. Un indice supplémentaire. Pour son collègue Martin Rees, « ces observations suggèrent fortement que le pistolet fume encore »...

    Bulle géante de gaz chaud perpendiculaire au plan de la galaxie, découverte par le satellite Fermi en 2010. © <em>Nasa's Goddard Space Flight Center</em>
    Bulle géante de gaz chaud perpendiculaire au plan de la galaxie, découverte par le satellite Fermi en 2010. © Nasa's Goddard Space Flight Center

    Des bulles de Fermi : signes d’un puissant cataclysme

    Autre preuve tangible de l'événement : les immenses bulles de Fermi, découvertes en 2010 par le satellite éponyme. Ces boursouflures de gaz chauds s'étendent sur plus de 27.000 années-lumière de part et d'autre du bulbe galactique. Une flambée dite de Seyfert, émise par Sagittarius A*Sagittarius A* il y a environ deux millions d'années, en est probablement à l'origine.

    De même que les torrentstorrents de particules chargées propulsées à des vitessesvitesses très élevées ont heurté le grand courant de Magellan. En témoignent, selon l'équipe scientifique, les émissions de lumière H-alpha dans cette région proche du centre galactique. Créé par la recombinaisonrecombinaison des protonsprotons avec des électronsélectrons, après qu'ils aient été éjectés (séparés) par un bombardement d'ultraviolet, ce rayonnement raconte la blessure infligée par une violente explosion. Ajoutons enfin que d'après Bland-Hawthorn, les étoiles au centre de notre galaxie n'ont jamais pu produire suffisamment de rayonnement ultraviolet pour provoquer un tel impact. Il ne peut y avoir eu non plus de formations d’étoiles à un rythme élevé. Tout semble indiquer que le trou noir supermassif est à l'origine de ce violent cataclysme.

    Bien sûr, Sgr A* est très entouré de matièrematière et renouvellera plusieurs fois l'événement. En attendant, « nous pensons qu'un nuage de gaz appelé G2 tombera l'année prochaine : ceci sera petit, mais nous sommes impatients de voir ce feufeu d'artifice ! », ajoute l'astrophysicien, fasciné par le comportement du trou noir central.