La grande galaxie d'Andromède n'est qu'à environ 2,2 millions d'années-lumière de la Voie lactée et elle a joué un rôle important pour l'essor de la cosmologie moderne pendant la première moitié du XXe siècle. Elle possède encore des secrets que les astronomes ont tenté de percer en réalisant pendant plus de 10 ans quelque 600 clichés de cette galaxie avec le télescope spatial Hubble. Il en a résulté une extraordinaire photomosaïque montrant des détails de la population stellaire de Messier 31 comme jamais.


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    Il y a quelques jours, la Nasa rappelait qu’il y a guère plus d’un siècle, l’astronome états-unien Edwin Hubble avait découvert, dans ce qui était alors la nébuleuse d’Andromède, une étoile particulière – que l’on connaît aujourd’hui encore sous le nom de V1. Il s'agissait d'une étoile variable, une céphéide, comme disent les astronomesastronomes. Or, Hubble et ses collègues savaient que la luminositéluminosité intrinsèque de cette étoile détermine sa période de pulsation faisant varier cette luminosité. On savait s'en servir dans la Voie lactée comme de « chandelles standardschandelles standards » pour déterminer des distances.

    En effet, plus une bougie est loin, moins elle est lumineuse. Si on connaît sa luminosité, disons à un mètre de distance, on peut en déduire son éloignement en mesurant sa luminosité apparente. Dans notre Galaxie, on pouvait étalonner ces chandelles en mesurant leur distance, d'abord par la fameuse méthode de la parallaxe. Cette méthode n'est pas praticable en dehors de la Voie lactée, mais en découvrant une céphéide dans Andromède, Hubble détermina sa distance et du même coup qu'Andromède était un astre aussi grand que notre Galaxie et donc en dehors, ouvrant la voie à une plongée toujours plus vertigineuse dans les abîmes du cosmoscosmos observable, notamment avec le télescopetélescope nommé en l'honneur de Hubble et maintenant avec son successeur, le James-Webb.

    En commémoration de la découverte par Edwin Hubble d'une étoile variable de la classe des céphéides, appelée V1, dans la galaxie voisine d'Andromède il y a 100 ans, des astronomes se sont associés à l'<em>American Association of Variable Star Observers</em> (AAVSO) pour étudier l'étoile. Les observateurs ont suivi V1 pendant six mois, produisant un tracé, ou courbe de lumière, de la montée et de la descente rythmiques de la lumière de l'étoile. Sur la base de ces données, le télescope spatial Hubble devait capturer l'étoile à sa lumière la plus faible et la plus brillante. Les observations d'Edwin Hubble sur V1 sont devenues la première étape cruciale dans la découverte d'un univers plus vaste et plus grandiose que certains astronomes ne l'imaginaient à l'époque. Autrefois considérée comme une « nébuleuse spirale » proche, les mesures d'Andromède avec son étoile céphéide intégrée ont servi de borne kilométrique stellaire. Elles ont définitivement montré qu'Andromède était bien loin de notre Voie lactée. Edwin Hubble a continué à mesurer les distances de nombreuses galaxies au-delà de la Voie lactée en trouvant des variables céphéides dans ces niveaux. Les vitesses de ces galaxies lui ont permis de déterminer que l'Univers est en expansion. © Nasa, ESA, Hubble Heritage Team (STScI/AURA) ; Remerciements : R. Gendler
    En commémoration de la découverte par Edwin Hubble d'une étoile variable de la classe des céphéides, appelée V1, dans la galaxie voisine d'Andromède il y a 100 ans, des astronomes se sont associés à l'American Association of Variable Star Observers (AAVSO) pour étudier l'étoile. Les observateurs ont suivi V1 pendant six mois, produisant un tracé, ou courbe de lumière, de la montée et de la descente rythmiques de la lumière de l'étoile. Sur la base de ces données, le télescope spatial Hubble devait capturer l'étoile à sa lumière la plus faible et la plus brillante. Les observations d'Edwin Hubble sur V1 sont devenues la première étape cruciale dans la découverte d'un univers plus vaste et plus grandiose que certains astronomes ne l'imaginaient à l'époque. Autrefois considérée comme une « nébuleuse spirale » proche, les mesures d'Andromède avec son étoile céphéide intégrée ont servi de borne kilométrique stellaire. Elles ont définitivement montré qu'Andromède était bien loin de notre Voie lactée. Edwin Hubble a continué à mesurer les distances de nombreuses galaxies au-delà de la Voie lactée en trouvant des variables céphéides dans ces niveaux. Les vitesses de ces galaxies lui ont permis de déterminer que l'Univers est en expansion. © Nasa, ESA, Hubble Heritage Team (STScI/AURA) ; Remerciements : R. Gendler

    Une photographie de 200 millions d'étoiles avec 2,5 milliards de pixels

    La NasaNasa et l'ESAESA ont révélé maintenant la plus grande photomosaïque de la galaxie d'Andromèdegalaxie d'Andromède. Plus de 10 ans d'observation, au cours de plus de 1 000 orbitesorbites du télescope spatial Hubbletélescope spatial Hubble, ont été consacrés à sa réalisation. Cela a permis de combiner plus de 600 clichés dans les longueurs d'ondelongueurs d'onde proches de l'ultravioletultraviolet, du visible et de l'infrarougeinfrarouge. Le temps de pose total, si l'on peut dire, et l'instrumentation du télescope spatial Hubble qui a rendu possible cet exploit, offrent à la noosphère plus de 200 millions d'étoiles dans la galaxie d'Andromède, mais seulement les étoiles plus brillantes que notre SoleilSoleil. Elles sont présentes sur un panorama d'environ 2,5 milliards de pixelspixels, cependant il ne s'agit que de la pointe émergée d'un iceberg car l'on considère que Messier 31, la galaxie d'Andromède, contiendrait au total environ 1 000 milliards d'étoiles, comme l'explique un communiqué conjoint des deux agences spatiales.

    Il s'agit de la plus grande mosaïque photographique jamais réalisée par le télescope spatial Hubble. Andromède est vue presque de profil, inclinée de 77 degrés par rapport à la vue de la Terre. Les régions intéressantes comprennent : a/ Des amas d'étoiles bleues brillantes intégrées dans la galaxie, des galaxies d'arrière-plan vues beaucoup plus loin et un bombardement photographique par quelques étoiles brillantes au premier plan qui se trouvent en fait à l'intérieur de notre Voie lactée ; b/ NGC 206, le nuage d'étoiles le plus visible d'Andromède ; c/ Un jeune amas d'étoiles bleues nouveau-nées ; d/ La galaxie satellite M32, qui pourrait être le noyau résiduel d'une galaxie qui est autrefois entrée en collision avec Andromède ; e/ Des bandes de poussière sombres à travers une myriade d'étoiles. © Nasa, ESA, B. Williams (<em>U. of Washington</em>)
    Il s'agit de la plus grande mosaïque photographique jamais réalisée par le télescope spatial Hubble. Andromède est vue presque de profil, inclinée de 77 degrés par rapport à la vue de la Terre. Les régions intéressantes comprennent : a/ Des amas d'étoiles bleues brillantes intégrées dans la galaxie, des galaxies d'arrière-plan vues beaucoup plus loin et un bombardement photographique par quelques étoiles brillantes au premier plan qui se trouvent en fait à l'intérieur de notre Voie lactée ; b/ NGC 206, le nuage d'étoiles le plus visible d'Andromède ; c/ Un jeune amas d'étoiles bleues nouveau-nées ; d/ La galaxie satellite M32, qui pourrait être le noyau résiduel d'une galaxie qui est autrefois entrée en collision avec Andromède ; e/ Des bandes de poussière sombres à travers une myriade d'étoiles. © Nasa, ESA, B. Williams (U. of Washington)

    Ce communiqué explique également que les données de Hubble dans cette fantastique nouvelle image fournissent de nouveaux indices sur l'histoire évolutive d'Andromède. « Si la Voie lactée et Andromède se sont probablement formées à la même époque, il y a plusieurs milliards d'années, les observations montrent qu'elles ont des histoires évolutives très différentes, bien qu'elles se soient développées dans le même voisinage cosmologique. Andromède semble être plus peuplée d'étoiles plus jeunes et de caractéristiques inhabituelles comme des flux d'étoiles cohérents, affirment les chercheurs. Cela implique qu'elle a une histoire récente de formation d'étoiles et d'interactions plus active que la Voie lactée.

    Un coupable possible est la galaxie satellite compacte Messier 32Messier 32, qui ressemble au noyau dépouillé d'une galaxie autrefois spirale qui a pu interagir avec Andromède dans le passé. Des simulations informatiquessimulations informatiques suggèrent que lorsqu'une rencontre rapprochée avec une autre galaxie utilise tout le gazgaz interstellaire disponible, la formation d'étoiles diminue. »

    Chaque « grain » est une étoile d'Andromède. © Nasa, ESA, B. Williams (<em>U. of Washington</em>)
    Chaque « grain » est une étoile d'Andromède. © Nasa, ESA, B. Williams (U. of Washington)

    Le saviez-vous ?

    On a peine à le croire, mais alors qu’Albert Einstein avait postulé en 1917 dans son modèle cosmologique relativiste – le premier du genre – que le cosmos devait être uniformément peuplé de grandes galaxies comme la Voie lactée et en conformité finalement avec la théorie des Univers-îles du philosophe Immanuel Kant, le débat se poursuivait encore au début des années 1920 quant à savoir si des nébuleuses comme Andromède faisait partie de notre Galaxie ou non.

    La question allait commencer à être tranchée dans la nuit du 5 au 6 octobre 1923 par l’astronome Edwin Hubble qui effectuait des observations cette nuit-là d’Andromède avec le télescope le plus puissant de cette époque, à l'observatoire du mont Wilson en Californie.

    Hubble effectuait des photographies concentrées sur trois novae présumées dans un des bras spiraux d’Andromède, écrivant la lettre « N », pour nova, à côté de chacun des trois candidats présumés sur des plaques photographiques réalisées avec une exposition de 45 minutes.

    Une nova ? Non, une étoile variable de type céphéide

    Mais, en analysant d’autres images, Edwin Hubble va rapidement se rendre compte que l’une des étoiles n’est pas une nova, mais une étoile variable car sa luminosité évoluait beaucoup plus vite que pour une nova classique. Sortant son marqueur, Hubble barra le « N » à côté de la nouvelle variable Céphéide et écrivit « VAR », pour variable, suivi d'un point d'exclamation (voir l'image ci-dessous).

    Hubble la nomme finalement V1 et trace sa courbe de lumière, déterminant une période de 31,4 jours, indiquant que l'objet était une variable céphéide. Il peut alors se servir de la relation entre luminosité absolue d’une céphéide au maximum de sa brillance avec sa période pour en déduire la distance d’Andromède, connaissant la luminosité apparente, plus faible, de V1.

    Aux précisions des mesures de l’époque, l’étoile s’est avérée se trouver à 1 million d’années-lumière de la Terre, soit plus de trois fois le diamètre calculé par Shapley de la Voie lactée. La taille apparente d’Andromède montre également qu’il s’agit d’un objet au moins aussi grand que notre Galaxie.

    Shapley faisait partie de ceux qui ne croyaient pas aux idées de Kant, mais devant la lettre que lui envoie Hubble expliquant les détails de sa découverte avec V1, il se rend à l’évidence et selon la légende, il aurait dit à un collègue : « Voici la lettre qui a détruit mon univers ».

    Hubble va continuer à révolutionner notre vision de l'Univers en donnant en 1929, et toujours grâce aux céphéides, une preuve de l'expansion du cosmos observable. En réalité, celui qui comprend vraiment ce qu'a découvert Hubble et dont on peut même dire qu'il l'a anticipé, c'est Georges Lemaître... Mais c'est une autre histoire...

    Des vues d'une célèbre étoile palpitante prises à près de 90 ans d'intervalle et un portrait de sa maison galactique sont présentés dans cette collection d'images. Le disque en forme de crêpe composé d'étoiles, de gaz et de poussières qui composent la galaxie d'Andromède, ou M31, est représenté sur l'image de gauche. Andromède est voisine de la Voie lactée et réside à 2 millions d'années-lumière. La petite boîte blanche juste au-dessus du centre présente la vue du télescope spatial Hubble. Une flèche pointe vers l'image de Hubble, prise par la <em>Wide Field Camera 3</em>. L'instantané est recouvert d'étoiles qui ressemblent à des grains de sable. Le cercle blanc, en bas à gauche, identifie la variable numéro un de Hubble, ou V1, l'étoile variable céphéide découverte par l'astronome Edwin Hubble en 1923. La grande boîte blanche au centre délimite la région photographiée par l'astronome Edwin Hubble, qui a utilisé le télescope Hooker, le télescope le plus puissant de cette époque. Une flèche pointe vers une copie, en bas à droite de l'image, d'Andromède prise par le télescope Hubble, mais réalisée sur une plaque de verre de 4 pouces sur 5 pouces (environ 10 x 13 cm) par Edwin Hubble et datée du 6 octobre 1923. © Nasa, ESA et Z. Levay et Hubble Heritage Team (STScI/AURA)
    Des vues d'une célèbre étoile palpitante prises à près de 90 ans d'intervalle et un portrait de sa maison galactique sont présentés dans cette collection d'images. Le disque en forme de crêpe composé d'étoiles, de gaz et de poussières qui composent la galaxie d'Andromède, ou M31, est représenté sur l'image de gauche. Andromède est voisine de la Voie lactée et réside à 2 millions d'années-lumière. La petite boîte blanche juste au-dessus du centre présente la vue du télescope spatial Hubble. Une flèche pointe vers l'image de Hubble, prise par la Wide Field Camera 3. L'instantané est recouvert d'étoiles qui ressemblent à des grains de sable. Le cercle blanc, en bas à gauche, identifie la variable numéro un de Hubble, ou V1, l'étoile variable céphéide découverte par l'astronome Edwin Hubble en 1923. La grande boîte blanche au centre délimite la région photographiée par l'astronome Edwin Hubble, qui a utilisé le télescope Hooker, le télescope le plus puissant de cette époque. Une flèche pointe vers une copie, en bas à droite de l'image, d'Andromède prise par le télescope Hubble, mais réalisée sur une plaque de verre de 4 pouces sur 5 pouces (environ 10 x 13 cm) par Edwin Hubble et datée du 6 octobre 1923. © Nasa, ESA et Z. Levay et Hubble Heritage Team (STScI/AURA)