On sait depuis une cinquantaine d'années qu'il existe d'importantes traces d'écoulements ayant sculpté la surface de Mars. Des minéraux identifiés par les sondes plaident aussi pour un passé avec de l'eau liquide sur la Planète rouge. Mais peut-on être sûr que certains de ces écoulements n'étaient pas aussi le fait du dioxyde de carbone à l'état liquide ? Une découverte relance le débat !
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C'est entendu, aujourd'hui encore il y a de l’eau et de la glace sur Mars et sa surface montre l'existence d'anciens océans, lacs, fleuves et rivières. Mais les conditions de pression et de température sont telles que l'on détecte aussi de la glace sèche, c'est-à-dire du dioxyde carbone (CO2) gelé et notamment aux calottes polaires.
Certaines traces d'écoulements très récentes surveillées par les sondes en orbite comme Mars Reconnaissance Orbiter (MROMRO) de la Nasa avec la désormais mythique caméra High Resolution Imaging Science Experiment (HiRise) sont peut-être le produit pendant les étés martiens et aux basses latitudeslatitudes de la fonte de dépôts de glace sèche.
En fait, même au cours des derniers milliards d'années de l'histoire martienne, il n'est pas certain qu'une partie des lits de rivières et de lacs asséchés sur Mars, qui indiquent la présence d'écoulements il y a longtemps, ne soit pas le produit d'importantes quantités de dioxyde de carbonedioxyde de carbone liquideliquide en surface, quantités aujourd'hui disparues, comme l'eau liquide, et on ne sait pas vraiment où ni comment avec certitude.
Les géologuesgéologues martiens ont tout de même fait remarquer il y a longtemps que plusieurs dépôts de minérauxminéraux et des roches qu'ils forment, détectés aussi bien depuis l'espace qu'avec les rovers martiensrovers martiens, sont clairement associés à de l'eau liquide, H2O donc et pas CO2).
Après 1 000 jours d’exploration martienne, le rover Perseverance de la Nasa étudie des roches qui témoignent de plusieurs époques de l’histoire d’un delta fluvial vieux de plusieurs milliards d’années. Les scientifiques étudient cette région de Mars, connue sous le nom de cratère Jezero, pour voir s’ils peuvent trouver des preuves de vie ancienne enregistrées dans les roches. Ken Farley, scientifique du projet Perseverance, propose une visite guidée d’un panorama richement détaillé de l’emplacement du rover en novembre 2023, pris par l’instrument Mastcam-Z. Composée de 993 images individuelles et de 2,38 milliards de pixels, cette mosaïque à 360 degrés regarde dans toutes les directions depuis un endroit que l’équipe scientifique du rover appelle « Airey Hill ». Des parties du rover lui-même sont visibles dans la scène, apparaissant plus déformées vers les bords en raison du traitement de l’image. Une amélioration des couleurs appliquée à l’image augmente le contraste et accentue les différences de couleur. En se rapprochant de ce à quoi ressemblerait la scène dans des conditions d'éclairage similaires à celles de la Terre, cet ajustement permet aux scientifiques de la mission d'utiliser leur expérience quotidienne pour interpréter le paysage. La vue sur Mars serait plus sombre et plus rougeâtre. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © Nasa, JPL-Caltech, ASU, MSSS ; ESA, DLR, FU-Berlin
La séquestration géologique de gaz carbonique, un modèle pour Mars ?
Toutefois, un article publié récemment dans Nature Geoscience (et dont on peut connaître en partie le contenu en raison d'un poster présenté lors de la dixième conférence internationale sur Mars du 22 au 25 juillet 2024 au California Institute of Technology (Caltech) à Pasadena, en Californie) apporte de nouvelles pièces au débat. Il accompagne un communiqué du MIT avec des commentaires de Michael Hecht, chercheur principal de l'instrument Moxie à bord du rover martien PerseverancePerseverance de la Nasa et également en poste à l'observatoire Haystack du MIT. Hecht y explique : « Comprendre comment suffisamment d'eau liquide a pu s'écouler sur Mars à l'origine pour expliquer la morphologiemorphologie et la minéralogie que nous observons aujourd'hui est probablement la plus grande question non résolue de la science martienne. Il n'y a probablement pas de bonne réponse unique, et nous suggérons simplement une autre pièce possible du puzzle. »
Lui et ses collègues disposent maintenant de résultats d'étude concernant la séquestration géologique sur Terre de gaz carbonique liquide (LCO2). Il se trouve que sous cette forme, le CO2 donne des réactions avec les roches qui fabriquent les mêmes produits d'altération prédominants sur Mars, carbonates, phyllosilicatesphyllosilicates et sulfates, que l'on sait être issus sur Terre des écoulements et de la présence d'eau liquide.
Comme l'explique donc le communiqué du MIT, « l'argument en faveur de l'existence probable de CO2 liquide à la surface martienne n'est pas un scénario tout ou rien. Le LCO2, l'eau liquide ou une combinaison des deux peuvent rendre compte des preuves géomorphologiques et minéralogiques de l'existence d'une surface martienne sculptée par des écoulements ».
Les chercheurs mettent cependant en garde. En effet, les données révélées par les expériences sur Terre ont été obtenues dans des conditions de température terrestres et à des pressions de plusieurs dizaines d'atmosphèresatmosphères. Ce sont des conditions très différentes qui existent sur Mars depuis quelques milliards d'années. Ce qui fait dire à Michael Hecht qu'« il est difficile de dire dans quelle mesure il est probable que ces spéculations sur la planète Mars primitive soient vraies. Ce que nous pouvons dire, et nous le disons, c'est que la probabilité est suffisamment élevée pour que la possibilité ne soit pas ignorée ».